3. Transgresser la frontière

Dans la perspective vitaliste exposée plus haut, la frontière entre morts et vivants se trouble. Non seulement les médecins recherchent un signe indubitable de la mort, mais on les voit aussi s’interroger sur la persistance de signes vitaux chez les cadavres. Dès la fin du XVIIIe siècle, des physiologistes tentent même d’en provoquer : des expériences de galvanisation, consistant dans l’application de courants continus de basse tension, les courants galvaniques, sur des cadavres de suppliciés sont alors menées, inspirant peut-être Mary Shelley pour la rédaction de son Frankenstein, qui paraît en 1818. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les transfusions de sang remplacent le courant électrique. Dès 1858 Brown-Séquard tente ainsi de ramener à la vie des chiens qu’il a décapités. Dans un article conservé par Lacassagne, il questionne ainsi « la conservation des attitudes de la vie et de l’expression faciale, après la mort »1954. Comment expliquer que, alors même que « notre attitude et notre expression faciale dépendent de la contraction de nos muscles, due à une influence des centres nerveux [et] cette influence cessant nécessairement à l’instant de la mort »1955, les muscles contractés ne se relâchent pas toujours, et que le cadavre conserve parfois l’air parfaitement vivant ? Cette persistance fascine les médecins, qui cherchent même à la prolonger, à conserver les apparences de la vie, voire à la ressusciter.

Pour alimenter les collections de ses musées, le docteur Lacassagne doit s’intéresser de près à la conservation des pièces anatomiques normales ou pathologiques. Dans son fonds documentaire, on a ainsi retrouvé les notes qu’il a prises à l’occasion d’un cours de M. Tourdes à Nancy en 18881956, sur les modalités de conservation des corps : tout le protocole y est, depuis la désinfection du local et du corps, préalablement à l’autopsie, jusqu’à la conservation du corps et des pièces à conviction, par injection de glycérine ou d’une solution phéniquée dont la composition est d’ailleurs détaillée, avec des variantes selon la nature et le volume de la pièce en question (cœur, cerveau, etc.). On trouve également, dans le Vade-mecum, un certain nombre de recommandations relatives à la « conservation des cadavres » et des pièces anatomiques1957 afin de retarder les processus de décomposition et de conserver les tissus en aussi bon état que possible pour permettre le travail postérieur de l’expert, la réalisation d’un examen histologique, ou l’étude de ces pièces par des étudiants. Les différents modes de conservation des pièces anatomiques font l’objet d’une étude comparée. Le lavage à grande eau suivi d’un bain d’alcool permet une « très bonne conservation pour un examen histologique ultérieur », mais il décolore les pièces. Au contraire, si l’on conserve la pièce « dans un bocal au milieu d’une quantité dix fois plus considérable d’une solution de chloral au dixième […la] conservation de la couleur et de l’apparence [est] assez bonne »1958. Lacassagne n’est pas exceptionnel à ce titre, il est courant chez les médecins, et chez les légistes notamment, de vouloir conserver les apparences de la vie aux pièces anatomiques remarquables, pour poursuivre leurs recherches ou leur enseignement. Mais l’on en sait encore bien peu sur les modalités de constitution de ces collections, et sur les expérimentations menées par Lacassagne à des fins de conservation des pièces anatomiques. Les collections constituées par le docteur Lacassagne, et qui font aujourd’hui partie du patrimoine de l’Université Lyon 1, demeurent très peu connues, et l’historiographie française est quasiment muette sur le sujet. Le musée, que l’on définit comme un « établissement ouvert au public où sont conservés, répertoriés, classés des objets, des documents, des collections d’intérêt artistique, scientifique ou technique, dans un but socioculturel, scientifique et pédagogique », a fait l’objet d’études historiques nombreuses. Les rapports des musées avec l’État et avec les publics sont ainsi bien connus1959. Le sujet a fait l’objet de synthèses récentes particulièrement documentées1960. Mais il s’agit toujours d’ouvrages prétendument généralistes, qui sont en réalité centrés sur l’étude des musées d’art et d’histoire. Les musées de médecine, qu’ils soient spécifiquement consacrés à l’anatomie ou à l’histoire de la discipline sont sans doute victimes d’une confidentialité pourtant souhaitée, à l’origine, par leurs créateurs. Essentiellement dévolus à la formation des étudiants en médecine, sis dans les locaux de la Faculté, ils ne sont pas accessibles au grand public. Et quand, à la fin du siècle, certaines collections anatomiques apparaissent sur les champs de foire1961 – à l’instar du Grand musée anatomique Spitzner – c’est pour un public réservé d’adultes, comprenez d’ « hommes seulement ayant 20 ans révolus »1962 si l’on en croit le programme de l’une de ces expositions populaires à la fin du siècle dernier. En fait, ces musées n’ont encore fait l’objet d’aucune étude spécifique1963 à ma connaissance, à l’exception de rares thèses de médecine, souvent plus descriptives qu’analytiques1964. La seule référence qui soit strictement consacrée à ces collections médicales est britannique1965 : l’auteur y souligne la fascination et la crainte qui entourent les cadavres dans le monde occidental, expliquant pour une part la confidentialité de ces collections. Et pourtant… Le musée Orfila-Rouvière à Paris possède, entre autres, une très importante collection de préparations anatomiques humaines, conservées grâce à diverses injections. Mais il se visite uniquement sur rendez-vous ou de manière virtuelle, sur le net1966. Les collections anatomiques de l’Université Claude Bernard-Lyon 1 sont un peu plus accessibles : elles se visitent tous les après-midi de la semaine, pour peu que l’on prenne la peine de se rendre à la Faculté de médecine, d’en « contourner le bâtiment principal sans y entrer par la gauche »1967 et d’ « emprunter un escalier extérieur qui mène directement au musée » trois étages plus haut. En fait, tout se passe comme si ces musées ne faisaient pas véritablement partie d’un patrimoine légitime. Ils sont marginaux dans les établissements qui les accueillent (au 8e étage de la Faculté de Médecine de Paris, au 3e et dernier à Lyon et accessible par l’extérieur et comme par la porte de derrière). Le musée lyonnais n’est d’ailleurs pas référencé sur le site officiel de la ville de Lyon1968 à la rubrique « Musée des métiers et des sciences », alors que d’autres collections universitaires le sont1969. En retrait, comme l’Enfer d’une bibliothèque, ces collections alimentent fantasmes et légendes, territoires majeures de l’interdit qui génèrent en retour toutes les curiosités, mais ne sont finalement guère fréquentés, alors que pour les enrichir, « M. Lacassagne a recueilli peu à peu, au fur et à mesure des expertises judiciaires qui lui étaient confiées, les nombreuses pièces anatomiques et autres qui remplissent son musée »1970, et qu’il a déployé des trésors d’invention pour les arracher à l’inéluctable travail de décomposition.

Plus frappantes sans doute que la conservation de ces pièces et la constitution de ces collections, les expériences tentées pour ramener des cadavres à la vie occupent également beaucoup les médecins de la seconde moitié du XIXe siècle. Le docteur Lacassagne n’a certes rien d’un docteur Frankenstein, mais certaines coupures de presse conservées par ses soins sont pour le moins surprenante, en ces temps de rationalité positiviste incontestée. Le physiologiste Brown-Séquard (1817-1894) s’illustre ainsi, au milieu du XIXe siècle, en mettant en place un protocole expérimental sophistiqué qui lui permet de conclure que « lorsqu’on fait passer dans une tête de chien séparée du corps et devenue inerte depuis quelques minutes, une quantité suffisante de sang oxygéné, on y voit renaître un certain nombre de mouvements remarquables »1971. Ces expériences sont reprises à la fin du siècle par des praticiens qui en nuancent les résultats. Ainsi pour le docteur Laborde, « la transfusion de sang, faite […] dans une tête inerte depuis quelques minutes fait renaître des mouvements automatiques et des mouvements réflexes multiples et étendus, mais elle ne peut réveiller ni les sens ni la volonté »1972. Mais cela ne l’empêche pas de tenter sa chance avec des cadavres de suppliciés1973, toujours sans succès, ce qui n’entame en rien son enthousiasme. Il croit fermement que, dans la mesure où « pour restituer à l’organe de la perception et de la conscience, au cerveau, son exercice fonctionnel […] il est nécessaire de le replacer expérimentalement dans les conditions d’irrigation normale […] le plus tôt possible, autrement dit avant la perte définitive et irrémédiable de la fonction qu’il s’agit de réveiller, à l’aide de son excitant naturel et indispensable » 1974, il lui suffit de mettre davantage au point son protocole d’expérimentation. Et d’expliquer ainsi ses échecs :

‘« cette condition expérimentale sine qua non a été omise par la plupart des observateurs qui ont eu l’occasion, même en ces derniers temps, de faire les investigations les plus favorables sur des têtes de suppliciés […mais] si un physiologiste tentait cette expérience sur une tête de supplicié, quelques instants après la mort, il assisterait peut-être à un grand et terrible spectacle… Peut-être pourrait-il rendre à cette tête les fonctions cérébrales et réveiller dans les yeux et des les muscles faciaux les mouvements qui, chez l’homme, sont provoqués par les réflexions et les pensées dont le cerveau est le foyer »1975. ’

Les expériences de revivification tentées par le docteur Laborde sur les décapités font l’objet de vives polémiques scientifiques. En juillet 1885, Paul Bert et Alfred Vulpian s’y opposent lors d’une séance de l’Académie des sciences1976. Mais il n’en démord pas, affirmant que ses contradicteurs ne parviendront pas à le décourager, attendant « avec la même confiance dans la réalisation et l’importance scientifiques des résultats »1977.

Alexandre Lacassagne n’a rien écrit à ce sujet, et il ne semble pas s’avancer personnellement sur ces terrains glissants d’expérimentation, mais il n’en conserve pas moins un certain intérêt pour ces questions. Dans le dossier de pièces imprimées sur le cadavre qu’il constitue, les articles portant sur ces étranges expériences sont au nombre de sept, sur un total de 28 coupures de presse complètes. En filigrane, c’est la question de la peine de mort qui se trouve en fait posée, et celle de son mode d’administration. Car si l’on peut ramener à la vie la tête d’un supplicié décapité, c’est que le décès ne survient pas au moment même de la décapitation. Cet argument paraît tout à fait défavorable au maintien de ce mode d’exécution, par conséquent jugé inhumain. En 1908, Alexandre Lacassagne publie ainsi un ouvrage tout entier consacré au sujet1978, dans lequel il se prononce très nettement en faveur de la peine de mort, mais prônel’abandon de la guillotine au profit de la pendaison, qui se pratique alors déjà en Angleterre.Nombre de coupures de presse conservées par Alexandre Lacassagne 1979 rendent compte de l’accueil qui est fait à ce livre lors de sa parution, et des débats qui se nouent alors autour des modalités de mise à mort des condamnés. Pour Lacassagne, le supplice de la guillotine est très douloureux et n’entraîne pas une mort immédiate :

‘« Je citerai la communication du docteur Beaurieux à la Société de médecine du Loiret, parue ensuite dans les Archives d’anthropologie criminelle 1980 , sur l’exécution de Languille.
Immédiatement après la décapitation, les paupières et les lèvres du guillotiné s’agitent pendant cinq ou six secondes. Ces contractions, irrégulièrement rythmées, ayant cessé deux seconds plus tard, le docteur Beaurieux cria : « Languille ! », les yeux du condamné s’ouvrirent, fixèrent ceux du docteur Beaurieux, les pupilles s’accommodant, puis les paupières se refermèrent lentement, sans contraction, sans secousses. « Le regard était vivant », écrit Beaurieux. Un second appel eut le même résultat. Les suivants restèrent vains.
Il peut donc très bien y avoir une survivance très courte, après la décollation »1981. ’

Ce récit terrifiant conduit Alexandre Lacassagne à préférer la pendaison, lors de laquelle le décès, considéré comme plus rapide, est précédé d’une perte de connaissance salvatrice. Cette opinion du docteur Lacassagne fait l’objet d’une communication devant l’Académie des Sciences1982. Il ne s’agit donc pas d’une inquiétude marginale. Le 17 janvier 1870 le journal populaire Le Gaulois publie un article qui reprend une lettre du docteur Pinel qui développe largement cette opinion1983. Distinguant le tronc et la tête il précise ainsi que le premier, se vidant de sons sang, périt d’hémorragie au bout de cinq minutes environ mais s’éteint « d’une mort lente et paisible », n’étant pas doué de conscience. Au contraire la tête, et surtout le cerveau, qui n’a pas subi de lésion, « meurt, mais d’inanition et de refroidissement », ce qui prend du temps. Pinel avance le chiffre de trois heures. Et la conscience demeure. « C’est [donc] davantage de torture morale que de torture physique qu’il s’agit ». On s’en doute, une telle démonstration suscite l’émoi du public. Il faut dire que la question de la peine de mort fait alors débat en France1984. Le président de la République Armand Fallières (1906-1913) y est opposé et gracie systématiquement les condamnés à mort pendant la première partie de son mandat, jusqu’à la violente campagne de presse de 1908, hostile à l’abolition, qui le conduit à changer d’attitude. Lacassagne prend donc une part active au débat amorcé dès 19051985, dans le contexte de l’arrivée de la gauche au pouvoir1986

Plus généralement, les médecins du temps tentent de repousser les limites de la mort. C’est en effet là leur principale préoccupation, le moyen ultime, sans doute, d’achever de conquérir une légitimité scientifique déjà largement acquise. Les publications conservées dans le fonds Lacassagne en sont témoin1987 :

‘« Il est permis d’affirmer que dans les applications pratiques de la Science et dans l’exercice de l’Art, dont celle-ci est l’inspirateur et le guide, il n’est pas de résultat plus désirable et plus satisfaisant, et qui réponde mieux à leurs aspirations et à leur but suprême, que le suivant : “Rendre, restituer la vie à une créature humaine qui est sur le point et assurée de la perdre… ressusciter – pour dire le vrai mot – un cadavre apparent, en train de devenir réel et définitif »1988. ’

Les progrès techniques, et notamment la mise au point par le professeur Chaussier d’un « respirateur artificiel »1989 constitué d’un « tube laryngien » enchâssé sur un soufflet, permettent en effet de réaliser de quasi-miracles. Les techniques de réanimation, dont certaines sont déjà anciennes à l’instar de la respiration artificielle pratiquée sur les noyés, permettent de triompher de la mort de façon parfois spectaculaire. Le premier massage cardiaque est réalisé en 1904 : par ce moyen, on parvient à maintenir le cœur du sujet en vie. La technique a toutefois ses limites : « Ce n’est plus la vie, mais ce n’est point la mort », écrit le docteur Halluin1990 qui en espère cependant rien moins que « la résurrection de l’être considéré comme mort ». La limite entre la vie et la mort est durablement brouillée par les découvertes de la médecine et les progrès techniques.

Dans le même temps, on voit se développer un certain nombre de pratiques visant à transgresser cette frontière. Dans la société de cette fin de XIXe siècle, on a le goût de ces mystères autorisant une forme de commerce entre vivants et morts, et l’essor d’une mentalité positiviste ne parvient pas à le battre en brèche. On sait par exemple le succès que remportent le spiritisme et ses phénomènes1991, dont la communication typologique par les tables tournantes et parlantes permettant de communiquer avec l’au-delà, introduites en France en 18531992. Surprenante pratique dans un siècle que l’on a coutume de présenter comme celui de la « fin des dogmes »1993. Le succès de ces pratiques ne lasse pas d’intéresser, y compris les esprits les moins crédules. Ainsi Émile Littré y consacre tout un article, « documenté et nuancé »1994, dans la très sérieuse Revue des Deux-Mondes en 18561995. Conan Doyle (1859-1930), d’abord médecin avant que ses romans mettant en scène le personnage du détective Sherlock Holmes, est un spirite passionné, fasciné par la maison des sœurs Fox, sans doute le premier cas avéré de maison hantée. Camille Flammarion (1842-1925), grand vulgarisateur de l’astronomie en France, est également l’auteur de nombreux ouvrages sur les esprits1996, de même que Cesare Lombroso, l’alter ego italien de Lacassagne, qui s’intéresse particulièrement à l’hypnotisme1997. Bientôt le spiritisme cesse donc d’être un simple jeu de société pour devenir une véritable doctrine philosophique, sous l’impulsion d’Allan Kardec 1998. Alexandre Lacassagne possède un de ses ouvrages : Le Livre des Médiums 1999, qui relève de l’aspect expérimental de ces pratiques, sans doute le moins illégitime pour un scientifique comme lui. La question intéresse donc Alexandre Lacassagne. Si, selon Guillaume Cuchet, « la médecine officielle comme la psychologie spiritualiste qui dominait l’enseignement universitaire [sous le Second Empire], l’avaient pratiquement abandonné aux spéculations humanitaires et aux sciences plus ou moins “occultes” »2000, il semble bien que les médecins, et plus généralement les scientifiques de la fin du siècle, s’y intéressent de nouveau. Camille Flammarion réhabilite d’ailleurs résolument cette « branche particulièrement curieuse de l’arbre des connaissances humaines », soulignant que « dans la nature, il n’y a rien d’occulte, de surnaturel, il y a l’inconnu »2001. Au début du XXe siècle, un certain nombre de savants s’attachent ainsi à proposer une véritable « collaboration scientifique avec l’invisible »2002, pour reprendre l’expression de Jean Gattefossé, par ailleurs ingénieur chimiste, ce qui implique surtout pour les « Psychistes expérimentateurs » de se plier à une certaine rigueur « 1° [dans] l’examen consciencieux des résultats des expériences antérieures ; 2° [dans] la discussion raisonnée d’hypothèses calmement formulées »2003. Et cet intérêt de la part du médecin lyonnais paraît d’autant moins surprenant quand on considère que la ville de Lyon est la « véritable capitale du spiritisme français »2004. Selon les estimations effectuées par Kardec lui-même, on compte 25 ou 30 000 adeptes à Lyon, et quelque 600 groupes constitués2005, parmi lesquels une Société d’Études Psychiques de Lyon qui publie un bulletin dont Lacassagne possède un certain nombre d’extraits2006. L’inventaire du fonds Lacassagne est à la hauteur de cet intérêt : 13 ouvrages sont ainsi référencés à la rubrique « Spiritisme »2007, auxquels il faut ajouter les 66 références relatives à l’ « Hypnose, Hypnotisme » et le « Somnambulisme »2008, celles qui concernent le « Magnétisme »2009 (soit 16 références) et les 33 relatives à l’ « Occultisme », dont un dossier de pièces imprimées, ce qui fait tout de même 128 références au total2010. Les Archives d’anthropologie criminelle se font l’écho de ces intérêts. On y trouve ainsi des articles concernant l’hypnose2011, le magnétisme2012 ou le spiritisme2013. Et la revue relaie les inquiétudes générées par ces pratiques dont le succès s’explique justement parce qu’elles sont supposées permettre de transgresser la frontière qui sépare les morts des vivants, répondant à « une demande massive de “consolation” »2014 : on questionne par ce biais ses chers défunts comme on visiterait plus classiquement ses morts au cimetière. C’est dans cette perspective, et conjointement au succès du culte des morts, que le spiritisme français se développe plus particulièrement. Lacassagne donne son avis sur ce phénomène :

‘« Le culte rendu aujourd’hui aux morts ressemble de plus en plus à ce que nous l’avons rencontré chez les populations primitives et à ce que nous le trouvons actuellement chez les populations les moins avancées »2015.’

En conséquence, on s’en doute, il ne saurait adhérer à de telles pratiques. Et s’il admet qu’on se découvre au passage d’un corbillard, « c’est pour honorer la douleur de ceux qui l’accompagnent, et non pour rendre hommage à une dépouille qui ne nous est de rien et dont nous ne nous occupons que pour l’empêcher, autant que le permet le culte sacré des morts, d’être nuisible aux vivants »2016. Cette dernière formule sème cependant le doute : Lacassagne croirait-il aux fantômes ? La suite de l’article ne nous éclaire hélas pas sur ce point. Mais ce qui intéresse Alexandre Lacassagne, ce n’est pas tant la possibilité de franchir la frontière entre morts et vivants, fût-ce par la force de l’esprit. Il semble qu’il accorde en fait assez peu de crédit à cette éventualité. En revanche, ce qui retient son attention, ce sont ceux qui se livrent à ces pratiques – qu’ils soient spirites, hypnotiseurs ou hypnotisés –, le danger social qu’ils peuvent constituer, et leur état mental. L’hypnose, également appelée « sommeil morbide », est le plus souvent considérée comme dangereuse car elle conduirait à l’abolition de la volonté du sujet qui y est soumis : le docteur Henri Barth insiste ainsi sur « l’extrême docilité de l’imagination des sujets [magnétisés] qui les rend aptes à adopter sans discussion toutes les idées qu’on leur impose »2017. Si cela peut présenter des avantages dans le cadre d’un traitement médical, l’hypnose accédant alors au statut de « médication »2018 légitime pour le traitement des « affections d’origine nerveuse et plus spécialement des névroses »2019, l’exercice peut également permettre à « tout individu familiarisé avec les pratiques du magnétisme […de] faire exécuter au sujet mis dans l’état de somnambulisme tous les actes qu’il lui plaît ». D’où la nécessité pour un médecin légiste expérimenté de connaître ces pratiques2020 pour traquer les simulateurs qui invoquerait à tort l’hypnotisme afin de se dédouaner de quelque crime, voire pour y recourir lui-même « pour raviver les souvenirs et faire renaître dans l’esprit du sujet les impressions effacées [… ou], en essayant les manœuvres de l’hypnotisation sur l’inculpé, éprouver son plus ou moins d’impressionnabilité à ces manœuvres »2021. Un tel cas de simulation est d’ailleurs relaté dans la revue2022 :

‘« F…. [l’inculpé], endormi par des individus qui l’auraient connu, à l’hôpital de D…, comme hypnotisable, aurait, dans le sommeil hypnotique, inconsciemment bu et mangé, et négligé de payer ses dépenses bien qu’ayant de l’argent, puis emprunté à l’aubergiste quelque menue monnaie, et enfin aurait été suggestionné de commettre des délits de même nature les jours suivants »2023. ’

La question de la suggestion criminelle inquiète véritablement les médecins et les juristes : elle est d’ailleurs « à l’ordre du jour lors du congrès international de Neurologie qui [se tient] à Bruxelles du 11 au 17 septembre 1897 »2024. Un dépouillement rapide de la littérature scientifique sur le sujet2025 permet de montrer que l’opinion des médecins sur la question est en réalité assez nuancée. On peut distinguer deux grandes « écoles de pensées » : l’école dite « de Paris », qui n’admet la possibilité d’une telle suggestion « que chez des personnes dont la valeur morale en fait des criminels virtuels »2026, et l’école de Nancy , qui elle y ajoute foi et la « croit possible chez tout le monde ». En fait, pour la majorité des médecins légistes concernés, l’hypnose est un élément nécessaire mais non point suffisant pour expliquer le passage à l’acte criminel de certains individus. Il convient donc « d’examiner la valeur morale du sujet avant de se prononcer »2027. Plus généralement d’ailleurs, la possibilité de manipulation que semble induire l’hypnotisme retient l’attention des savants. Camille Flammarion insiste :

‘« À la suggestion de l’opérateur, la personne hypnotisée peut oublier complètement son propre nom et même sa personnalité, de femme se croire homme et réciproquement, de jeune se croire âgée ou enfant, s’imaginer même, en toute sincérité, être un animal quelconque »2028.’

C’est dire combien le magnétisme recèle de ferments de désordre. Ces pratiques limites ne sont donc légitimes qu’entre certaines mains, pratiquées dans certaines conditions. En 1888, l’Académie de médecine de Belgique se prononce ainsi en faveur d’une interdiction par le gouvernement des séances publiques d’hypnotisme2029, dont la finalité est essentiellement récréative. On retrouve ici sans doute, comme sur d’autres sujets, le désir des médecins de « s’en attribuer le monopole »2030. Il faut dire que dans un premier temps les pratiques spirites à visée thérapeutique, notamment la « médiumnité guérissante », empiètent sur leur territoire et passent souvent pour une forme d’exercice illégal de la médecine2031. Il ne peut être donné à tout le monde de s’aventurer sur le terrain de l’esprit : la pneumatologie, comme toutes les sciences, nécessite une certaine expertise, sans laquelle sa pratique pourrait bien s’avérer dangereuse. D’ailleurs, les premières recherches établissant des rapports entre le spiritisme et la pathologie mentale sont presque immédiatement contemporaine de l’essor de ces pratiques : elles datent de 18612032. Certains facteurs (la débilité, une hérédité chargée ou encore la féminité) prédisposent les individus au délire spirite, qui constitue par ailleurs une forme de subversion :

‘« Les délires de médiumnité émergent dans le contexte de subversion sociale de la fin du XIXe siècle répondant au mal-être général et à la quête d’une autre identité pour différentes parties de la société, mais aussi au milieu de la crise de croyance rationaliste qui voyait s’étendre un mysticisme ambiant dont le spiritisme représentait une branche »2033.’

On comprend mieux l’intérêt du légiste, soucieux de se mettre au service de la justice et de l’ordre. Il poursuit d’ailleurs ses investigations bien au-delà du seul cas des spirites, qui franchissent la frontière entre morts et vivants de manière encore bien virtuelle : tous ceux qui la violent, de manière bien tangible cette fois, retiennent ainsi l’attention d’Alexandre Lacassagne. On peut considérer comme tels les dépeceurs de cadavre, bien sûr, mais aussi, figure paradigmatique, les nécrophiles. Pour le docteur Lacassagne le dépeceur de cadavre, « comme sa victime, relève aussi du médecin légiste »2034, qui entend bien se livrer sur lui à une expertise approfondie :

‘« Au professeur Lacassagne et à l’École d’anthropologie lyonnaise, revient […] l’honneur d’avoir formulé des vœux énergiques pour que ce criminel soit soumis à un examen médical complet. Dans cet examen, le médecin ne doit pas simplement se contenter de rechercher si l’accusé est un véritable aliéné, un dément, dans toute l’acception du mot ; mais il doit aussi fouiller avec soin les antécédents héréditaires et personnels de l’inculpé, rechercher s’il existe chez lui des signes de dégénérescence physique et mental, apprécier son caractère particulier, son degré d’impulsivité, son tempérament, ses mœurs, enfin le milieu social où il a vécu »2035. ’

Le but ? Comprendre comme on en arrive là et comment on transgresse ce qui semble un tabou universel, tant il est vrai que « l’homme a toujours eu pour ses morts du respect et de la crainte »2036. Enfreindre cette loi, c’est donc se positionner hors de la sphère de l’humain, mais de même que l’embryologiste place les embryons difformes dans des bocaux de formol, de même le légiste veut faire entrer ces monstres moraux dans son champ d’étude. De la même manière, le nécrophile apparaît alors sous la plume des aliénistes. Il est symptomatique de relever qu’entre 1849, date à laquelle le terme « vampirisme » est mis en avant lors de l’affaire du sergent Bertrand, alors même que « contrairement à la légende, c’est ici un vivant qui dérange les morts »2037 et la première thèse sur le sujet, effectuée à l’instigation d’Alexandre Lacassagne en 19012038, plusieurs cas de ce genre soient documentés dans la littérature médicale. Sylvie Chaperon en isole deux, outre celui, fondateur, du sergent Bertrand : ceux d’Alexandre Siméon et de Victor Ardisson, surnommé « le vampire du Muy ». Alexandre Lacassagne les connaît, bien sûr. Il possède même un manuscrit autographe d’Ardisson2039. Mais il rassemble des informations sur d’autres cas, ceux d’un « vampire suisse »2040 et d’un « déterreur de cadavre »2041. Au total, quand Alexis Épaulard en fait un inventaire qui veut être exhaustif, ce sont quelques 23 observations, toutes masculines qu’il recense, les faits exposés concernant pour l’essentiel la seconde moitié du XIXe siècle2042. Les mots semblent manquer pour qualifier semblables crimes2043, en tout cas la terminologie médicale n’est pas toujours très claire. Il faut inventer le néologisme « nécrophilie » en 1852 pour rendre compte des profanations de cadavres motivées par l’instinct sexuel et établir une distinction entre cette pathologie nouvellement étudiée2044 et le vampirisme, qui recouvre « toutes les profanations de cadavre, quelle que soit leur raison première »2045. Mais dans les hésitations des médecins à définir cette perversion d’un genre nouveau, dans la confusion persistante entre nécrophilie, sadisme, cannibalisme et occultisme, Amandine Malivin y voit l’impossibilité même pour eux à penser un phénomène qui va bien trop loin dans le registre de la subversion. C’est sans doute la raison pour laquelle le regard médical se porte finalement sur le criminel plutôt que sur son acte qui, s’il demeure monstrueux, est plus efficacement relaté par le biais de la littérature que par celui d’un discours médical. Les médecins emboîtent à ce titre le pas aux juristes, dont la réflexion connaît alors de profondes mutations. Le XIXe siècle voit ainsi s’opérer un « basculement entre, d’une part, une justice d’Ancien Régime, objective, punissant des faits criminels dans un but essentiellement social d’exemplarité, […] et d’autre part, une justice subjective, punissant des individus…»2046. Mais le nécrophile du médecin n’est pas celui de l’écrivain [Fig.37]. Celui de Maupassant est un amoureux désespéré qui ne se résout pas à la perte de son amante, , « un jeune avocat de la ville, riche, bien vu, du nom de Courbataille »2047, « un beau garçon, grand, brun, avec un visage ouvert, des traits énergiques, un œil hardi » qui proclame son amour pour elle devant le tribunal qui doit le juger pour son « acte horrible de profanation » et se voit acquitté. On est loin des « dégénérés impulsifs ou débiles mentaux »2048 étudiés par le docteur Épaulard.

Fig.37.1  : Le vampire, in Mémoires de Monsieur Claude, chef de la police de sûreté sous le second Empire, 1881.
Fig.37.2  : Le nécrophile, in Martin Van Maele, La grande danse macabre des vifs, 1905.

La fin de siècle est donc marquée, à différents égards, par un trouble persistant de la frontière entre le mort et le vivant. Outre le pervers qui la transgresse de manière obscène, il existe bien d’autres manières de passer outre cette limite. La pratique mondaine du spiritisme, qui consiste dans l’établissement d’une communication avec l’au-delà en atteste. Sur le plan strictement médical, alors même que la thérapeutique n’en est encore qu’aux tous premiers balbutiements, le pouvoir médical demeurant encore bien en-deçà de la quasi-omnipotence qu’on lui connaît aujourd’hui, les praticiens tentent pourtant déjà de repousser les frontières de vivants en cherchant à ressusciter bêtes et suppliciés. Ce n’est alors pas tant la mort qui fait peur, que l’éventualité d’être enterré vivant : cette angoisse est emblématique de la mise en cause de la définition même de la mort. On ne s’accorde plus sur les signes qui la caractérisent, et il devient de plus en plus évident que seul un expert détient les clés nécessaires à son diagnostic. Du reste, la médecine légale fourbit alors ses procédures, et affirme son efficacité quand il s’agit de faire parler les cadavres, pour s’assurer d’un décès, de ses causes et de l’identité du mort. Plus largement, l’entrée de la médecine dans l’ère de l’expérience clinique bouleverse complètement « la grande équation du vivant et du mortel » puisque, désormais, « si paradoxal que cela puisse paraître, [la mort] éclaire la vie »2049. Sur la table d’autopsie, le cadavre parle en son nom, mais sur la table de dissection, « c’est la vérité intérieure de la maladie » qu’il proclame.

Notes
1954.

Charles-Édouard Brown-Séquard, op.cit., S.l.n.d. [BML FA 140754 pièce n°1]

1955.

Idem.

1956.

Dossier de pièces manuscrites sur cadavre, mort et crémation BML Ms5252 pièces n°17-21.

1957.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1892, p.42-50.

1958.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1892, p.47.

1959.

On songe ici aux travaux de l’historien Gérard Monnier (L’Art et ses institutions en France, de la Révolution à nos jours, Paris, Gallimard, 1995, 462 p.) ou des sociologues Pierre Bourdieu et Alain Darbel (L’Amour de l’art. Les musées européens et leurs publics, Paris, Minuit, 1966, 247 p.)

1960.

Citons notamment l’ouvrage de Dominique Poulot, Une histoire des musées de France (XVIIIe-XXe siècles), Paris, La Découverte, 2005, 197 p.

1961.

À ce sujet, voir l’article de Christiane Py et Cécile Vidart, « Les musées d’anatomie sur les champs de foire », in Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1985, vol.60, n°1, p.3-10.

1962.

Programme du grand Musée d’anatomie du docteur Groningue, 1875. Cité par Christiane Py et Cécile Vidart, op.cit., 1985, p.4.

1963.

Les musées de cire anatomiques ont fait l’objet de quelques études, davantage d’un point de vue artistique que scientifique, exception faite de l’article de Christiane Py et Cécile Vidart précédemment cité. Citons par exemple :

Michel Lemire, Artistes et mortels, Bayonne, Chabaud, 1990, 446 p.

L’âme au corps. Arts et sciences (1793-1993), Paris, Gallimard, 1993, 559 p. Voir notamment : Michel Lemire, « Fortunes et infortunes de l’anatomie et des préparations anatomiques, naturelles et artificielles », in op.cit., 1993, p.70-101.

1964.

On a notamment consulté parmi les plus récentes :

Sylvie Rivoire, Le musée d’anatomie de la Faculté de médecine de Lyon, Thèse de l’Université Claude Bernard-Lyon 1, 1991, 48 p.

Odile Berthou-Tremen, L’histoire du musée d’anatomie de l’École préparatoire de médecine et de pharmacie de Lyon, Lyon, 1999, 76 p.

1965.

Elizabeth Hallam,The Anatomy Museum. Death and the Body Displayed, Londres, Reaktion Books, 256 p. À paraître.

1966.

http://www.biomedicale.univ-paris5.fr/anat/rubrique8.html [Consulté le 10 septembre 2008]

1967.

Informations pratiques relevées sur le site du musée : http://museetl.univ-lyon1.fr/ [Consulté le 10 septembre 2008]

1968.

http://www.culture.lyon.fr/culture/sections/fr/musees__expositions [Consulté le 10 septembre 2008]

1969.

C’est notamment le cas du Musée des moulages, quasi contemporain du Musée d’Anatomie puisque créé en 1893 en même temps que l’Université Lyon 2, dédié à l’étude de la sculpture et des styles depuis la Grèce archaïque jusqu’au XIXe siècle.

1970.

« Le musée du laboratoire de médecine légale à Lyon », in Archives de l’anthropologie criminelle, 1890, p.365.

1971.

J.-V. Laborde, op.cit., p.255-256. Coupure conservée par Alexandre Lacassagne dans le dossier de pièces sur le cadavre [BML FA 140754 pièce n°3]

1972.

Idem.

1973.

Sur ce point, voir Anne Carol, « Les expériences médicales sur les suppliciés en France au XIXe siècle », in Régis Bertrand et Anne Carol (dir.), L’Exécution capitale. Une mort donnée en spectacle (XVIe-XXe siècles), Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2003, p.71-81.

1974.

J.-V. Laborde, op.cit., 1884, p.319. [BML FA 140754 pièce n°3]

1975.

Idem.

1976.

J.-V. Laborde, « MM. Vulpian et Paul Bert. La question des expériences sur les décapités à l’Institut », in La Tribune médicale, n°884, dimanche 26 juillet 1885, p.349-351. [BML FA 140754 pièce n°12]

1977.

Idem.

1978.

Alexandre Lacassagne, Peine de mort et criminalité. L’accroissement de la criminalité et l’application de la peine capitale, Paris, Maloine, 1908, 184 p. [BML FA 427611]

1979.

Ces coupures sont rassemblées dans le dossier de correspondances personnelles [BML FA Ms5174]. Elles sont adressées à Lacassagne par L’Argus de la Presse, « le plus ancien office de coupures de journaux [qui] lit, découpe et traduit tous les journaux du monde, en fournit les extraits sur n’importe quel sujet » si l’on en croit la publicité pour cette officine conservée dans ce même dossier.

1980.

Lacassagne renvoie ici au communiqué prononcé par le Dr Beaurieux devant la Société de médecine du Loiret, le 19 juillet 1905 : « Observation prise immédiatement après la décapitation », in Archives d’anthropologie criminelle, 1905, p.643-646.

1981.

Propos d’Alexandre Lacassagne rapportés dans un journal non identifié, le 20 avril 1908. [BML FA Ms5174]

1982.

«  C’est un travail de M. Lacassagne, le professeur légiste de la Faculté de Lyon, dont M. Laveran donnait communication », peut-on lire dans L’Intransigeant, le 19 février 1908. [BML FA Ms5174]

1983.

Dr Pinel, in Arnold Mortier, « Le guillotiné », in Le Gaulois, 17 janvier 1870.

1984.

Pour une mise au point sur ce débat, on renvoie essentiellement à l’article de Jean-Claude Farcy, « La peine de mort en France : Deux siècles pour une abolition (1791-1981) », in Criminocorpus.

En ligne :

http://www.criminocorpus.cnrs.fr/spip.php?article112&var_recherche=peine%20de%20mort [Consulté le 4 janvier 2009]

1985.

En décembre 1905 des députés socialistes déposent la Chambre des députés un amendement budgétaire tendant à la suppression des crédits au bourreau.

1986.

Le Bloc des gauches est formé en 1902, et les élections de 1906 voient la victoire des radicaux aux élections présidentielles et législatives, avec la formation en octobre 1906 d’un gouvernement dirigé par Georges Clemenceau.

1987.

On en dénombre au moins trois qui portent spécifiquement sur cette problématique :

Dr Orfila, Secours à donner aux personnes empoisonnées et asphyxiées, suivis des moyens propres à reconnaître les poisons et les vins frelatés, et à distinguer la mort réelle de la mort apparente, Paris, Béchet, 1825 (3e édition), 288 p. [BML FA 428058]

H. Chaussier, Manuel des Contre-Poisons, suivi des moyens de rappeler à la vie dans les cas de mort apparente, Paris, Roret, 1836 (4e édition), 348 p. [BML FA 806658]

J.V. Laborde, « Application de la méthode des Tractions rythmées de la langue. 14 cas de résurrection vitale », in Bulletin de l’Académie de médecine, n°33, 3e série, tome XLII, 1899, p.273-288. [BML FA 139305]

1988.

J.V. Laborde, op.cit., 1899, p.273. [BML FA 139305]

1989.

H. Chaussier, op.cit., 1836, p.254. [BML FA 806658]

1990.

M. d’Halluin, Résurrection du cœur, la vie du cœur isolé, le massage du cœur, Paris, Vigot, 1904, p.34.

1991.

Ces questions font l’objet d’une actualité de la recherche particulièrement importante. Signalons notamment la tenue d’une journée d’étude, le 13 juin 2008, sur « Les âmes errantes : pour une histoire sociale et culturelle des fantômes au XIXe siècle » au Centre de Recherches en histoire du XIXe siècle. Programme en ligne : http://crhxix.univ-paris1.fr/spip.php?article327 [Consulté le 6 janvier 2009]

Pour une mise au point historiographique sur ces questions, on renvoie à Guillaume Cuchet, « Le retour des esprits, ou la naissance du spiritisme sous le Second Empire », in Revue d’Histoire Moderne et Contemporaine, n°54-2, 2007, p.75.

Voir aussi la thèse de Guillaume Cuchet, Le crépuscule du purgatoire, Paris, Colin, 2005, 253 p.

1992.

Nicole Edelman a toutefois bien montré que le phénomène spiritiste qui émerge véritablement en France au début du Second Empire est largement préparé, en amon, par plus d’un demi-siècle de recherches magnétistes et spiritualistes. Sur ce point on renvoie donc à son ouvrage : Voyantes guérisseuses et visionnaires en France (1785-1914), Paris, Albin Michel, 1995, 280 p.

Pour des précisions d’ordre chronologique, voir aussi l’article de Guillaume Cuchet, op.cit.,2007, p.76-79.

1993.

On emprunte l’expression au philosophe Théodore Jouffroy dans son article célèbre, « Comment les dogmes finissent », Le Globe, du 24 mai 1825, repris dans ses Mélanges philosophiques, Paris, 1833, p.3-29. Cité par Guillaume Cuchet, op.cit., 2007, p.74.

1994.

Pascal Le Maléfan, Folie et spiritisme. Histoire du discours psychopathologique sur la pratique du spiritisme, ses abords et ses avatars (1850-1950), Paris, L’Harmattan, 1999, p.28.

1995.

Émile Littré, « Des tables parlantes et des esprits frappeurs », in Revue des Deux-Mondes, 1856, tome I, p. 847-872.

1996.

Citons, à titre d’exemple :

Camille Flammarion, Les habitants de l’autre monde. Révélations d’outre-tombe publiées par Camille Flammarion, communications dictées par coups frappés et par l’écriture médiumnique au salon Mont-Thabor, médium mademoiselle Huet, Paris, Ledoyen, 1862-1863, 2 vol.

Camille Flammarion, Des forces naturelles inconnues : à propos des phénomènes produits par les frères Davenport et par les médiums en général. Étude critique par Hermès, Paris, Didier, 1866, 152 p. L’ouvrage fait l’objet de deux rééditions, en 1907 et en 1917.

1997.

Cesare Lombroso, Studi sull' Ipnotismo. Con ricerche oftalmoscopico del Prof. Reymond e dei prof. Bianchi e Sommer sulla polarizzazione psichica, Turin, Bocca, 1887, 74 p. [BML FA 135836]

1998.

Allan Kardec, de son vrai nom Hippolyte Léon Denizard Rivail (1804-1869) est considéré comme le fondateur officiel de la doctrine spirite dont il a défini les principes dans Le livre des Esprits qui paraît pour la première fois en 1857 : « L’homme n’est pas seulement composé de matière, il y a en lui un principe pensant relié au corps physique qu’il quitte, comme on quitte un vêtement usagé, lorsque son incarnation présente est achevée. Une fois désincarnés, les morts peuvent communiquer avec les vivants, soit directement, soit par l’intermédiaire de médiums de manière visible ou invisible ».

1999.

Allan Kardec, Spiritisme expérimental : Le Livre des Médiums, ou Guide des médiums et des évocateurs, Paris, s.d. (37e édition), 506 p. [BML FA 429518]

2000.

Guillaume Cuchet, op.cit., 2007, p.83.

2001.

Préface de Camille Flammarion à Félix Fabart, Histoire philosophique et politique de l’occulte. magie, sorcellerie, spiritisme, Paris, Marpon et Flammarion, s.d., p.IX. BML FA 429121

2002.

On reprend ici le titre de l’article de Jean Gattefossé, « La collaboration scientifique avec l’invisible », in Bulletin de la Société d’Études Psychiques de Lyon, Année 1922, n°3 et 4, 8 p. BML FA 140982

2003.

Jean Gattefossé, op.cit., 1922, p.1. BML FA 140982

2004.

Anne-Sophie Chambon, Le spiritisme à Lyon : 1860-1920, Mémoire de maîtrise sous la direction de Régis Ladous, Université Jean Moulin Lyon III, 1989.

2005.

Guillaume Cuchet, op.cit., 2007, p.88.

2006.

Jean Gattefossé, op.cit., 1922. BML FA 140982

2007.

Catalogue…,op.cit., 1922, p.198. BML FA 141 946

2008.

Catalogue…,op.cit., 1922, p.115. BML FA 141 946 et Catalogue…,op.cit., 1922, p.197. BML FA 141 946. Respectivement on dénombre 49 entrées à la rubrique « Hypnose » et 17 à la rubrique « Somnambulisme ».

2009.

Catalogue…,op.cit., 1922, p.140. BML FA 141 946

2010.

On se permet d’additionner de la sorte ces références parce que l’ensemble des phénomènes évoqués sous les vocables de « spiritualisme américain », « spiritualisme moderne », « phénomènes magnétiques » ou « phénomènes des tables » relèvent de ce qu’on appelle à partir de 1857 (date à laquelle Allan Kardec invente le mot) le « spiritisme », si l’on en croit Guillaume Cuchet, op.cit., 2007, p.75.

2011.

11 articles traitent du sujet sur la période 1887-1912.

2012.

On relève deux articles consacrés au sujet, dont un mémoire original du docteur Gouzer en 1891 intitulé : « Action des courants telluriques, du magnétisme terrestre sur l’activité cérébrale », p.349-369.

2013.

Notamment : « Recension de l’ouvrage sur Le spiritisme dans ses rapports avec la folie, par le Dr Marcel Viollet », in Archives d’anthropologie criminelle, 1909, p.451.

L’ouvrage en question se trouve conservé dans la Réserve Lacassagne du fonds ancien de la bibliothèque universitaire de l’Université Claude Bernard-Lyon 1.

2014.

Guillaume Cuchet, op.cit., 2007, p.90.

2015.

Alexandre Lacassagne, « Crémation », Extrait du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, Paris, Masson, 1879, p.83.

2016.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1879, p.86.

2017.

Henri Barth, « Du sommeil non naturel », in Archives d’anthropologie criminelle, 1886, p.376.

2018.

Le docteur Barth lui-même emploie ce terme.

2019.

On sait également que les médecins tentent d’y recourir dans le cadre de la gestion de la douleur. C’est notamment le cas lors l’expérience que relate le docteur Mesmet lors d’un accouchement : « Accouchement et hypnotisme. Séance du 8 juillet 1887 à l’Académie de médecine », in Archives d’anthropologie criminelle, p.479-481.

2020.

Dans les Archives, quatre ouvrages ou articles sont recensés, qui traitent plus spécifiquement des rapports de l’hypnose avec le droit, et du problème concomitant de la responsabilité :

Albert Bonjean, L’hypnotisme, ses rapports avec le droit et la thérapeutique, la suggestion mentale, Paris, Alcan, 1890, 376 p. (Recension dans les Archives d’anthropologie criminelle, 1891, p.219).

Achille Apokenko, « L’état actuel de la question sur les crimes hypnotiques », in Revue de psychiatrie russe, janvier-mars 1897. (Recension dans les Archives d’anthropologie criminelle, 1897, p.705-707).

E.-F. Belline, L’hypnotisme, son importance en science, en droit et en jurisprudence. Leçons professées à la Faculté de droit de Kharkoff, Saint-Pétersbourg, 1898, 55 p. (Recension dans les Archives d’anthropologie criminelle, 1898, p.576-577).

Joseph Grasset, L’hypnotisme et la suggestion, Paris, Doin, 1903, 534 p. (Recension dans les paru dans Archives d’anthropologie criminelle, 1903, p.238-240).

2021.

Henri Barth, op.cit., 1886, p.377.

2022.

Samuel Garnier, « L’affaire F.Ch. Allégation d’un état d’hypnose concomitant des délits, responsabilité du prévenu », in Archives d’anthropologie criminelle, 1912, p.810.

2023.

Samuel Garnier, op.cit., 1912, p.814. 

2024.

« Recension de Achille Apokenko », in op.cit., 1897, p.705.

2025.

L’étude de tous les ouvrages sur la question nécessiterait de bien plus longs développements. On s’en est tenu à la lecture des ouvrages du fonds Lacassagne sur le sujet, et à celle des articles des Archives.

2026.

« Recension de Achille Apokenko », in op.cit., 1897, p.705.

2027.

« Recension de Achille Apokenko », in op.cit., 1897, p.706.

2028.

Préface de Camille Flammarion à Félix Fabart, op.cit., s.d., p.XVII. BML FA 429121

2029.

« L’hypnotisme en Belgique », coupure de presse non identifiée, sans date, conservée par Alexandre Lacassagne dans le dossier de pièces imprimées sur « Occultisme, Hypnotisme, Sorcellerie, Magie, etc. » [BML FA 140793]

2030.

Gabriel Tarde, « Recension de l’ouvrage sur Le Magnétisme animal, par J. Delbœuf (Alcan, 1899) », in Archives d’anthropologie criminelle, 1889, p.501.

2031.

Sur ce point, voir Nicole Edelman, op.cit., 1995, p.55-59.

2032.

Pascal Le Maléfan, op.cit., 1999, p.12.

C’est à Jules Baillarger qu’on les doit. « Son curieux et intéresant mémoire sur les hallucinations », qui éclaire « le fonctionnement cérébral dans cette période intercalaire entre la veille et le sommeil » (p.11) reçoit le prix Civrieux, accordé par l’Académie de Médecine, en 1861. Sur ce point, on renvoie à Dr Magnan, Eloge de M. Baillarger, Paris, Masson, 1902, 21 p. [BML FA 140031]

2033.

Pascal Le Maléfan, op.cit., Paris, L’Harmattan, 1999, p.21.

2034.

A. de Saint-Vincent de Parois, op.cit., 1902, p.3. [BML FA 135607]

2035.

Dr A. de Saint-Vincent de Parois, op.cit., 1902, p.3-4. [BML FA 135607]

2036.

Alexis Épaulard, Vampirisme, nécrophilie, nécrosadisme, nécrophagie, Lyon, Storck, 1901, p. 3-4. BML FA 135604

2037.

Sylvie Chaperon, op.cit., 2007, p.98.

2038.

Alexis Épaulard, op.cit., 1901, 102 p. [BML FA 135604]

2039.

Ces quelques lignes sont conservées dans le dossier de correspondances personnelles du fonds, dans une lettre du docteur Épaulard, le 29 novembre 1901 [BML Ms 5174].

2040.

« Un vampire suisse », s.d., journal non identifié. Coupure de presse conservée dans Lacassagne dans le dossier de pièces sur le cadavre [BML FA 140754 pièce n°17]

2041.

« Un déterreur de cadavres », journal non identifié, Lacassagne dans le dossier de pièces sur le cadavre. En bleu, de la main de Lacassagne : « nécrophilie ». [BML FA 140754 pièce n°14]

2042.

Exception faite de la première observation, « due à Hérodote », tous les autres cas se sont déroulés entre 1825 et 1901.

2043.

Sur le sujet, il faut mentionner :

Michel Dansel, Le sergent Bertrand : portrait d’un nécrophile heureux, Paris, Albin Michel, 1991, 247 p.

Lisa Downing, Desiring the dead. Necrophilia and nineteenth-century French literature, Oxford, Legenda, 2003, 146 p.

2044.

Si le premier cas de nécrophilie faisant l’objet d’une étude médicale date de 1849, la première thèse de médecine sur le sujet, sous la direction d’Alexandre Lacassagne, est soutenue par le Docteur Alexis Épaulard en 1901 :

2045.

Alexis Épaulard, op.cit., 1901, p.8. BML FA 135604

2046.

Laurence Guignard, « L’irresponsabilité pénale dans la première moitié du XIXe siècle, entre classicisme et défense sociale », in XXXIVe Congrès français de criminologie : Responsables, coupables, punis ? Fragments d’un interminable débat, Agen, septembre 2004.

Article en ligne : http://champpenal.revues.org/document368.html [Consulté le 10 janvier 2009]

2047.

Guy de Maupassant, « La tombe » (1887).

2048.

Alexis Épaulard, op.cit., 1901, p.7. BML FA 135604

2049.

Pierre Macherey, « De Canguilhem à Canguilhem en passant par Foucault », in GeorgesCanguilhem, philosophe et historien des sciences. Actes du colloque organisé par le Collège international de philosophie au Palais de la Découverte les 6-7-8 décembre 1990, Paris, Albin-Michel, 1993, p.286-294.