1. Une généalogie lombrosienne ?

Notre réflexion commence par un retour sur l’anthropologie criminelle telle qu’elle s’élabore dans la seconde moitié du XIXe siècle, afin d’en cerner les inflexions majeures pour notre période. Ce n’est qu’une des branches de la discipline anthropologique, mais on choisit dans un premier temps de s’y cantonner parce que le criminel est une de ces figures emblématiques de l’altérité sur lesquels le discours médical est particulièrement prolixe alors. On élargira ensuite cette perspective, préférant envisager une « anthropologie de la déviance » plutôt qu’une anthropologie exclusivement criminelle. Ce faisant, on prend acte du travail effectué par Marc Renneville2575 et de ses limites. Lui-même invite d’ailleurs, dans la conclusion de sa thèse, à élargir la réflexion à toutes les formes de déviances qui ont subi une médicalisation partielle ou totale au XIXe siècle, pour envisager une mise en rapport entre médecine et norme qui dépasse l’application à la criminalité, et à y ajouter notamment « des considérations sur la prostitution, l’enfance délinquante, l’alcoolisme, le vagabondage, le suicide, les perversions sexuelles »2576, conformément à l’inventaire dressés au début des années 1980 par Peter Conrad et Joseph W. Schneider2577. Les conceptions de Lacassagne sur la déviance y invitent d’ailleurs également puisque ce dernier considère que la criminalité est à mettre en lien avec le suicide et la prostitution, ces deux derniers comportements étant en fait des « dérivatifs » du premier2578.

Soulignons d’abord que l’historiographie contemporaine induit le plus souvent une focalisation du regard sur la seule criminologie de la Belle Époque, tendant à faire oublier l’important héritage avec lequel composent les savants qui s’attellent à l’étude du phénomène criminel en cette fin de siècle. C’est la raison pour laquelle on veut dans un premier temps élargir l’étendue chronologique de notre étude. Pour notre période, l’anthropologie criminelle est dominée par une double figure tutélaire : celle de Cesare Lombroso (1835-1909) d’une part, et celle d’Alexandre Lacassagne d’autre part. Entre les deux hommes, il y a, d’abord, une différence de presque une génération. Mais ça n’est pas tout. Lacassagne entretient avec le professeur de Turin des relations ambivalentes. On sait qu’il se considère dans un premier temps comme un de ses disciples2579. On sait également que les deux hommes entretiennent une correspondance, plus ou moins régulière au fil des années, dont seuls quelques courriers assez anecdotiques sont conservés dans le fonds de la Bibliothèque municipale de Lyon. Il est très probable que le classement de la masse documentaire encore actuellement entreposée à Villerest permettrait de compléter largement ce premier ensemble. Quoi qu’il en soit, on constate que, dans les courriers que Lombroso adresse à Lacassagne, le professeur de Turin s’adresse à lui en « ami »2580 ou en « collègue »2581, en français ou en italien. Le ton de ces lettres est assez familier, les missives, généralement courtes, ne s’embarrassant guère de formules de politesse. L’allusion régulière aux familles de l’un ou l’autre dans les salutations laisse deviner une intimité relative des deux hommes. Lombroso adresse ainsi « mille salutations » à la fille de Lacassagne. Mais l’essentiel du contenu de ces courriers est professionnel : les confrères s’envoient leurs publications. En décembre 1900, Lombroso écrit ainsi à Lacassagne en ces termes :

‘« Je vous envoie un exemplaire de mon Crime 2582 où je tente de saisir les causes du crime pour le combattre ; je le recommande à votre critique, et comme souvenir des beaux jours passés ensemble »2583.’

Les deux hommes se connaissent donc personnellement, ils se sont fréquentés un temps sans qu’on puisse préciser exactement à quand remonte cette rencontre, et ils continuent de le faire dans un cadre professionnel, notamment lors de la tenue de congrès internationaux [Fig.55].

Fig.55 : Les membres du Congrès de l’Association française pour l’avancement des sciences, août 1906. [BML FA Ms5216].

On reconnaît, au premier rang et au centre Cesare Lombroso.
Derrière lui, troisième en partant de la gauche, coiffé d’un canotier, Alexandre Lacassagne.

En dépit des controverses, et de l’opposition radicale qu’on a parfois voulu voir entre les deux hommes, on peut dire qu’ils tiennent leurs travaux respectifs en estime. En 1907, lorsque paraît la seconde édition du Crime, Edmond Locard, un fidèle de Lacassagne, écrit ainsi dans les Archives d’anthropologie criminelle que « …les idées turinoises en matière de criminologie […] ne manquent jamais d’intérêt »2584. Sans doute exprime-t-il ainsi les idées du maître. On est loin de l’affrontement systématique qui est parfois dépeint entre l’école anthropologique italienne, la « réduction biologiste pratiquée par les positivistes italiens »2585, et l’école dite « française », voire « lyonnaise », à dominante sociologique. Martine Kaluszynski défend pourtant cette position dans sa thèse2586, considérant le criminologue lyonnais comme un ferme opposant aux théories de Lombroso2587. À sa décharge, il faut préciser que cette position est fermement revendiquée par certains de ses disciples. Jean Massenet, qui soutient sa thèse de médecine sous la direction de Lacassagne, écrit ainsi :

‘« L’Italie et la France se partagèrent [sur la question de la criminogenèse] et tandis que l’École italienne étudiait l’homme pour demander tout à la biologie, l’École française se mit à l’étude du milieu social »2588. ’

Une telle vision des choses repose pourtant sur une conception caricaturale des positions de l’un comme de l’autre. Si le professeur de Turin accorde un rôle essentiel à l’hérédité et à l’atavisme pour expliquer le phénomène criminel, et plus généralement la déviance2589, il ne faut cependant pas limiter sa théorie à un pur déterminisme biologique. Sa vision est, en fait, multifactorielle. Certes, dans un premier temps, il s’en tient à la théorie du « criminel-né » fondée sur des observations strictement anatomiques, mais sa pensée évolue : il y a loin entre L’Homme criminel, qui date de 1876, et Le Crime…, dont la première publication date de 1899. La théorie du « criminel-né » ne récuse pas définitivement l’existence de facteurs sociaux explicatifs de la délinquance. Lombroso les admet, tardivement certes, et sous l’impulsion de ses contradicteurs. N’empêche, il ne faut pas voir dans l’italien le « monstre épistémologique »2590 qu’on en fait parfois un peu facilement. Quoi qu’on en dise rétrospectivement, il constitue un interlocuteur scientifique valable pour la communauté scientifique de son époque2591 : il n’est pas directement mis en cause avec la virulence qu’on s’autorise aujourd’hui à son égard. Sa carrière scientifique coïncide d’ailleurs avec l’âge d’or de l’anthropologie criminelle2592, dont les sept congrès internationaux, organisés entre 1885 et 1911, constituent un « fait essentiel dans la vie scientifique de la Belle Époque »2593. Au cœur du moment naturaliste des sciences humaines, la pensée lombrosienne n’a rien du tissu d’énormités qu’on a parfois tendance à en faire. Travaillant en équipe, Lombroso, qui s’est d’abord fait connaître par ses recherches d’anthropologie criminelle physique (sur la fossette occipitale des criminels2594, sur leurs cerveaux, etc.) persiste dans cette voie parce qu’il s’y spécialise, laissant à ses collègues le soin d’explorer d’autres voies dont il ne conteste pour autant pas la légitimité. Du reste, la pensée de Cesare Lombroso évolue puisque les « criminels-nés » représentent 60 % de la criminalité totale répertoriée dans ses travaux au début des années 1880, mais 30 % seulement dans les dernières éditions. Au début du XXe siècle, Locard peut ainsi souligner que « le professeur Lombroso semble attacher maintenant une importance croissante aux causes sociales, aux influences du milieu […protestant] vivement contre ceux qui l’accusent de ne tenir compte que des causes organiques et individuelles »2595. On ne saurait donc réduire la théorie de Lombroso à de fumeuses élucubrations, ni à une « mystification ». Mais on ne saurait non plus avancer trop vite que, face au « délire positiviste » de l’anthropologue italien, Alexandre Lacassagne aurait formulé très tôt une « critique sociologique »2596. L’argumentaire du Lyonnais ne doit pas être réduit à l’affirmation d’une toute-puissance du milieu social, et cette dernière notion doit d’ailleurs être rigoureusement définie. Que dit Lacassagne ? Il affirme que le rôle de la société dans la décompensation de comportements criminels doit être réévalué : par son acte criminel, le délinquant fait la preuve de son inadaptation au monde, mais les causes de celle-ci ne sont pas seulement liées à un atavisme, une dégénérescence ou une structure pathogène isolable dans ses signes anatomiques ou physionomiques :

‘« L’École française, qui procède de Gall, de Broussais, de Morel, de Despine, a posé des principes différents et est arrivée à d’autres conséquences. Nous n’admettons pas ce fatalisme ou cette tare originelle et nous croyons plutôt que c’est la société qui fait et prépare les criminels »2597.’

La pensée de Lacassagne est bien plus complexe2598 qu’une simple dénonciation en règle du déterminisme biologiste à l’italienne. En 1905, alors qu’il fait le bilan des avancées de l’anthropologie criminelle, il tient pour acquise la démonstration de « l’hérédité du crime », l’existence de malformations anatomiques et d’anomalies physiologiques « très fréquentes », mais sans constance suffisante pour qu’on en induise un type criminel, la présence chez les criminels de troubles de la sensibilité morale (impulsivité, cruauté, absence de remords, imprévoyance et vanité) et, enfin, un état intellectuel « variable »2599. Ainsi, même en mettant l’accent sur le « milieu social », Alexandre Lacassagne ne rejette pas les anomalies physiques, et admettre le déterminisme du milieu n’entraîne pas le refus de toute hérédité du crime. Au contraire, grâce à la théorie de l’hérédité, dont il expose les principes dans l’article qu’il consacre à la « Consanguinité »2600 dans le Dictionnaire Dechambre, Lacassagne peut en même temps clamer l’influence prépondérante du milieu, refuser l’innéité criminelle et admettre l’existence d’une hérédité criminelle. En fait, si Lacassagne, puis ses disciples, se démarquent de l’école italienne, qui n’est d’ailleurs pas aussi monolithique qu’on a parfois voulu le dire2601, ce n’est pas parce qu’ils en invalident les théories, mais plutôt parce qu’ils les amendent. Il ne s’agit pas pour eux de nier l’apport essentiel des Italiens, mais d’élargir le regard et de placer la société au centre de la compréhension des phénomènes déviants. L’école lyonnaise retient donc deux facteurs de criminalité : l’un individuel et l’autre social, ce dernier étant prédominant, certes, mais pas exclusif. Si le premier facteur, pathologique, l’emporte, on est en présence d’un fou et non d’un criminel, car ce qui caractérise le crime c’est « la volonté accomplissant un acte, et non cet acte même »2602. Il n’y a donc pas de crime sans libre arbitre. En découle un net refus de tout fatalisme et de toute tare originelle qui est, peut-être, la différence la plus marquante entre l’école de Lyon et celle de Turin. Mais sur ce point aussi, il convient d’être prudent : le plus fataliste des deux n’est peut-être pas celui qu’on croit. Lacassagne le souligne lui-même, à la mort du maître turinois, lorsqu’il lui rend hommage :

‘« Lombroso a tenté pour les criminels ce que Pinel avait fait pour les fous : il a demandé la pitié pour les délinquants, et, s’il n’a pu prouver leur irresponsabilité, il a au moins attiré l’attention sur leur nature défectueuse et montré la nécessité de les soumettre à un examen anthropologique »2603. ’

Sauvage égaré dans la civilisation, le criminel pourrait bien n’être qu’un épileptique pour le professeur italien qui, dans la continuité des perspectives ouvertes par la phrénologie, considère le criminel comme un malade. C’était le but de la Société phrénologique, fondée en 1831, que de consacrer dès alors cette assimilation du crime à la pathologie :

‘« Les condamnés [doivent] être considérés et traités comme des malades. La maladie est au cerveau; traitez donc le cerveau en habile médecin plutôt qu’en empirique, en bourreau. Si le malade guérit, rendez-le à la société, qu’il ne soit pas montré du doigt […]. S’il est incurable, laissez-le dans sa prison ou exportez-le vers un autre Botany-Bay, mais ne le tuez pas »2604. ’

Les conséquences d’une telle assimilation n’ont rien de commun avec celle qu’opère Lacassagne quand il compare le criminel à un microbe : si l’on soigne un malade, c’est au prix de l’élimination pure et simple des microbes. Ailleurs Lacassagne avance une autre comparaison, faisant du criminel « un produit tératologique, un monstre, quelque chose comme une tumeur maligne »2605. On pourrait multiplier les variations sur le même thème, le résultat reste toujours le même : il faut en prôner l’élimination, et l’on sait que le Lyonnais est un ardent défenseur de la peine de mort. En 1908, La Patrie titre ainsi :

‘« L’augmentation sans cesse croissante de la criminalité rend féroces même les savants. M. le professeur Lacassagne, le célèbre médecin légiste de Lyon, demande la pendaison pour les assassins »2606.

Il faut donc réévaluer à la baisse l’antagonisme supposé régner entre les deux écoles. En 1907, Edmond Locard signale avec satisfaction que « un pas en avant [est franchi] dans la réconciliation des deux grandes écoles de l’anthropologie criminelle »2607, affirmant que ce sont les Italiens qui l’ont fait suite « à l’adoption tacite par [leur] chef […] de formule chère au maître français : Les sociétés ont les criminels qu’elles méritent »2608. Dans les faits, la distance à combler n’était pas grande et les artisans du rapprochement ne sont pas seulement italiens. Le surnom donné à l’école lyonnaise d’anthropologie, dite « École du milieu social », est en fait largement usurpé.

‘« Lacassagne […] n’était pas – au sens strict – moins “positiviste” que Lombroso ni beaucoup plus “sociologue”. Une telle lecture est donc le produit lointain d’une historiographie construite à des fins stratégiques de distinction et de positionnement dans le champ scientifique »2609.’

Sur le fond, les positions françaises et italiennes sont à peu près similaires. Lacassagne a toujours soutenu que la cause principale du comportement criminel résidait dans un déterminisme héréditaire. Comment pourrait-il en être autrement, d’ailleurs, dans la mesure où il est et demeure tout au long de son parcours scientifique un fervent partisan de Franz Joseph Gall, « immortel auteur du livre Sur les fonctions du cerveau et sur celles de chacune de ses parties » dont il considère qu’il introduit « en biologie une révolution aussi considérable que celle que Galilée avait provoquée dans le monde physique »2610 ? Lorsque Lacassagne définit le concept, qu’il veut novateur, de « milieu social », il le fait dans les termes suivants :

‘« Nous ne pouvons nous représenter le milieu social que comme une agrégation d’individus dont l’évolution cérébrale est différente. Les couches supérieures, celles qui ont évolué le plus, sont les plus intelligentes : appelons-les couches frontales ou antérieures. Les couches inférieures, ce sont les plus nombreuses, celles où prédominent les instincts : appelons-les les couches postérieures ou occipitales. Entre elles, une série de couches marquées par des types où prédominent les actes, avec l’impulsion spéciale que peuvent donner les instincts ou les idées : ce sont les couches pariétales »2611.’

Le point de départ de toute la classification des criminels envisagée par Alexandre Lacassagne repose donc sur cette typologie raciale héritée de Broca et Gratiolet. Rien de très novateur là-dedans : à la race frontale correspondent les criminels de pensée, ceux que le légiste lyonnais appelle « les vrais aliénés ». Le criminel d’acte, qui agit « par passion ou par occasion » relève de la race pariétale. Enfin, le criminel d’instinct, « vrai criminel, […] incorrigible » appartient à la race occipitale2612. Si les facteurs climatiques et sociologiques interviennent, induisant notamment des variations saisonnières de la criminalité d’acte, le reste relève de la sauvagerie, de l’aliénation congénitale. « On voit donc, sans doute possible, que le fond de la pensée criminologique de Lacassagne repose sur une phrénologie étendue à une classification raciale et bientôt criminologique »2613 dans laquelle les facteurs biologiques sont prépondérants, et la typologie qu’il propose ressemble fort à celle de Lombroso. Cette conception tripartite de la société est centrale dans la réflexion du criminologue lyonnais qui reprend ici strictement classification des races qu’il décrit dans son Précis d’hygiène :

‘« Nous distinguons les couches sociales en frontales, pariétales, occipitales. Ces dernières sont les plus nombreuses, elles sont composées d’instinctifs . les couches supérieures ou frontales sont les plus intelligentes. Dans les couches pariétales, on rencontre surtout des individus d’activité, de caractère, des impulsifs »2614 .

Pour Laurent Mucchielli, Lacassagne est donc « très inconséquent ou très hypocrite dans son explication de la criminalité »2615 puisqu’il n’a, en fait, rien abandonné de son phrénologisme et ni de son approche biologisante de la déviance. Son « milieu social » n’a rien de commun avec « une conception psycho-sociologique moderne du milieu comme agent fondamental de construction des bases de la personnalité criminelle »2616, mais relève bien davantage d’une conception « écologique ». L’opposition revendiquée aux thèses de Lombroso ne serait en fait qu’une stratégie, le légiste de Turin faisant à la fois figure de « modèle scientifique » et de « repoussoir stratégique » pour le professeur lyonnais. Si la pensée des deux hommes diverge, c’est sur des points très précis et complexes, notamment sur leurs conceptions respectives de l’évolutionnisme2617, davantage que dans l’esprit général : rien sur quoi on puisse véritablement prendre appui pour fonder une école de pensée qui se veut nationale, rien sur quoi on puisse communiquer efficacement non plus. Il faut donc, sans doute, ajouter foi à la thèse de Laurent Mucchielli pour lequel l’opposition affichée de Lacassagne à Lombroso n’est que de façade et essentiellement stratégique. Il n’empêche le légiste lyonnais sait s’entourer, pour donner une facture « sociologique » à son école. Ainsi, en 1893, alors qu’il procède à un complet remaniement de la direction des Archives d’Anthropologie criminelle, Lacassagne s’associe à Gabriel Tarde, auquel il faut ajouter des collaborateurs de prestige : Paul-Louis Ladame, Paul Dubuisson, Alphonse Bertillon et Léonce Manouvrier. Mais si ces évolutions donnent à la revue un relief intellectuel nouveau et indéniable, elles ne changent pas grand-chose au fond des théories qui y sont défendues.

L’intégration de Léonce Manouvrier (1850-1927) au comité de rédaction de la revue pouvait pourtant paraître prometteuse. Les travaux de cet anthropologue restent assez mal connus. Retenons qu’il propose une critique des excès de l’anthropologie physique, dénigrant notamment l’usage systématique de la statistique et tous les systèmes anthropologiques d’analyse de l’inégalité des groupes humains2618. Son approche anthropo-sociologique semble tout indiquée pour réconcilier Lombroso et Lacassagne. Son parcours intellectuel est particulièrement intéressant2619 : préparateur titulaire au Laboratoire d’Anthropologie en 1880, c’est un disciple de Broca, qui cherche à montrer à partir de l’étude anatomique des crânes d’assassins leur parenté avec les « races inférieures » : le poids et le volume de leurs mâchoires inférieures seraient comparables2620. Pour autant, il n’adhère pas à l’idée lombrosienne d’atavisme. Là où le professeur italien considère que le type criminel doit ses traits inférieurs à un retour vers des formes ancestrales, Manouvrier considère cet archaïsme comme une persistance et distingue dès lors deux types antagonistes : « un type élevé », que l’on retrouve notamment chez les savants, artistes et autres lettrés et un « type grossier » qui inclut notamment les assassins2621. À ce stade de sa réflexion, il représente l’une des tendances déterministes les plus outrées. Ce n’est qu’après 1889 que, prenant acte des idées développées par Eugène Dally auquel il s’est d’abord affronté, il admet la dimension sociologique du phénomène criminel, récusant ses affirmations premières en affirmant que « entre le crime et les caractères anatomiques il y a tout un monde, le milieu extérieur »2622. Il développe dès lors un déterminisme bio-sociologique tout en nuances, récusant Lombroso, la « crâniomancie » et l’atavisme, dénonçant les héréditaristes qui tendraient à « criminaliser tous les caractères anatomiques »2623, les « pathologistes qui voient de la pathologie partout », et prônant désormais un ralliement exclusif aux thèses mésologiques. Sa critique de la notion d’atavisme, centrale dans la théorie lombrosienne, est particulièrement aiguë, et c’est finalement l’ensemble de cette dernière qu’il invalide résolument :

‘« Il existe une atavisme possédant une réelle valeur scientifique et universellement admis. Mais l’atavisme figurant dans la théorie du “criminel-né” n’a de commun avec celui-là que le nom : ce n’est plus qu’un simple mot littérairement dévié de sa signification scientifique, abusivement employé la plupart du temps, et dépourvu en tout cas de toute valeur explicative. Nous examinerons plus complètement et en détail cette racine artificielle de la « nouvelle école » criminaliste, conjointement avec ses autres racines tout aussi impropres à alimenter une théorie vraiment scientifique de la criminalité »2624.’

Alors qu’il a, dans un premier temps, développé une théorie tout à fait conciliable avec celle des criminologues italiens, il prend un tournant critique et appelle de ses vœux la constitution d’une méthodologie rigoureuse qui permettrait de répondre, une fois pour toutes, par la méthode des moyennes à la question de savoir si les criminels diffèrent des honnêtes gens2625. Il se range alors à une sorte de possibilisme selon laquelle : « les aptitudes proposent et le milieu dispose »2626 et défend désormais une dialectique multifactorielle de la prédisposition, liant étroitement hérédité des penchants, caractéristiques physiques et influences sociales. En ralliant Léonce Manouvrier au comité de rédaction des Archives, Alexandre Lacassagne semble donc prendre fermement position contre Lombroso. Car les critiques de l’anthropologue à l’égard du professeur italien sont particulièrement virulentes : il dénonce ses interprétations « vicieuses »2627, lui reproche de « tordre » les faits pour parvenir à ce qu’ils confirment sa thèse, à ne retenir que ceux qui vont dans le sens de son hypothèse de départ et estime tout à fait inutile de rechercher l’origine de la criminalité chez nos prédécesseurs paléolithiques quand « les bas-fonds des villes industrielles » paraissent suffisamment riches de facteurs explicatifs. Il affirme même que, quand bien même les criminels seraient « anatomiquement un peu plus imparfaits en moyenne que les non-criminels […] on n’en doit pas moins considérer cette imperfection comme un élément secondaire dans le déterminisme du crime »2628, les conditions du milieu lui paraissant toujours prépondérantes. De même, l’intégration de Paul Dubuisson au groupe de collaborateurs privilégiés de la revue est un acte de foi anti-lombrosienne. Le médecin positiviste n’écrit-il pas, en 1904 :

‘« Il faut ne pas avoir observé ni avoir lu beaucoup pour se convaincre que rien dans les faits ne confirme la vue du criminologiste italien. […] On en est donc réduit à considérer l’assertion du Dr Lombroso comme un simple paradoxe, mais comme un paradoxe nécessaire à sa thèse, laquelle a pour but d’établir la confusion entre le criminel et l’aliéné […] et je suis persuadé qu’il se trompe »2629. ’

Mais dans les faits, ces opposants à la théorie du criminel-né ne sont guère offensifs dans les colonnes des Archives. Manouvrier ne publie presque rien dans la revue après 1893. On ne lui doit en effet qu’un seul mémoire original sur « Quelques cas de criminalité juvénile et commençante », paru en 19122630, dans lequel il prend nettement position en affirmant :

‘« Si les individus normaux et bien doués physiologiquement sont accessibles aux mobiles criminels de telle sorte que la moralité chez eux varie du plus haut degré jusqu’au plus bas selon les conditions extérieures auxquelles ils sont soumis dès l’enfance, on ne peut pas dire que le crime soit en lui-même un phénomène anormal. Si les individus médiocrement doués atteignent plus difficilement un degré moyen de moralité, cela ne suffit pas pour qu’ils soient considérés comme anormaux physiologiquement »2631. ’

Paul Dubuisson n’est guère plus prolixe.

Au terme de cette analyse, on ne saurait donc nier l’importance de la pensée lombrosienne pour Alexandre Lacassagne, et ce à ses débuts de chercheur comme à la fin de sa carrière : la dimension sociologique du concept de « milieu social » étant réévaluée considérablement à la baisse, au vu de la définition qu’en donne lui-même le professeur lyonnais, il apparaît clairement que Lacassagne s’inscrit pleinement dans le vaste mouvement de naturalisation des sciences humaines alors en cours. Mais taxer Alexandre Lacassagne d’hypocrisie, comme le fait Laurent Mucchielli, paraît cependant excessif. Peut-être la lecture antagoniste que l’on fait habituellement des deux écoles anthropologiques, française et italienne, repose-t-elle davantage sur les attentes anachroniques suscitées par le terme de « milieu » qui n’a pas, sous la plume des criminologues de la fin du XIXe siècle, la dimension sociologique qu’on lui connaît à l’heure actuelle, que sur la contestation mise en scène par Lacassagne des théories lombrosiennes dans un contexte épistémologique « réfutanionniste »2632. On ne peut contester que les conceptions élaborées par Lacassagne ne sont pas toutes entières réductibles à une anthropologie physique. Le médecin ne craint pas de s’aventurer sur d’autres terrains, soignant le corps comme la société2633. En fait, il parvient le plus souvent à tenir ensemble les deux bouts de la chaîne, élaborant conjointement une anthropologie physique et une anthropologie sociale, et proposant une explication bio-sociologique de la déviance, ses adeptes étant en fait « esclaves de fatales dispositions organiques […qui] proviennent de l’hérédité ou du milieu social  lui-même »2634. Ainsi, la même année, en 1893, il dirige et fait soutenir deux thèses dont les sujets peuvent sembler opposés, voire incompatibles : Camille Genod travaille sur Le cerveau des criminels 2635 et précise dans la préface de son travail que c’est à Lacassagne qu’il doit le sujet de son travail, cependant que Jules Massenet interroge Quelques causes sociales du crime 2636 et indique également que c’est le légiste lyonnais qui lui a inspiré les idées qu’on y trouve. Ce qui est certain, c’est que Lombroso joue pour Lacassagne le rôle de « modèle identificatoire au sens psychologique de celui avec lequel (pour ou contre) on se détermine toujours »2637. Au moment de rendre hommage au professeur de Turin, lors de son décès, Alexandre Lacassagne ne rejette pas la théorie du « criminel-né », mais il la circonscrit très étroitement :

‘« Très jeune, l’individu se montre avec cet ensemble de perversités instinctives, si fréquentes dans l’enfance, mais qui disparaissent au moment de l’adolescence. Quand elles persistent, le sujet est incorrigible, c’est un criminel-né »2638. ’

Dans l’introduction de sa thèse, dirigée par Lacassagne, Camille Genod adhère sans condition à la théorie lombrosienne. Ce n’est pas l’existence d’un « type [criminel] spécial, aussi bien au point de vue physique qu’un point de vue moral », présentant un certain nombre de modifications qui le distinguent de l’homme honnête et le rendent « comparable à l’homme primitif […], forcé dès lors d’entrer en lutte avec la société perfectionnée dans laquelle il se trouve comme brusquement jeté »2639 qui lui paraît contestable. Ce n’est pas non plus la recherche de « stigmates qui pourraient servir à distinguer un criminel et, en le marquant au fer rouge, à le désigner immédiatement à l’attention ». Au contraire, ce sont les lacunes de ce travail d’observation qui sont soulignés, et principalement le peu d’importance accordé par le professeur de Turin à l’étude du cerveau, « tandis que de longs chapitres sont consacrés à nous faire connaître mille détails sur le genre de vie des criminels, sur leurs goûts »2640, bref à une étude « sociologique » du phénomène criminel au sens où nous l’entendrions aujourd’hui. L’idée qu’on puisse mettre en évidence certaines caractéristiques anatomiques du cerveau criminel est nettement récusée, mais il n’est pas exclu que « la science des localisations », la phrénologie, permette un jour « d’expliquer la prédominance de certains mauvais instincts par la prépondérance qualitative des zones cérébrales qui leur correspondent »2641. En revanche, il faut souligner aussi que Lacassagne n’emprunte pas seulement à Lombroso pour élaborer ses théories. À celle du « criminel-né », il ajoute celle du « type criminel », empruntée à Gabriel Tarde, qu’il décrit en ces termes : « système musculaire très développé, faciès caractérisé par la saillie des zygomes et la lourdeur de la mandibule », faisant nettement référence, pour ce second stigmate, à Léonce Manouvrier. À ce dernier il emprunte également ses conceptions au sujet de l’atavisme, point sur lequel il diverge sans doute le plus nettement de Lombroso. Lombroso rapproche le criminel de « l’homme des époques préhistoriques, né tout à coup parmi nous avec les instincts et les passions de ces premiers âges »2642, cependant que Manouvrier préfère considérer qu’il est comparable aux races « inférieures », certes, mais contemporaines2643. Et Lacassagne suit Manouvrier à ce sujet : il voit ainsi dans la pratique des tatouages « la répétition de coutumes spéciales aux peuples primitifs » – comprenez les sauvages exotiques que l’avancée coloniale offre alors aux yeux du public européen – là où son confrère transalpin diagnostique « une interruption, puis un retour en arrière », bref une pratique empruntée « à nos ancêtres » :

‘« Où Lombroso voit des types anciens, nous ne voyons que des types retardés »2644. ’

Dans l’analyse du conflit supposé opposer Lacassagne et Lombroso, l’erreur ne s’explique donc sans doute pas tant par les protestations et les critiques du Lyonnais à l’égard de l’Italien : on a vu qu’elles seraient largement infondées et qu’elles ne sont pas aussi virulentes qu’on a pu le dire. Le légiste turinois a bien d’autres détracteurs, et qui sont autrement plus polémiques. En revanche, la pluralité des influences théoriques à l’œuvre dans la réflexion de Lacassagne a, semble-t-il, été longtemps négligée.

Notes
2575.

Marc Renneville, La médecine du crime : essai sur l’émergence d'un regard médical sur la criminalité en France (1785-1885), Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 1998, 920 p.

2576.

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.792.

2577.

Peter Conrad et Joseph W. Schneider (eds), Deviance and medicalization. From badness to sickness, Philadelphia, Temple University Press, 1992 (2e édition), 327 p.

2578.

Alexandre Lacassagne, op.cit., in Revue scientifique, 1881, p.683. [BML FA 135835]

2579.

Laurent Mucchielli, « Hérédité et “Milieu social”. Le faux antagonisme franco-italien », in Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.192-193.

2580.

Courrier de Cesare Lombroso à Alexandre Lacassagne, Turin, 1900. [BML FA s.c.]

2581.

Courrier de Cesare Lombroso à Alexandre Lacassagne, Turin, 25 décembre 1900. [BML FA s.c.]

2582.

Il s’agit probablement de son ouvrage intitulé Le crime, ses causes et remèdes : progrès de l’anthropologie criminelle qui paraît chez Schleicher en français en 1899, dans la Bibliothèque de philosophie contemporaine. La seconde édition est conservée dans le fonds Lacassagne :

Cesare Lombroso, Le crime, ses causes et remèdes : progrès de l’anthropologie criminelle Paris, Alcan, 1907, VII-583 p. [BML FA 427626]

2583.

Courrier de Cesare Lombroso à Alexandre Lacassagne, Turin, 25 décembre 1900. [BML FA s.c.]

2584.

Edmond Locard, « Chronique latine. Un nouveau livre du Professeur Lombroso : Le Crime, causes et remèdes », in Archives d’anthropologie criminelle, 1907, p. 271.

2585.

Patrick Tort, La raison classificatoire, Paris, Aubier, 1989, p.468.

2586.

Elle n’est pas la seule à défendre cette idée, vulgarisée jusqu’à la caricature par Pierre Darmon (Médecins et assassins à la Belle Époque. La médicalisation du crime, Paris, Seuil, 1989, 329 p.)

On trouve cette même lecture dans : Jean Pinatel, « De Lacassagne à la nouvelle école de Lyon », in Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, 1961, p.151-158.

Henri Souchon, « Alexandre Lacassagne et l’École de Lyon. Réflexions sur les aphorismes et le concept de Milieu social », in Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, n°2, 1974, p.533-559.

2587.

Martine Kaluszynski, op.cit., 1988, p.173-183.

2588.

Jules Massenet, Quelques causes sociales du crime, Lyon, Storck, 1893,  p.3. BML FA 135515

2589.

Pour un exposé synthétique de la théorie lombrosienne et de ses critiques voir :

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.633-650.

Marvin E. Wolfang, in Hermann Mannheim (ed.) Pioneers in Criminology, London, Stevens, 1960, p.232-289.

Alain Bélier, Cesare Lombroso, sa vie, son œuvre et sa contribution à la naissance de la criminologie, Thèse de médecine, Paris 4, 1974, 124 p.

2590.

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.632.

2591.

À ce sujet, voir aussi Marc Renneville, « Rationalité contextuelle et présupposé cognitif. Réflexion épistémologique sur le cas Lombroso », in Revue de Synthèse, 1997, p.495-529.

2592.

La création de plusieurs revues destinées à la diffusion des thèses nouvelles de cette discipline en pleine expansion dans les années 1880 est symptomatique de son succès : Archivio di psichiatria, antropologia e scienze penale dès 1880, puis Archives d’anthropologie criminelle en 1886, et en 1888 La Revista de antropologia criminal y ciencas medico-legales.

2593.

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.644.

2594.

Sur cette découverte et la théorie qui en découle, on renvoie à Marc Renneville, « Lumière sur un crâne ? La découverte du criminel-né selon Lombroso », in Jacqueline Carroy et Nathalie Richard (eds), La découverte et ses récits en sciences humaines. Champollion, Freud et les autres, Paris, L’Harmattan, 1998, p.15-36.

2595.

Edmond Locard, op.cit., 1907, p. 271.

2596.

Pierre Darmon, op.cit., 1989. Cité par Marc Renneville, op.cit., 1998, p.643.

2597.

Alexandre Lacassagne, Discours d’ouverture au IIe Congrès du patronage des libérés, Lyon, Storck, 1894, p.406. [BML FA 427576]

2598.

Marc Renneville, « La criminologie perdue d’Alexandre Lacassagne (1843-1924), in Criminocorpus, 2005. Article en ligne : http://www.criminocorpus.cnrs.fr/article143.html [Consulté le 10 mars 2009]

2599.

Alexandre Lacassagne et Étienne Martin, « État actuel de nos connaissances en anthropologie criminelle pour servir de préambule à l’étude analytique des travaux sur l’anatomie, la physiologie, la psychologie et la sociologie des criminels », in Archives d’anthropologie criminelle, 1906, p.104-114.

2600.

Alexandre Lacassagne, « Consanguinité », op.cit., 1880, p. ??. BML FA 404397

2601.

Sur la diversité de l’école italienne on renvoie de nouveau à Marc Renneville, op.cit., 1998, p.651-655.

Voir aussi : Ysabel Rennie, The Search for Criminal Man. A Conceptual history of the Dangerous Offender, Toronto, Lexigton Books, 1978, 345 p.

George B. Vold & Thomas J. Bernard, Theoretical Criminology, New York, Oxford University Press, 2002 (5e éd.), 346 p.

David A. Jones, History of criminology. A philosophical perspective, London, Greenwood Press, 1986, 243 p.

Daniel Pick, Faces of Degeneration. A European disorder, c.1848-c.1918, Cambridge, Cambridge University Press, 1989, p.109-152.

2602.

Alexandre Lacassagne, Préface à Émile Laurent, Les habitués des prisons de Paris, Paris, Storck, 1890, p.3. [BML FA 135466]

2603.

Cité par Philippe Artières et Gérard Corneloup, op.cit., 2004, p.123.

2604.

Jean-Baptiste Mège, Manifeste des principes de la Société phrénologique de Paris, Paris, Pihan Delaforest, 1835, p.30.

2605.

Alexandre Lacassagne, Préface à Émile Laurent, Le Criminel aux points de vue anthropologique, psychologique et social, Paris, Vigot frères, 1908, p.XI. [BML FA 135679]

2606.

La Patrie, 19 février 1908. Coupure de presse conservée par Lacassagne, non cotée.

2607.

Edmond Locard, op.cit., 1907, p. 271.

2608.

Idem.

2609.

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.643.

2610.

Alexandre Lacassagne, « Intervention au Congrès d’anthropologie criminelle », in Archives d’anthropologie criminelle, 1886, p.169.

2611.

Alexandre Lacassagne, op.cit., in Revue scientifique, 1881, p.674. [BML FA 135835]

2612.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1881, p.683-684. [BML FA 135835]

2613.

Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.191.

2614.

Alexandre Lacassagne, Préface à Émile Laurent, op.cit., 1908, p.VIII. [BML FA 135679]

2615.

Idem.

2616.

Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.192.

2617.

Lacassagne est lamarckien, défendant la théorie de « l’hérédité des caractères acquis », cette dernière ne concernant toutefois que le système nerveux, « le plus élevé dans la hiérarchie des tissus » alors que Lombroso, en bon darwinien, la conteste. Sa théorie de l’hérédité est exposée dans l’article du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales de Dechambre qu’il consacre à la question de la « Consanguinité ». BML FA 404397

Sur ce point, on renvoie au travail de Marc Renneville, op.cit., 1998, p.680-683.

2618.

J.M. Hecht, « A vigilant anthropology : Léonce Manouvrier and the disappearing numbers », in Journal of the history of the behavioral sciences, vol.33, n°3, 1997, p.221-240.

2619.

Pour son analyse détaillée, voir Claude Blanckært, « L’anthropologie des criminels (1850-1900), in Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.70-75.

Marc Renneville, op.cit., 1998, p.666-676.

2620.

Léonce Manouvrier, « Discussion sur les criminels. Sur l’étude anthropologique des crânes d’assassins », in Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris, 3e série, tome VI, 1883, p.93-125.

2621.

Léonce Manouvrier, « Discussion sur les crânes d’assassins », in Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris, 3e série, tome V, 1882, p.781.

2622.

Léonce Manouvrier, « Existe-t-il des caractères anatomiques propres aux criminels ? Les criminels présentent-ils en moyenne certains caractères anatomiques particuliers ? Comment doit-on interpréter ces caractères ? », in Actes du deuxième Congrès international d’anthropologie criminelle (Paris, août 1889), Lyon, Storck, 1890, p.284. [BML FA 135457]

2623.

Léonce Manouvrier, op.cit., 1890, p.192. [BML FA 135457]

2624.

Léonce Manouvrier, « L’atavisme et le crime. Cours d’anthropologie physiologique. Leçon faite en janvier 1891 », in Revue de l’École d’anthropologie, tome I, août 1891, p.240. [BML FA 137600]

2625.

Léonce Manouvrier, op.cit., 1890, p.29. [BML FA 135457]

2626.

Léonce Manouvrier, « Les aptitudes et les actes dans leurs rapports avec la constitution anatomique et avec le milieu extérieur », in Bulletin de la Société d’Anthropologie de Paris, 4e série, tome I, 1890, p.943. [BML FA 429563]

2627.

Léonce Manouvrier, op.cit., p.240. [BML FA 137600]

2628.

Léonce Manouvrier, op.cit., 1890, p.154. [BML FA 135457]

2629.

Paul Dubuisson, Du principe délimitateur de l’aliénation et de la criminalité, Lyon, Storck, 1904, p.11. BML FA 137023

2630.

Léonce Manouvrier, « Quelques cas de criminalité juvénile et commençante », in Archives d’anthropologie criminelle, 1912, p.881-918. [BML FA 136965]

2631.

Léonce Manouvrier, op.cit., 1912, p.918. [BML FA 136965]

2632.

C’est Marc Renneville qui qualifie en ces termes le moment scientifique que constitue la fin du XIXe siècle, empruntant l’expression à Robert Boudon (L’art de se persuader des idées douteuses, fragiles ou fausses, Paris, Fayard, 1990, p.129-176). Marc Renneville, op.cit., 1998, p.671.

2633.

À ce titre, il n’est pas original. Les médecins sont engagés dans la croisade hygiéniste depuis la Révolution française.

2634.

Alexandre Lacassagne, « L’homme criminel comparé à l’homme primitif », in Bulletin du Lyon médical, 1882, p.255. [BML FA 135391]

2635.

Camille Genod, Le cerveau des criminels, Lyon, Storck, 1893, 46 p. BML FA 135507

2636.

Jules Massenet, op.cit., 1893, 76 p. BML FA 135515

2637.

Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.192.

2638.

Alexandre Lacassagne, « Cesare Lombroso (1836-1909) », in Archives d’anthropologie criminelle, 1909, p.892.

2639.

Camille Genod, op.cit., 1893, p.4. BML FA 135507

2640.

Camille Genod, op.cit., 1893, p.5. BML FA 135507

2641.

Camille Genod, op.cit., 1893, p.46. BML FA 135507

2642.

Alexandre Lacassagne, Préface à Émile Laurent, op.cit., 1908, p.VI. [BML FA 135679]

2643.

Notre rapport au temps et la valeur accordée à l’ « ancien » ont considérablement évolué. D’abord modèle à imiter, l’ « ancien » devient une figure à dépasser à la fin du Moyen Age, le présent n’étant plus facteur de décadence mais vecteur de progrès. Au XIXe siècle, le triomphe de l’idéologie du progrès associé aux découvertes coloniales confondent l’ « ancien » et le « sauvage » dans une commune détestation.

Sur ce point, on renvoie à François Hartog, Anciens, modernes, sauvages, Paris, Galaade, 2005, 256 p.

2644.

Alexandre Lacassagne, op.cit., 1881, p.115. [BML FA 135321]

Régine Plas, « Tatouages et personnalité criminelle », in Laurent Mucchielli (dir.), op.cit., 1995, p.157-167.