3. Une pédagogie inter-éducative

Nous ne pouvons évoquer la question de l’humanisme pédagogique, sans faire allusion à la relation concrète qui, au cours des apprentissages, doit s’établir entre l’enseignant et l’apprenant. Pour les partisans de la pédagogie de l’autonomie, cette relation doit prendre sa place véritable dans la formation des citoyens libres. A cet effet, le dialogue et la participation doivent avoir une place de choix dans cette démarche. Par le dialogue éducatif, l’enseignement doit tendre vers un processus d’enrichissement mutuel. Il n’appartient plus à l’enseignant de venir déposer ses connaissances, ou le contenu du programme qui souvent ne tient pas compte de la réalité, dans le vase qu’est l’apprenant, mais par un processus fondé sur le respect, la culture, l’environnement et la participation de l’apprenant, ensemble ils parviendront à un enrichissement mutuel, même si quelque part, l’expérience de l’enseignant constitue un plus pour l’apprenant. Le pédagogue américain Carl Rogers pense quant à lui, que l’enseignement est une fonction qui est largement surestimé. Ce qui l’irrite le plus dans un processus éducatif est le fait qu’on crée une confusion entre « enseigner » et « instruire ou transmettre des connaissances». Il trouve cette manière de faire ahurissante et se pose la question suivante : « trop de gens ne sont-ils pas déjà guidés, dirigés ? »598 En toute modestie, voici comment il définit un enseignement normal, fondé sur le dialogue et la coopération : « Pour moi, l’enseignement constitue une activité relativement peu importante et largement surfaite. »599 Il s’inquiète de la toute puissance que s’arrogent les enseignants dans l’institution scolaire. La question qu’ils se posent est celle de savoir ce qu’il faut enseigner. Et au praticien de l’éducation à la liberté de se demander s’il est encore possible de concevoir que dans le monde actuel, ce sont les enseignants qui sont sages et les apprenants insensés ! Parlant du contenu des enseignements, il dit tout ce qu’il pense d’un enseignement fondé sur le préjugé : « ce concept du contenu du cours est fondé sur la croyance que ce qui est enseigné est appris, que ce qui est exposé est assimilé. Je ne connais pas de préjugé plus manifestement faux. Il n’y a qu’à interroger quelques étudiants. »600 Cette critique remet à plat, la question de la relation qui entre l’enseignant et l’apprenant. Qui enseigne l’autre au juste ?

Notes
598.

C. ROGERS, Liberté pour apprendre, Paris, Dunod, 1972, p. 101.

599.

Ibidem.

600.

Ibidem.