1. Folie innée : femmes et génies sous le regard psychiatrique

Pour expliquer l’origine des troubles mentaux, les médecins du temps distinguent deux grands types de facteurs. Il existe d’abord un certain nombre de pathologies psychiatriques innées, conséquences d’une faiblesse mentale naturelle chez les individus concernés.

À leur yeux, les facteurs héréditaires sont très importants pour expliquer l’aliénation mentale chez un individu : « chaque fois que nous avons été amenés à nous entretenir de l’étiologie d’une affection mentale, l’hérédité s’est présentée en première ligne »2086, souligne ainsi le docteur Legrand Du Saulle. Et « cette question de l’hérédité morbide est […] grosse de conséquences médico-légales »2087. Sans surprise donc, cet aspect de la folie retient particulièrement l’attention de Lacassagne2088. Les médecins du XIXe siècle ne semblent pourtant pas parvenir à s’entendre quant à l’évaluation précise du rôle de l’hérédité dans la décompensation d’une pathologie mentale : elle y entrerait dans des proportions allant « de 4 à 90 p.100 »2089 selon l’auteur convoqué. En dépit de ces disparités, la pertinence des facteurs héréditaires ne paraît alors pas contestable pour les psychiatres : « les faits héréditaires sont universellement admis dans le monde médical »2090. Il leur paraît donc essentiel de distinguer les « folies transmises » des « folies acquises », et ils recherchent les signes physiques qui permettent de distinguer très nettement l’une et l’autre. Le crâne est, bien sûr, le siège de malformations révélatrices2091, mais on reconnaît aussi les « héréditaires » à une multitude d’autres signes physiques.

‘« L’hérédité, en perpétuant dans l’espèce les maladies nerveuses, les transforme et les modifie, de façon à constituer toute une série de types morbides, véritable famille nosologique naturelle, dont les genres et les espèces présentent au milieu d’une apparente diversité symptomatique un ensemble de signes communs qui leur donnent une physionomie distincte, un air de famille, auquel il est facile de reconnaître leur parenté et leur commune origine »2092. ’

Une maladie psychiatrique héréditaire présenterait donc un certain nombre de signes caractéristiques qu’il s’agit de rechercher. Ce point fait débat, et l’opinion médicale à ce sujet évolue considérablement entre le milieu du XIXe siècle et le début du XXe. Le rôle de l’hérédité et la spécificité des pathologies qu’elle engendre fait ainsi l’objet d’une complète réévaluation au cours de la période. Dans sa thèse consacrée en 1912 aux psychoses familiales, définies comme les « maladies mentales similaires chez des individus d’une même famille »2093, Georges Demay précise que « il ne paraît pas exister de types familiaux de psychoses […]. Les psychoses que l’on rencontre dans certaines familles sont des plus variées et rien dans leur symptomatologie ou dans leur évolution ne permet de les différencier des psychoses qui atteignent les individus isolés »2094. C’est prendre nettement position contre les théories de la dégénérescence, pourtant très en vogue à l’époque, selon lesquelles il existe des individus que « Lacassagne appelle des “types attardés” [en vertu du principe selon lequel…] tous les individus n’ont pas bénéficié des siècles de progrès : les tares de leurs ascendants et leurs tares personnelles les en ont empêché »2095. Et ces individus en question présentent un certain nombre de caractéristiques physiques qui permettent de les identifier. La question de l’hérédité est donc essentielle à l’appréciation de l’état d’un malade mental. Le plan méthodique de l’expertise d’un aliéné dressé par Alexandre Lacassagne le dit assez : ce sont d’abord les « antécédents domestiques » du patient qu’il convient d’expertiser, en procédant à la recension des signes de défaillance psychique chez les père et mère de l’individu évalué, mais aussi de ses grands-parents paternels et maternels, de l’ensemble de ses oncles et tantes, cousins et cousines, frères et sœurs, ainsi que de ses enfants2096.

Mais au-delà même de la seule question de l’hérédité, la maladie mentale est « naturellement » plus courante chez certains individus pris en charge par les médecins aliénistes que chez d’autres. À ce titre, Lacassagne ne déroge pas aux présupposés de son temps et adhère donc à l’idée selon laquelle la gent féminine serait davantage exposée à ce genre de désagréments, du fait de sa plus grande sensibilité. La 2097 femme est « plus sensible physiquement et moralement que l’homme, toujours disposée par sa nature à obéir »2098 : ce principe permet de justifier sa mise en tutelle sur le plan social et politique en même temps qu’il sous-tend tout le discours médical à son sujet. La femme est vouée à obéir l’homme autant qu’à son sexe, compris au sens organique du terme. Cette idée fait alors figure d’axiome dans les rangs des praticiens. Pour le docteur Philippe Pinel, qui rédige l’article « Névrose » du Dictionnaire Panckoucke 2099, les maladies nerveuses organiques se développent nettement plus rapidement chez les femmes que chez les hommes. Incapables de maîtriser leurs passions et leurs sens, elles sont bien plus vulnérables que leurs homologues masculins, et donc plus nombreuses à être hospitalisées pour folie. Cette opinion souffre précocement des contestations, notamment celles du docteur Esquirol dans le même dictionnaire, mais il est vrai que, tout en affirmant que « sur un nombre très considérable d’aliénés […] la différence des hommes aux femmes est beaucoup moins considérable qu’on le croit communément »2100, il illustre son article sur la « Folie » de quatre gravures représentant les quatre grandes pathologies psychiques (mélancolie, fureur, idiotie et démence), et ce sont quatre visages de femme [Fig.38]. La femme reste donc bien une éternelle malade : « Les récentes découvertes psycho-physiologiques et biologiques auraient [ainsi] démontré l’incurable faiblesse mentale de la femme »2101.

Fig.38  : Visages de la folie, les quatre figures féminines illustrant l’article d’Esquirol dans le Dictionnaire Panckoucke (1816)

Dans le catalogue du fonds Lacassagne, alors que la rubrique « psychologie masculine » n’existe pas, les ouvrages référencés sous le thème « psychologie féminine » sont nombreux : 36 au total, auxquels il faut ajouter tout ce qui concerne le « féminisme »2102, dont il faut rappeler qu’il est d’abord défini comme une pathologie2103. D’ailleurs, la « psychologie féminine » est immédiatement considéré comme « criminelle, morbide, etc. », si l’on en croit l’intitulé de la rubrique en question2104. Yannick Ripa souligne la « progression effrayante » du nombre de démentes enfermées entre 1845 et 1871, laquelle « laisse à penser que toute femme est une folle en puissance »2105. Dans la seconde moitié du siècle, l’idée selon laquelle les femmes sont davantage susceptibles de perdre la raison que les hommes persiste, notamment du fait du succès pérenne et du renouvellement des recherches sur l’hystérie2106, pathologie féminine par excellence. En dépit du fait que la Pitié Salpêtrière accueille des hommes souffrant de cette pathologie dès 18832107, l’hystérie demeure une maladie essentiellement féminine2108, à moins qu’on ne précise explicitement le contraire. Ainsi par « hystérie en général » il faut bien comprendre « hystérie féminine » : pour une fois, l’universel est du côté du féminin. Il est vrai que, si toutes les femmes ne sont pas folles, ce qui est douteux2109, tout folie féminine est mâtinée d’hystérie2110. Si elle n’a rien d’une nouveauté dans le dernier tiers du XIXe siècle, cette entité morbide traditionnelle fait pourtant l’objet d’une réévaluation dans les années 1880, sous l’impulsion des travaux du docteur Charcot2111 qui rénove le diagnostic d’hystérie, l’asseyant sur une solide base positiviste ne permettant plus de dire que cette maladie est « la corbeille à papier de la médecine où l’on jette les symptômes inemployés »2112, et en raison d’une brusque augmentation du nombre de cas en cette fin de siècle2113. L’étiologie et la symptomatologie de l’hystérie s’affinent. Sur le plan nosologique, on la distingue désormais plus clairement d’autres troubles psychiques qui y étaient précédemment associés, à l’instar des cas de puérilisme, qui consiste en une « régression de la mentalité au stade de l’enfance »2114. Quoiqu’il reste convaincu que le sexe féminin est un sexe faible et malade, Alexandre Lacassagne est pourtant sensible à certains éléments de l’argumentaire féministe, qui s’exprime pleinement en cette fin de XIXe siècle, « par ce temps de féminisme »2115 pour reprendre ses propres termes. Il est vrai qu’à l’orée du XXe siècle, le Congrès international sur la condition et les droits des femmes se tient à Paris, suivi de près par la fondation du Congrès national des femmes françaises (1901) et de celle de l’Union française pour le suffrage des femmes (1909), les féministes disposant alors d’un journal quotidien puis mensuel, La Fronde 2116. En tout cas, il se documente largement sur la question2117, même si les ouvrages qu’il réunit par exemple sur « la condition féminine » sont loin d’être tous des ouvrages féministes2118. Les Archives d’anthropologie criminelle publient même, en 1910, à l’initiative d’Alexis Bertrand qui enseigne à l’Université de Lyon, la traduction du livre féministe de Henri-Corneille Agrippa de Nettesheym2119, un auteur du milieu du XVIe siècle, intitulé Grandeur et suprématie des femmes 2120 . Alexandre Lacassagne admet, même si c’est avec bien des nuances, que :

‘« Actuellement, la femme a démontré son aptitude à occuper des emplois2121, à exercer des fonctions auxquelles certes on ne la croyait pas destinée au commencement du siècle. Une élite, un très petit nombre a mis en évidence une certaine intelligence, mais surtout de la ténacité et de l’entêtement. […] Voilà ce qui a été constaté dans les milieux les plus élevés de la société. Des femmes docteurs, des femmes avocats2122 ou professeurs ! […]  Mais dans les examens, dans le contrôle des titres universitaires à acquérir, la mémoire joue un si grand rôle que l’on peut se demander si les nouvelles diplômées sont suffisamment armées pour les luttes de la vie, le travail scientifique continu, les recherches originales »2123. ’

Une telle évolution paraît-elle souhaitable à Alexandre Lacassagne ? On peut en douter dans la mesure où il souligne que « jusqu’ici les qualités de persévérance [désormais constatées chez les femmes] n’avaient pas paru être un don de la personnalité féminine, et cela a d’autant plus frappé qu’on a cru remarquer un affaiblissement, une diminution de ces mêmes qualités chez l’homme »2124. Tout se passe donc comme si l’affirmation de qualités supposées nouvelles chez la gent féminine se faisait au détriment des hommes. Et de toute façon, les femmes restent marquées du sceau de leur fonction majeure, de leur raison d’être : la maternité. Il ne semble pas contestable que « la législation distingue deux sexes […] elle sépare les individus en deux grandes classes auxquelles elle impose des devoirs et reconnaît des droits »2125. Certes, le caractère essentiel de ce rôle, reconnu comme tel par la grande majorité des praticiens, souffre quelques contestations. Le docteur Gaillaud s’insurge ainsi, reconnaissant que « la maternité est, sans contredit, une très lourde tâche, un très noble, un sublime devoir digne de tous les respects. Mais, tout de même, je ne vois pas qu’une femme ne soit qu’un utérus ; elle a aussi un cerveau et elle pourrait s’en servir »2126. Cette spécificité de la nature féminine est convoquée pour expliquer certains aspects de la personnalité des femmes :

‘« Une exquise sensibilité, l’instinct maternel, cet éternel dominateur, qui n’est pas seulement l’attachement pour les enfants mais aussi pour tous les produits qui émanent de son être : idées, actes ou sentiments, font de la femme une personnalité tout à tour émotive ou résignée, légère ou entêtée »2127.’

Il reste indéniable, pour Lacassagne comme pour l’ensemble du corps médical d’alors que « les femmes cèdent à des causes de folie qui sont propres à leur sexe »2128. La vie féminine est donc marquée par des moments de faiblesse qui retiennent particulièrement l’attention des médecins : la puberté et les menstruations, les grossesses, la vieillesse sont des moments de « la vie physiologique [des femmes particulièrement] propices à la folie »2129. Chacun de ces événements de la vie féminine est appréhendé du seul point de vue « génital ». Il ne saurait d’ailleurs en être autrement, puisqu’on admet que « tota mulier in utero » : le sexe féminin est partout dans la femme et la femme est tout entière comprise dans son sexe. La partie domine le tout. La femme est son utérus et à la différence de l'homme, son sexe pèse donc sur toute l’économie de son corps et de son psychisme. Par conséquent, « la menstruation qui joue un si grand rôle dans les maladies des femmes, ne peut être étrangère la production de l’aliénation mentale »2130, lit-on sous la plume d’Esquirol en 1816. Il en donne même une évaluation chiffrée : elle « entre pour un sixième parmi les causes physiques »2131 de la folie. Que les règles soient abondantes ou non, régulières ou désordonnées, importe peu puisque que la folie se déclare parfois quand « les menstrues se suppriment » et d’autres fois quand elles adviennent ; quand « elles offrent de grandes anomalies » ou même « sans le moindre désordre menstruel ». Il n’est pas une femme qui échappe à l’empire de son sexe :

‘« Que l’on ne s’étonne pas de rencontrer tant de femmes soumises à l’influence menstruelle. Elles ont toutes, à des degrés divers, un germe de prédisposition, n’auraient-elles que celui qu’elles tiennent de leur nature même et qui rend leur système nerveux beaucoup plus vulnérable que celui du sexe fort »2132. ’

Le docteur Icard étudie donc indifféremment aménorrhées, ménorrhagies et dysménorrhées comme autant de causes prédisposantes aux psychoses menstruelles. En fait, il semble qu’il n’y ait qu’une seule règle en la matière : les menstruations sont sources de désordres psychiques, quelle que soit la manière dont elles se déroulent. Cette idée ancienne persiste tout au long du siècle. En 1890, le docteur Séverin Icard écrit toujours que « la fonction menstruelle peut […] créer un état mental variant de la simple psychalgie, c’est-à-dire le simple malaise moral, la simple inquiétude de l’âme jusqu’à l’aliénation, à la perte complète de la raison, et modifiant la moralité des actes depuis la simple atténuation jusqu’à l’irresponsabilité absolue »2133. Ce phénomène doit d’ailleurs être rapproché de tous les autres qui sont retenus dans le discours médical comme des moments clés de la vie féminine. En effet, « la menstruation faisant partie de l’état puerpéral, mieux encore, constituant à elle seule un état puerpéral en petit, elle peut, au même titre que la grossesse, l’avortement, l’accouchement, la lactation, engendrer un état mental, et mérite en conséquence toute l’attention des juges »2134.

L’origine puerpérale des troubles mentaux est discutée. Cette théorie emporte l’adhésion des médecins jusqu’à la veille du XXe siècle, faisant l’objet de quelques adaptations pour suivre l’évolution de la doctrine psychiatrique. Ainsi, si l’on s’inquiète au début du siècle de la décompensation de monomanies par les femmes enceintes, c’est à leur perversion morale2135 qu’on s’intéresse plus particulièrement dans la seconde moitié du XIXe, et aux manies dont elles seraient plus particulièrement victimes (parmi lesquelles la kleptomanie). En 1866, le docteur Ribes peut ainsi encore écrire : « La grossesse peut produire un état dans lequel la femme perd la jouissance de sa raison et de sa volonté »2136, à tel point que « dans cet état, la femme ne doit pas être rendue responsable des actes commis sous son influence »2137. Mais cette théorie, plus ou moins évidente pour la plupart des aliénistes au début du siècle, même s’ils considèrent que c’est le « plus souvent après la couche et pendant l’allaitement »2138 que la folie éclate, cette théorie est battue en brèche à la veille de la Première Guerre mondiale :

‘« Il me semble impossible d’admettre que la puerpéralité et toutes les modifications maternelles qu’elle entraîne puisse donner naissance à telle ou telle psychose ; elles n’agiraient que comme adjuvants, que comme cause déterminante sur un terrain plus ou moins préparé »2139.’

Placée « devant la Science contemporaine », la femme n’est plus une éternelle malade. Jacques Lourbet, qui dédicace son ouvrage au docteur Lacassagne en 1896, entend poser « le problème des sexes sur le terrain scientifique, le seul solide, le seul qui permette [l’exercice de] la raison sereine, pure de tout sentimentalisme inopportun, de toute opinion préconçue »2140. Il donne quelques savoureuses précisions quant à sa méthode :

‘« Nous avons examiné en toute indépendance d’esprit les faits recueillis par l’homme lui-même et les conclusions qu’il en tire : cela nous a conduit logiquement à exclure du débat les arguments des femmes, quelles qu’en soient, du reste, la force et l’éloquence […dans] le vif souci de bannir de notre étude même l’ombre de la prévention »2141.’

En dépit de cette exclusion systématique de toute référence à une autorité féminine, immédiatement soupçonnée d’être partisane, et ce alors même qu’il admet que « la plupart des jugements de l’homme sur la femme dérivent plutôt de sourds instincts irréductibles que de la raison lumineuse et impersonnelle »2142, il conclut en faveur du sexe féminin :

‘« La science contemporaine ne peut, au nom d’aucun principe absolument établi, affirmer “l’incurable infirmité mentale” de la femme »2143. ’

Une mise en doute opportune des capacités explicatives de la science permet de l’affirmer. En raison de « l’impuissance radicale de mesurer actuellement la valeur de l’esprit », Jacques Lourbet conclut ironiquement :

‘« il faut décidément admirer l’assurance superbe des auteurs qui, “grâce aux études contemporaines sur le cerveau”, prétendent faire la démonstration scientifique, c’est-à-dire définitive de l’incurable infirmité intellectuelle de la femme »2144.’

Il est donc indéniable que l’évaluation de la psychologie féminine fait l’objet d’importantes évolutions dans la seconde moitié du XIXe siècle. Mais ce changement dans les discours ne doit pas laisser espérer de changements majeurs dans la conditions légale et politique des femmes. Car même si elle n’est pas essentiellement malade, la femme doit pourtant faire l’objet d’un traitement particulier quand elle comparaît en justice : « un magistrat éclairé disait qu’en toutes causes de femme, les tribunaux devraient s’assurer de l’assistance permanente d’un jury médical »2145. L’argumentaire médical reste défavorable à l’égalité entre les sexes. Le docteur Gaillaud conclut de son étude « qu’elle est différente et inégale par rapport à l’Homme »2146. Du reste, les médecins veulent bien admettre que cette inégalité n’est pas exclusivement naturelle. Pour le docteur Gaillaud :

‘« Les causes des différences et des inégalités tiennent :
1° À la génitalité, par ce fait qu’elle rend la femme plus émotive. L’émotivité joue un rôle considérable dans la cérébralité féminine (action sur le psychisme supérieur).
2° À l’Éducation, qui favorise les tendances naturelles de la génitalité et ne fait rien pour développer les facultés supérieures.
3° À l’Hérédité et à la Sélection naturelle : au lieu d’évoluer vers le progrès, la femme a stationné »2147.’

Convoquant les théories scientifiques les plus récentes, les savants de la seconde moitié du XIXe siècle s’expliquent la différence des sexes par l’action de l’évolution qui se révèle, bien sûr, défavorable aux femmes : « tandis que l’homme progressait sans cesse, tandis qu’il évoluait, la femme restait stationnaire, demeurait en arrière. Il acquérait, lui, des caractères nouveaux qu’il transmettait surtout à sa descendance mâle, tandis que la femme, n’acquérant rien, ne pouvait rien transmettre à ses filles2148. Ajoutez à cela l’accumulation sur elle pendant d’innombrables générations de ces caractères plutôt négatifs, et vous aurez une idée de la lourde charge héréditaire qu’il lui faut porter »2149. Si la féminité n’est plus synonyme de folie, elle est en revanche assimilable à un « type retardé » à l’hérédité chargée. Elle ne se situe pas au même niveau que la masculinité sur l’échelle de l’évolution, par conséquent :

‘« C’est se précipiter dans l’absurde [que de proclamer l’égalité des sexes car] en dehors des mathématiques il n’y a pas d’égalités, il n’y a que des équivalences. La femme n’est donc pas et ne sera jamais un exemplaire de l’homme mental : elle est nécessairement autre »2150. ’

Ainsi au moment où les médecins sont acculés à reconnaître que la folie n’est pas une seconde nature pour les femmes, il leur faut trouver de nouveaux arguments en faveur de l’absolue altérité de la gent féminine, qu’ils réaffirment avec force :

‘« La femme est tout autre que l’homme […], elle est un être à part, […] elle est un monde pour contenir un monde » 2151 .

L’inégalité est la conséquence inévitable de cette irréductibilité définitive du féminin au masculin. Pourtant, au tournant du siècle, ce principe fait l’objet de contestations qui, pour marginales qu’elles soient, n’en ont pas moins retenu l’attention de Lacassagne. Dans le dossier de pièces imprimées qu’il rassemble sur « Femmes et féminisme », on trouve ainsi notamment une coupure de presse qui argumente dans ce sens. Le docteur François Helme s’y attache essentiellement à souligner qu’hommes et femmes sont biologiquement semblables :

‘« Le grand argument dont on use contre la femme, c’est qu’elle est en tous points différente de l’homme. Pour autant que vous le pensez, répond la biologie, car la dissemblance est bien plutôt dans le genre de vie que dans la constitution physique »2152.’

Il reprend les théories développées par les embryologistes, selon lesquels la détermination du sexe d’un individu n’est pas initiale, mais n’intervient qu’après quelques temps de vie intra-utérine :

‘« Si, en effet, nous prenons le petit embryon d’où la nature va faire surgir son grand œuvre, l’être humain, qui résume la succession de tous les êtres, nous voyons que pendant les premiers mois, l’organisme en formation n’a pas de sexe. Comme hésitante, la nature se contente de dresser ses échafaudages, de préparer ses matériaux et de pourvoir à la division du travail pour le faire plus rapide et obtenir meilleur rendement. […] C’est seulement lorsque tout ce travail est en train qu’à la neuvième semaine la bonne Mère pense à l’espèce. Dans l’attente, elle s’était bornée à modeler une petite glande, jusqu’alors neutre et indifférente ; mais ayant décidé que l’enfant à naître sera fille, de cette glande elle fait un ovaire, et dès lors tout va changer. Ceci pour vous montrer d’abord que seul le sexe différencie des êtres par ailleurs rapprochés en tous points »2153 .

On le voit, la question de la santé mentale féminine est au cœur d’un faisceau de débats et d’argumentaires dont la vivacité dit bien l’importance. Là encore, le médecin est appelé à se prononcer dans l’intérêt de la société toute entière. À l’heure où les mouvements féministes montent au créneau pour obtenir la reconnaissance de droits politiques aux femmes, il paraît inenvisageable de se passer de ce blanc-seing préalable.

La seconde grande figure de fou par nature qui retient l’attention des médecins de la seconde moitié du XIXe siècle est celle du génie, qu’il soit écrivain, poète ou peintre. Le regard médical sur les artistes comme sur les produits de leur art gagne alors résolument en légitimité. Charcot a ainsi consacré deux ouvrages à la peinture : Les Démoniaques dans l’art 2154 et Les Difformes et les Malades dans l’art 2155 , qui sont le plus souvent relégués, à tort, « à une simple périphérie du développement clinique et théorique où se constituait l’entité centrale [de son] travail, l’entité-hystérie »2156. C’est pourtant à Charcot que revient « l’honneur d’avoir inauguré […] les premières études de critique médicale des œuvres d’art »2157, avec la publication de son étude des grandes scènes de possession démoniaque et de guérisons miraculeuses représentées en peinture qui constitue, selon Alfred Binet, la toute première étude de « médecine rétrospective »2158. Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette initiative fait école : « en un quinzaine d’années, Charcot et ses disciples auront produit un bon millier de pages de “critique médicale de l’art”, à travers l’analyse de deux cent cinquante œuvres environ »2159. Lacassagne s’intéresse quant à lui plus particulièrement aux écrivains. La « folie littéraire » est une pathologie spécifiquement recensée dans le catalogue de sa bibliothèque2160. Aux yeux des médecins de la fin du siècle, l’écrivain, le génie littéraire est bien souvent un grand malade. On connaît la caricature de Flaubert disséquant Mme Bovary [Fig.39].

Fig.39  : Flaubert disséquant Madame Bovary, par A. Lemot (1869)

Le dessinateur aurait sans doute pu croquer de même nombre de grands médecins du temps disséquant des écrivains, tant il est vrai que le génie littéraire est alors appréhendé comme une pathologie. Dostoievski2161, Conan Doyle2162, Alfred de Musset2163, Edgar Poë2164, Gérard de Nerval2165, Montaigne2166, Thomas de Quincey2167, Hoffmann2168, Sainte-Beuve2169, Maupassant2170 sont passés au crible du regard médical dans des thèses dirigées par Alexandre Lacassagne et conservées dans sa bibliothèque.

Si la médecine inspire à n’en pas douter les écrivains tant dans leurs thématiques que dans leurs méthodes, à l’instar d’Émile Zola qui défend « l’idée d’une littérature déterminée par la science »2171, la littérature fournit au corps médical des modèles, des sujets pour des études médico-psychologiques et des patients.  « On a discuté maintes fois sur la parenté morbide que plusieurs savants ont cru découvrir entre fous et hommes de génie » précise l’introduction de l’ouvrage explicitement intitulé Poésie et folie 2172, dont les auteurs ajoutent que « la psychologie du fou et celle du surhomme sont réductibles aux mêmes éléments »2173. Cette opinion semble très largement partagée. Si Lacassagne n’a personnellement rien écrit sur les pathologies liées au génie littéraire, au contraire de son alter ego italien Lombroso auquel on doit une étude sur L’homme de génie qui paraît en français en 1889, la question le passionne sans aucun doute : neuf ouvrages concernant la « Littérature dans ses rapports avec la Folie, La Névropathie, la Pathologie, etc. » sont référencés dans le catalogue de sa bibliothèque, auxquels faut ajouter les 26 références ayant trait à « Médecine et littérature », ainsi que des « mélanges médico-historico-littéraires » et les dix thèses portant sur divers « génies littéraires » produites sous sa direction. En la matière, c’est le docteur Edouard Toulouse2174, chef de clinique des maladies mentales de la Faculté de médecine de Paris, médecin de l’Asile Sainte-Anne, qui fait autorité : il cherche à faire une « œuvre uniquement scientifique »2175 en s’occupant « des personnalités intellectuelles comme de simples matières à observation, comme des faits rares qu’on devrait étudier minutieusement, sans prévention d’aucune sorte »2176, en leur appliquant toute une batterie de tests (depuis l’établissement de leurs antécédents familiaux jusqu’à un examen psychologique poussé en passant par un examen physique qui recourt à tous les trésors de mensurations caractéristiques de l’anthropologie physique). Au cours du siècle, c’est une véritable « pathologie de l’art » qui s’élabore progressivement2177. Entre Physiologie et hygiène des hommes livrés aux travaux de l’esprit de Réveillé-Parise2178 et Littérature et folie de Voivenel2179, la médecine du XIXe siècle s’est en effet emparée de la question esthétique. La fin du siècle en particulier, multiplie les analyses moralisantes, les mêlant à des considérations physiologiques, afin d’établir un lien entre folie et art, entre morbidité et écriture. Cesare Lombroso évoque ainsi la « psychose du génie » et la « pathologie de l’art »2180 : la norme esthétique devrait ainsi concorder avec la norme de la santé. Là où Réveillé-Parise se préoccupe de la santé des génies, Lombroso tente d’évaluer l’ampleur de leur folie par l’analyse de leurs œuvres. Le regard médical se déplace ainsi de la question de la santé individuelle de l’artiste à celle de la santé de son œuvre. En 1834, quand Réveillé-Parise s’intéresse à la santé de l’homme de génie, c’est pour souligner l’existence de causes prédisposantes à la maladie chez les personnes qui se livrent avec excès aux travaux de l’esprit. Que retient-il de ces individus2181 ?

‘« Une organisation délicate, mobile, singulièrement impressionnable, où le sentiment de la vie est presque toujours exalté, où les sympathies sont rapides, actives et multipliées ; un système nerveux maintenu dans un état permanent d’éréthisme par des stimulations extra-normales et profondément perturbatrices des appareils de la vie, enfin, une sorte d’intempérie nerveuse, et, […] une diathèse d’irritabilité dont le résultat est d’agiter, d’ébranler à chaque instant l’économie, d’en troubler les fonctions, d’en consumer vite et radicalement les forces »2182. ’

Difficile, dans ces conditions, de se maintenir en bonne santé. Ce médecin développe le cas de philosophes, de savants, d’artistes et d’écrivains, sans jamais porter de jugement : il prétend simplement énoncer un discours positif qui doit aider les hommes de génie à vivre mieux.

‘« Il convient […] d’établir une combinaison capable de maintenir la répartition la plus égale possible des forces, d’entretenir l’harmonie et la régularité des fonctions, d’écarter les nombreuses causes d’irritation qui, en ébranlant les constitutions éminemment sensibles, les prédisposent à de graves altérations »2183. ’

Il se pose en prescripteur objectif, fondant son analyse sur la base de l’équilibre des tempéraments, et s’appuyant sur des anecdotes de la vie des hommes d’esprit pour montrer que leur passion du travail les conduit à des excès et à une négligence du corps tout à fait préjudiciable à leur santé. Pour résoudre ces difficultés de santé particulières des hommes de génie, il définit ainsi un régime alimentaire2184, précise les soins de propreté auxquels il convient de se livrer2185, réglemente l’alternance de la veille et du sommeil2186, de l’exercice et du repos2187.

Jacques Moreau reprend le sujet en 1859. Dans sa Psychologie morbide 2188 , il s’attache à montrer que les génies et les aliénés ont une organisation mentale comparable. Folie, idiotie et génie sont autant d’états éloignés de la normalité, laquelle est définie comme une moyenne statistique. On relève la même organisation cérébrale des sujets dans les trois états, mais certains sont supérieurs, d’autre inférieurs. L’état normal, c’est la médiocrité. Le médecin intervient pour faire le constat d’un écart par rapport à la norme : c’est sur cette base qu’il diagnostique notamment « cette maladie mentale qu’on appelle génie »2189. On s’oriente alors vers l’idée d’une constitution anormale des génies. La frontière entre folie et génie se fait ténue. Il y a une « nature morbide » du génie puisque celui-ci, « la plus haute expression, le nec plus ultra de l’activité intellectuelle [est] une névrose »2190.

Lombroso s’inscrit dans la continuité de Moreau : ce dernier est « l’inventeur de la théorie du génie-névrose : c’est lui le Dieu et Lombroso est son prophète »2191. Il apporte toutefois un certain nombre de nuances significatives à cette théorie, « protest[ant] avec énergie contre cette opinion qui a voulu lui faire assimiler le génie à la folie »2192. Si l’on peut rapprocher le fou du génie, c’est parce qu’ils forment, avec le criminel, « une trilogie morale ayant la même source : ce sont tous les trois des êtres anormaux, des êtres différents du commun des hommes »2193. Il existe de nombreux points communs entre artistes et fous, notamment le développement d’un langage spécifique2194. Ce sont autant d’indices de l’anormalité qui permettent de conclure que « la création géniale peut être une forme de psychose dégénérative appartenant à la famille des épilepsies »2195. Il convient toutefois pour cet auteur de distinguer les artistes du passé, déclarés supérieurs, et les artistes contemporains, qui sont déconsidérés. Ces derniers sont des « mattoïdes », c’est-à-dire qu’ils ont toutes les apparences de la raison, mais qu’ils sont en fait dégénérés. Peut-on rêver figure plus inquiétante, et nécessitant plus incontestablement l’intervention d’un regard expert pour discerner l’indiscernable ?

Avec Max Nordau2196, on entre dans un dernier moment du discours psychiatrique sur le génie : la pathologie supposée de l’artiste est alors étendue à l’œuvre. Le médecin a donc son mot à dire en matière de critique artistique. Son intervention sur ce terrain se trouve légitimée. Nordau consacre la majeure partie de ses analyses à des artistes et des œuvres contemporains, et tranche sans appel : la plupart de ces courants artistiques trahissent incontestablement une dégénérescence de la race.

‘« Nous avons reconnu que les tendances et modes littéraires et artistiques “fin de siècle” […] sont l’effet de maladies, et nous avons pu établir que ces maladies sont la dégénérescence et l’hystérie »2197. ’

Pour prononcer un tel diagnostic, Nordau indique qu’il suffit « d’examiner soigneusement la personne physique des auteurs de tous les mouvements “fin de siècle” et leur arbre généalogique »2198, cette auscultation permettant de mettre en évidence les stigmates physiques révélateurs de la dégénérescence, « les difformités, les formations multiples et les arrêts de développement : en première ligne l’asymétrie, c’est-à-dire le développement inégal des deux moitiés du visage et du crâne ; puis les imperfections de l’oreille […] ; ensuite le strabisme, le bec-de-lièvre, les irrégularités dans la forme et la position des dents, la coupe ogivale ou plate de la voûte du palais, les doigts soudés ou surabondants… »2199. En sus de ces signes physiques, supposés trahir indubitablement les dégénérés, les arguments avancés par Nordau pour condamner les courants artistiques de son temps sont principalement moraux. Les artistes sont, globalement, des monstres, mais comme tous les monstres, ils sont voués à disparaître.

‘« Les dégénérés, les hystériques, les neurasthéniques ne sont pas capables d’adaptation. Ils sont pour cela destinés à disparaître. Ce qui les détruit inexorablement, c’est qu’ils ne savent pas transiger avec la réalité. Ils sont perdus »2200. ’

Il faut toutefois s’en préserver, les enfermer, voire les éliminer. Au terme de cette analyse du discours médical sur les artistes et leur production, on constate un progressif déplacement des critères de l’esthétique qui conduisent finalement le Beau à coïncider désormais avec le Moral. Or la morale c’est la santé : le médecin a donc son mot à dire en matière de critique d’art. Comme le souligne Didi-Huberman, Paul Richer en vient ainsi à s’autoriser des glissements de vocabulaire significatifs : « comme physiologiste et médecin, il constate certes des lois ; mais bientôt, comme professeur, il parlera de règles et ne tardera pas, comme académicien, à élaborer des canons »2201. Max Nordau défend ainsi résolument la pertinence de sa « méthode critique qui examine l’œuvre d’art d’après les principes de la psychologie et de la psychiatrie »2202. L’homme normal n’est alors plus une figure statistique, une moyenne mais véritablement une figure normative.

Mais si ces théories rapprochant le génie et la folie rencontrent un indéniable succès tout au long du XIXe siècle, elles n’en font pas moins l’objet d’une contestation en règle au début du suivant, contestation qui n’émane d’ailleurs pas des seuls rangs des artistes attaqués. En 1899, le docteur Régnard les condamne ainsi sans appel, au nom du positivisme :

‘« S’il était possible de concevoir un lien de parenté entre le génie et la folie, ce ne pourrait être qu’en se plaçant au point de vue de l’hypothèse spiritualiste. Rien de plus simple pour les fidèles qui donnent dans la chimère de l’âme immatérielle ; une pareille entité, vestige des rêves “préhistoriques”, serait susceptible de toutes les contradictions, le Dieu dont elle émane pouvant lui souffler, à son gré, le génie ou la folie »2203.’

Et il procède à un réexamen complet du cas de chacun des génies taxés de folie par Lombroso, parvenant à la conclusion que, dans la mesure où « sur 409 génies avérés, universellement reconnus comme tels, nous n’en trouvons que 11, soit 2,68 p.100, qui tombent sous le coup de la théorie de Moreau (de Tours) et de M. Lombroso, cette simple constatation suffit à la ruiner »2204. Peu après, Paul Voivenel entreprend quant à lui de réévaluer l’état mental des génies ainsi discrédités. Il s’en explique :

‘« … un jour nous lûmes le livre de Max Nordau : Dégénérescence.
Quelle angoisse !
Tout être supérieur est fou. Nos poètes sont fous ; nos prosateurs sont fous […] Fou ! Pascal qui, à treize ans, invente les mathématiques ; fou ! Rousseau, qui déclenche la Révolution française ; fou ! Auguste Comte, qui crée la philosophie positive ; fou ! Baudelaire ! fous, les artistes […]
Le génie est une névrose. Le Criminel né de Lombroso se dresse à côté du Dégénéré littéraire. »2205

Mais ses conclusions sont bien plus nuancées que celle de Régnard. C’est plus particulièrement le génie littéraire qui retient son attention, car il impute « à l’extrême développement de la zone du langage » le « déséquilibre cérébral des littérateurs » et « montre que folie et littérature se ressemblent et se complètent et qu’il existe des malades poètes comme il existe des poètes malades »2206. Par ailleurs, on peut proposer une toute autre interprétation de ce rapprochement de la folie et du génie. Ainsi, pour Alexandre Cullerre, si « la folie confirmée est le plus grand des malheurs […les] formes plus légères de déséquilibration mentale elles, ont dans bien des cas, une signification toute différente, à ce point qu’un petit grain de folie équivaut, pour certains esprits, aux meilleurs quartiers de noblesse et que l’on peut dire sans hyperbole que le jour où il n’y aura plus de demi-fous, le monde civilisé périra – non par excès de sagesse, mais par excès de médiocrité »2207. Finalement, entre ces deux formes d’altérité, la gent médicale préfère donc ne pas trancher.

Au travers de ces deux grandes figures de la folie innée : les femmes d’une part et les génies d’autre part, c’est tout un discours médical, et plus particulièrement psychiatrique, qui se fait jour, un discours dont la mécanique bien huilée est quasi-semblable. Pour les unes comme pour les autres, la naturalisation de la pathologie mentale conduit le corps médical à en rechercher des signes physiques révélateurs. C’est admettre une origine essentiellement, sinon exclusivement, organique de la folie : une pensée altérée est le produit d’un cerveau lésé. C’est aliéner définitivement femmes et génies à leur corps, et à un corps malade, puisque cette naturalisation va de pair avec une pathologisation de la féminité comme du génie en général, considérant que leur développement psychique y est intrinsèquement et définitivement lié. Car on ne saurait s’en affranchir, pas plus qu’il n’est possible de guérir de soi-même. Dans un cas comme dans l’autre, on est en présence d’individus marqués du sceau de la dégénérescence. C’est introduire entre eux et nous une irréductible fracture, un infranchissable fossé. De manière générale, cette altérité absolue, si elle peut servir l’artiste qui y voit confirmée son originalité, dessert nécessairement la femme, à laquelle elle interdit de trouver une place dans la communauté nationale, et notamment dans la sphère politique. Mais la distance tend pourtant à se réduire à la fin du XIXe siècle, dès lors que la spécificité du corps féminin souffre quelques contestations et que la folie artistique connaît une revalorisation, en même temps que la dimension acquise de ces particularités des unes et des autres commence à être admise.

Notes
2086.

Legrand Du Saulle, La folie héréditaire, Paris, Delahaye, 1873, p.1. BML FA 138793

2087.

J. Dejerine, « L’hérédité dans les maladies du système nerveux », in Archives d’anthropologie criminelle, 1887, p.175.

2088.

On dénombre deux références essentielles sur le sujet, qui constituent deux étapes importantes dans l’histoire de l’hérédité en psychiatrie :

Legrand Du Saulle, op.cit., 1873, 74 p. BML FA 138793

Valentin Magnan, Recherches sur les Centres nerveux. Alcoolisme. Folie héréditaire, Dégénérés, Paralysie générale, Médecine légale, Paris, Masson, 1893 (1e édition 1876), 572 p. [BML FA 427624]

2089.

Legrand Du Saulle, op.cit., 1873, p.4. BML FA 138793

2090.

J. Dejerine, op.cit., 1887, p.175.

2091.

Legrand Du Saulle, op.cit., 1873, p.33. BML FA 138793

2092.

Legrand Du Saulle, op.cit., 1873, p.74. BML FA 138793

2093.

Georges Demay, Des Psychoses familiales, Paris, Ollier-Henry, 1912, p.162. BML FA 138797

2094.

Georges Demay, op.cit., 1912, p.161. BML FA 138797

2095.

Paul Rebierre, op.cit., 1909, p.45. BML FA 428210

2096.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1892, p.68. BML FA 395160

2097.

On emploie ici à dessein, et de manière critique, le pronom défini, qui permet de mettre en avant l’univocité et la dimension essentialiste de ce discours médical fondé sur l’existence affirmée d’une supposée « nature féminine » qui ne souffre aucune contestation. Le concept de corps sexué, ainsi marqué du double le sceau de l’universel et de la permanence, est maintenu dans son statut de base ahistorique et non problématique, demeurant du domaine de l’impensé parce que jamais questionné. Une norme médicale de la féminité se trouve ainsi assénée de manière quasi-incontestable.

Pour une étude détaillée de la construction de savoirs scientifiques participant de l’entretien d’une bicatégorisation discriminante entre les sexes, on renvoie à Delphine Gardey & Ilana Löwy, op.cit., 2000, 227 p.

2098.

Georges Audiffrent, La femme, Paris, Blanchard, 1903, p.5. [BML FA 136198]

2099.

Philippe Pinel, « Névrose », in Dictionnaire des sciences médicales, Paris, Panckoucke, vol. 35 : Mus-Nev, 1819, p.557-587. [BML FA 306828 t.35]

2100.

Jean-Étienne Esquirol, « Folie », in Dictionnaire des sciences médicales, Paris, Panckoucke, vol. 16 : Fis-Fra, 1816, p.175. [BML FA 306828 t.16]

2101.

Jacques Lourbet, La femme devant la Science contemporaine, Paris, Alcan, 1896, p. V.[BML FA 429093]

2102.

Soit un total de 65 références.

2103.

« Aspect d’un individu mâle qui présente certains caractères secondaire du sexe féminin » selon le Grand Robert historique de la langue française.

2104.

Op.cit, 1922, p.176.BML FA 141946

2105.

Yannick Ripa, La ronde des folles : femme, folie et enfermement au XIXe siècle (1838-1870), Paris, Aubier, 1986, p.9.

2106.

Pour une histoire de cette pathologie mentale spécifique on renvoie à l’ouvrage de Nicole Edelman, Les métamorphoses de l’hystérique : du début du XIXe siècle à la Grande Guerre, Paris, La Découverte, 2003, 346 p.

2107.

À cette date, deux hommes sont hospitalisés pour hystérie dans le grand hôpital parisien selon Jan Goldstein, Consoler et classifier. L’essor de la psychiatrie française, Le Plessis-Robinson, Synthélabo, 1997, p.409.

2108.

Dans le fonds Lacassagne, on compte 46 ouvrages référencés comme ayant trait à l’« hystérie féminine et hystérie en général » contre seulement sept traitant plus spécifiquement de l’« hystérie masculine ».

2109.

Pour le docteur Icard, « elles sont nombreuses celles qui, à leur insu et sans que personne ne s’en doute, ont élu domicile aux frontières de la folie ». (Séverin Icard, La Femme pendant la période menstruelle. Psychologie morbide, Paris, Alcan, 1890, p.94. [BML FA 428767])

2110.

« Toutes leurs folies se compliquent d’hystérie » écrit ainsi Esquirol, op.cit., 1816, p.175. [BML FA 306828 t.16]

2111.

Alexandre Lacassagne connaît ses travaux. Il possède six ouvrages du médecin-chef de la Salpêtrière dont ses Leçons sur les Maladies du Système Nerveux recueillies par le Dr Bourneville (Paris, Delahaye, 1872-1873, 2 vol. [BML FA 429318]) et sa Clinique des Maladies du Système Nerveux (Paris, Vve Bagé, 1892-1893, 2 vol. [BML FA 428762]).

2112.

Cette comparaison humoristique est due au docteur Charles Lasègue. Elle est citée par son petit-fils Henri Cesbron dans sa thèse : Henri Cesbron, Histoire critique de l’hystérie, Paris, thèse de médecine, 1909, p.198. Cité par Goldstein, op.cit., 1997, p.412.

2113.

Sur ce point, voir Jan Goldstein, op.cit., 1997, p.412.

2114.

E. Dupré et Jean Tarrius, « Puérilisme mental chez une maniaque. Rapports du Puérilisme avec le Délire d’imagination », in L’Encéphale, n°7, juillet 1911, p.1. BML FA 138807

2115.

Préface d’Alexandre Lacassagne à Raymond de Ryckère, op.cit., 1902, p.IX.

2116.

Sur ce point voir Laurence Klejman et Florence Rochefort, L’Égalité en marche. Le féminisme sous la Troisième République, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques-Des Femmes, 1989, 359 p.

A-M. Käppeli, « Scènes féministes », in Geneviève Fraisse et Michelle Perrot (dir.), Histoire des femmes en Occident, Paris, Plon, 1991, tome 4, p.501-506.

2117.

Le fonds contient un certain nombre d’ouvrages relatifs à la condition féminine, notamment :

M.A. Aubert, La condition légale de la femme, Bastia, Imprimerie Ollagnier, 1899, 46 p. BML FA 136211

Albert Damez, Le libre salaire de la femme mariée et le mouvement féministe, Paris, Librairie Arthur Rousseau, 1905, 486 p. [BML FA 136214]

Jean Marquet, La condition légale de la femme au commencement et à la fin du XIXe siècle, Nîmes, Imprimerie Clavel et Chastanier, 1899, 39 p. BML FA 136212

Joseph Rive, De la condition civile de la femme dans le droit moderne, Paris, L.Larose, 1900, 182 p. BML FA 136216

M. Vaudrus, Le droit de la femme mariée sur le produit de son travail, Caen, Imprimerie E. Lanier, 1900, 41 p. BML FA 136213

2118.

Nous n’en donnerons qu’un exemple. Dans sa thèse, Albert Damez repousse fermement l’éventualité de l’éligibilité des femmes, affirmant que « leurs droits politiques sont difficilement conciliables avec les charges spéciales qui découlent pour elles du mariage et de la maternité »(p.88). Il précise qu’il ne faut pas supprimer l’incapacité légale de la femme mariée, mais la transformer : « l’absence complète de subordination de la femme au mari, l’idée d’égalité absolue entre époux et de séparation de leurs fortunes et de leurs intérêts doit être repoussée, d’abord parce que peu de gens en France la réclament, qu’elle est contraire aux traditions de notre race et à nos mœurs, en outre parce qu’elle est contraire à une organisation normale de la famille, qui doit, comme toute société quine veut pas nécessairement tomber dans l’anarchie, avoir un chef » (p.97).

2119.

Ce texte fait toutefois l’objet d’interprétations diverses. Certains considèrent en effet que l’auteur y défend un « féminisme » savant et spiritualiste. C’est la perspective récemment adoptée par Roland Antonioli, Charles Béné et Odette Sauvage qui l’ont récemment réédité (Henri Corneille Agrippa, De nobilitate et praecellentia fœmini sexus, éd. et trad. R. Antonioli, Ch. Béné et O. Sauvage, Droz, 1990, 133 p.).

D’autres au contraire sont plus sensibles à la dimension « paradoxale » et aux ambivalences du texte, à l’instar de Albert Rabil qui en livre une traduction anglaise : Henricus Cornelius Agrippa, Declamation on the Nobility and Preeminence of the Female Sex, ed. and trans. Albert Rabil, University of Chicago Press, 1996, 109 p.

Sur l’imbrication au XVIe siècle de l’argumentation « féministe » (défense des femmes contre leurs détracteurs) et des dispositifs paradoxaux, on renvoie à la lecture de Anne R. Larsen, « Paradox and the praise of women : From Ortensio Lando and Charles Estienne to Marie de Romieu », in Sixteenth century journal, 28:33, 1997, p.759-774.

2120.

Alexis Bertrand, « Grandeur et suprématie des femmes, manifeste féministe d’Henri-Corneille Agrippa de Nettesheym (analyse et traduction) », in Archives d’anthropologie criminelle, 1910, p.112-146.

2121.

Les Républicains ont en effet voulu affranchir les femmes de la bourgeoisie de la tutelle de l’Église, notamment grâce à un enseignement secondaire laïc pour jeunes filles (loi Camille Sée du 21 décembre 1881), mais ils l’ont souhaité nettement distinct de l’ensiegnement masculin et ont limité ses débouchés professionnels, jugés secondaires, les perspectives d’avenir pour une femme, surtout dans les milieux aisés, restant le mariage et la maternité. Les jeunes femmes font donc progressivement leur entrée sur la scène professionnelle, d’abord dans le professorat, puis plus difficilement dans les sciences et la médecine, l’administration, et le barreau.

2122.

Les femmes exerçant cette profession ont particulièrement retenu l’attention de Alexandre Lacassagne. Il faut dire que l’arrivée de femmes au barreau n’a rien d’une évidence au tournant du XXe siècle : en 1900 il faut en passer par un vote de la Chambre des députés pour autoriser la prestation de serment des deux premières femmes avocates ! Dans le fonds Lacassagne, on relève quelques indices de la vivacité de ces débats, notamment :

M. Viallefont, De la femme-avocat. Discours prononcé lors de l’audience solennelle de rentrée (17 octobre 1898), Cour d’appel d’Agen, Agen, Imprimerie Veuve L. Amade & Fils, 1898, 49 p. BML FA 136209

M. Binos, La femme au barreau. Discours prononcé lors de l’audience solennelle de rentrée (16 octobre 1900), Cour d’appel de Limoges, Limoges, Vve H. Ducourtieux, 1900, 40 p. BML FA 136210

2123.

Préface d’Alexandre Lacassagne à Raymond de Ryckère, op.cit., 1902, p.IX-X.

2124.

Idem.

2125.

Alexandre Lacassagne, notes manuscrites. [BML FA 5172]

2126.

Eucher Gaillaud, Essai sur la cérébralité féminine, Bordeaux, Imprimerie commerciale et industrielle, 1905, p.90. BML FA 136206

2127.

Préface d’Alexandre Lacassagne à Raymond de Ryckère, op.cit., 1902,  p.XI.

2128.

Esquirol, op.cit., 1816, p.175. [BML FA 306828 t.16]

2129.

Yannick Ripa, op.cit., 1986, p.62.

2130.

Esquirol, op.cit., 1816, p.191. [BML FA 306828 t.16]

2131.

Idem.

2132.

Séverin Icard, Séverin Icard, op.cit., 1890, p.94. [BML FA 428767]

2133.

Séverin Icard, op.cit., 1890, p.X. [BML FA 428767]

2134.

Séverin Icard, op.cit., 1890, p.270. [BML FA 428767]

2135.

Jean-Eugène Ribes, De la perversion morale chez les femmes enceintes considérée comme principalement au point de vue médico-légal, Strasbourg, Impr. E. Simon, 1866, 31 p. BML FA 136218

2136.

Jean-Eugène Ribes, op.cit., 1866, p.10. BML FA 136218

2137.

Jean-Eugène Ribes, op.cit., 1866, p.27. BML FA 136218

2138.

Jean-Étienne Esquirol, op.cit., 1816, p.192. [BML FA 306828 t.16]

2139.

André Boutet, « Contribution clinique à l’étude des troubles mentaux d’origine puerpérale », in Archives d’anthropologie criminelle, 1914, p.142.

2140.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p. V.[BML FA 429093]

2141.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p. VI.[BML FA 429093]

2142.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p.169.[BML FA 429093]

2143.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p. 168.[BML FA 429093]

2144.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p. 64-65.[BML FA 429093]

2145.

Séverin Icard, op.cit., 1890, p.270. [BML FA 428767]

2146.

Eucher Gaillaud, op.cit., 1905, p.15. BML FA 136206

2147.

Eucher Gaillaud, op.cit., 1905, p.95. BML FA 136206

2148.

En conformité avec la loi énoncée par Darwin (La descendance de l’homme, tome II, chapitre XIX) selon laquelle « les caractères du mâle peuvent se transmettre aux descendants mâles seuls, de même que ceux de la femme à sa descendance féminine seule » (Cité par Eucher Gaillaud, op.cit., 1905, p.86. BML FA 136206)

2149.

Eucher Gaillaud, op.cit., 1905, p.88-89. BML FA 136206

2150.

Jacques Lourbet, op.cit., 1896, p. 170.[BML FA 429093] C’est moi qui souligne.

2151.

Georges Audiffrent, op.cit., 1903, p.34. [BML FA 136198]

2152.

François Helme, « Un peu de médecine et de biologie à propos du vote des femmes », in Le Temps, 12 mai 1918. Dossier de pièces imprimées sur Femmes et féminisme [BML FA 140775]

2153.

C’est moi qui souligne.

2154.

J.-M. Charcot et Paul Richer, Les Démoniaques dans l’art, Paris, Delahaye et Lecrosnier, 1887, XII-116 p.

2155.

J.-M. Charcot et Paul Richer, Les Difformes et les Malades dans l’art, Paris, Lecrosnier et Babé, 1889, VI-162 p.

2156.

Georges Didi-Huberman, « Postface. Charcot, l’histoire et l’art », in Les Démoniaques dans l’art, Paris, Macula, 1984, p.125.

2157.

« L’œuvre médico-artistique de la Nouvelle iconographie de la Salpêtrière », in Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière, t.XVI, 1903, p.413.

2158.

Alfred Binet, « Compte rendu du libre de Charcot et Richer, Les Démoniaques dans l’art », in Revue philosophique, t.XXIII,1887, p.538.

2159.

Georges Didi-Huberman, op.cit., 1984, p.126.

2160.

Il compte deux références sur la question :

L.-F. Calmeil, De la Folie, sous le point de vue pathologique philosophique, historique et littéraire... Description des grandes épidémies de délire qui ont atteint les populations ou régné dans les monastères : condamnations auxquelles la folie méconnue a donné lieu, Paris, Baillière, 1845, 2 vol. : 534 p. + 522 p [BML FA 428940]

L. Greil, Les fous littéraires du Quercy : études biographiques, Cahors, 1886, 70 p. [BML FA 429520]

Il convient d’y ajouter tout ce qui concerne « littérature et folie » (soit 9 références) et les ouvrages indexés à la rubrique « génie » (12 références)

2161.

Pierre-Gaston Loygue, Étude médico-psychologique sur Dostoievski : considérations sur les états morbides liés au génie, Lyon Storck, 1903, 185 p. BML FA 135629

2162.

Jean-Henri Bercher, Étude médico-légale de l’œuvre de Conan Doyle et la police scientifique au XXe siècle, Lyon, Storck, 1906, 89 p. BML FA 135674

2163.

Raoul Odinot, Étude médico-psychologique sur Alfred de Musset, Lyon, Storck, 1906, IV-197 p. BML FA 135672

2164.

Georges Petit, Étude sur Edgar Poë, Lyon, Storck, 1906, 99 p.  BML FA 135652

2165.

Gaston Barbier, Étude médico-psychologique sur Gérard de Nerval, Lyon, Rey, 1907, 167 p. BML FA 135688

2166.

Raymond Delacroix, Montaigne malade et Médecin, Lyon, Rey, 1907, 112 p. BML FA 135689

2167.

Paul Guerrier, Étude médico-psychologique sur Thomas de Quincey, Lyon, Rey, 1907, 143 p. BML FA 135691

2168.

Marcel Demerliac, Étude médico-psychologique sur Hoffmann, Lyon, Rey, 1908, 135 p. BML FA 135700

2169.

Francis Voizard, Sainte-Beuve, l’homme et l’œuvre : étude médico-psychologique, Lyon, Rey, 1911, XI-108 p. BML FA 135739

2170.

R. Holier, LaPeur. État qui s’y rattachent dans l’œuvre de Maupassant, Lyon, Impr. réunies, 1912, 94 p. BML FA 135750

2171.

Émile Zola, Le roman expérimental1890, Paris, Flammarion, 2006, p.47. Sur ce point voir Jacqueline Carroy, « “Mon cerveau est comme dans un crâne de verre” : Émile Zola sujet d’Édouard Toulouse », in Revue d’histoire du XIXe siècle, 20/21, 2000, p.181-202.

2172.

Antheaume et Dromard, Poésie et folie, Paris, Doin, 1908, p.V. [BML FA 429158]

2173.

Idem.

2174.

Edouard Toulouse, Enquête médico-psychologique sur les rapports de la supériorité intellectuelle avec la névropathie. Introduction générale : Emile Zola, Paris, Société d’Éditions scientifiques, 1896, 282 p. [BML FA 428692]

2175.

Edouard Toulouse, op.cit., 1896, p.IX. [BML FA 428692]

2176.

Idem.

2177.

À ce sujet, on renvoie aux travaux de recherche en cours de Julie Cheminaud, qui prépare actuellement sa thèse d’esthétique intitulée: « La transfiguration artistique du quotidien. Naissance de la modernité dans la seconde moitié du XIXe siècle » sous la direction de Jacqueline Lichtenstein à l’Université Paris IV. Je voudrais ici la remercier pour les échanges féconds amorcés lors du Post Graduate Day 2008 organisé par la Société des Dix-Neuviémistes (SDN) à Université de Londres, sur le thème : « Sickness and health » (20-21 septembre 2008). Actes à paraître.

2178.

J.H. Réveillé-Parise, Physiologie et hygiène des hommes livrés aux travaux de l’espritRecherches sur le physique, le moral, les habitudes, les maladies et le régime des gens de lettres, artistes, savants, etc., Paris, Dentu, 1834, 2 vol. : 299 p. + 431 p. [BML FA 429309]

2179.

Paul Voivenel, Littérature et folie. Étude psycho-pathologique du génie littéraire, Toulouse, Gimet-Pisseau, 1908, 560  p. [BML FA 135065]

Le docteur Voivenel adresse cet ouvrage, sa thèse, à Lacassagne avec ces mots : « Vos travaux on développé les meileurs parmi mes enthousiasmes. La méthode médico-psychologique vous appartient et je vous prie de ne voir dans l’envoi de ma thèse que l’hommage d’un esprit reconnaissant » (Courrier manuscrit du 11 mai 1908, Toulouse, glissé dans Paul Voivenel, op.cit., 1908. BML FA 135065

Ce travail a fait l’objet d’une étude détaillée à laquelle on renvoie : Cécile Lestrade, Un médecin et son époque : vie et œuvre du docteur Paul Voivenel (1880-1975), Thèse de médecine, Toulouse, 1998, 115 p.

2180.

Cesare Lombroso, L’homme de génie, Paris, Carré, 1896, XXVI-499 p. [BML FA 371624]

2181.

Il consacre tout un chapitre aux « différences et variétés organiques qu présente cette constitution » particulière des gens d’esprit. Voir J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.1, chapitre XI, p.134-161. [BML FA 429309]

2182.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.4-5. [BML FA 429309]

2183.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.124-125. [BML FA 429309]

2184.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.216-230.

2185.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.231-236.

2186.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.236-244.

2187.

J.H. Réveillé-Parise, op.cit., 1834, vol.2, p.245-258.

2188.

Jacques Moreau, La psychologie morbide dans ses rapports avec la philosophie de l'histoire, ou De l'influence des névropathies sur le dynamisme intellectuel, Paris, Masson, 1859, XIII-576 p.

2189.

Jacques Moreau, op.cit., 1859, p.7.

2190.

Cité par A. Regnard, Génie et folie. Réfutation d’un paradoxe, Paris, Doin, 1899, p.1. BML FA 428405

2191.

A. Regnard, op.cit., 1899, p.43. BML FA 428405

2192.

« Compte rendu de l’ouvrage de Cesare Lombroso, L’homme de génie », in Archives d’anthropologie criminelle, 1890 p.538.

2193.

Idem.

2194.

De même, les criminels ont leur argot.

2195.

Cesare Lombroso, L’homme de génie, Paris, Carré, 1896, 486 p. [BML FA 371624]

2196.

Max Nordau, Dégénérescence, Paris, Félix Alcan, 1899 (1e édition 1894), 2 vol. : 429 p. + 575 p. BML FA 434621

2197.

Max Nordau, op.cit., 1899, vol.1, p.62. BML FA 434621

2198.

Max Nordau, op.cit., 1899, vol.1, p.34. BML FA 434621

2199.

Max Nordau, op.cit., 1899, vol.1, p.33. BML FA 434621

2200.

Max Nordau, op.cit., 1899, vol.2, p.530. BML FA 434621

2201.

Georges Didi-Huberman, « Postface…», in op.cit., 1984, p.125.

2202.

Max Nordau, op.cit., 1899, vol.2, p.551. BML FA 434621

2203.

A. Regnard, op.cit., 1899, p.4. BML FA 428405

2204.

A. Regnard, op.cit., 1899, p.104. BML FA 428405

2205.

Paul Voivenel, op.cit., 1908, p.3. [BML FA 135065]

2206.

Paul Voivenel, op.cit., 1908, p.542. [BML FA 135065]

2207.

Alexandre Cullerre, Les frontières de la folie, Paris, Baillière, 1888, p.23. BML FA 390820