4.2.1. Arnold Dolmetsch et l’introduction aux instruments anciens.

À côté de ses talents d’artiste et d’enseignant, Dolmetsch (1858-1940), était également un passionné d’instruments anciens et il a consacré une grande partie de son activité à la reconstruction et la fabrication des instruments du XVIIe et du XVIIIe siècle. Ses travaux ont permis la révélation de beaucoup d’éléments liés à la question de l’interprétation de la musique ancienne et ont contribué à l’élargissement de la connaissance du répertoire ancien.

Dolmetsch est probablement le premier musicien, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, qui ait contribué à une véritable renaissance de la pratique de la musique ancienne sur les instruments de l’époque. En France, il reçut une formation d'artisan à la Maison Dolmetsch-Guillouard au Mans, où se situait la manufacture d'orgue et de piano de ses parents. Puis il s’installa à Londres où il put approfondir son intérêt pour la musique baroque. En 1880 il commença à exercer son métier de professeur de violon au collège de Dulwich. C’est alors qu’il commença à collectionner et à fabriquer toutes sortes d’instruments anciens comme les violes, les luths et une grande variété d'instruments à clavier. La grande expérience de Dolmetsch et sa vaste connaissance de la facture et de la sonorité des instruments anciens, lui ont permis de reproduire des modèles très fiables, qui s’approchent de très près des originaux. Grâce à ces reproductions révolutionnaires, ses instruments précieux étaient utilisés dans les divers concerts donnés par lui-même ou par certains de ses amis. Parmi les nombreux instruments remarquables fabriqués pendant ce séjour londonien des années 1890, on peut citer en particulier les pianos "Beethoven".

Ill. n°13 : Arnold Dolmetsh jouant sur un clavicorde. (
Ill. n°13 : Arnold Dolmetsh jouant sur un clavicorde. (National Portrait Gallery, London ) 1 www.npg.org.uk . 1

L’engagement de ce pionnier au service de la musique ancienne, a pu initier de nombreux musiciens et admirateurs à l’écoute et à l’exécution sur ces instruments. Mais la grande réputation de Dolmetsch lui permit également de diriger la production d'instruments de musique anciens à l'étranger, comme dans la Chickering Factory à Boston, USA et, plus tard, dans les ateliers Gaveau à Paris ; il ne lui fallut pas attendre longtemps pour que beaucoup de ses instruments fassent partie des grandes collections des musés internationaux.

En 1915, Dolmetsch publie son ouvrage The interpretation of the music of the XVIIth and the XVIIIth centuries et il fonde à Londres un grand centre de musique ancienne. Vers 1919, Arnold Dolmetsch se tourne vers la flûte à bec. Il consacra une grande partie de sa vie à l’étude des secrets de cet instrument, afin de donner finalement des modèles de référence.

Ses disciples sont nombreux : facteurs, exécutants et étudiants, tous ont participé au mouvement de résurrection de la musique ancienne. Parmi ceux-ci, Gunter Hellwig, fabricant de violes, John Challis, constructeur de clavecins, Diana Poulton (luthiste), Dorothy Swainson (claveciniste) et beaucoup d’autres .

« Musicien extrêmement doué à tous points de vue, Dolmetsch était essentiellement autodidacte, faisant preuve de grandes qualités expressives et capable de produire un son admirable - même si ses performances étaient parfois techniquement inégales. Ses qualités de facteur d’instruments, d’enseignant et de mentor étaient indiscutables. […] De plus, sa passion de toute une vie pour la musique pratiquée en amateur allait à l’encontre de la politique en vigueur dans les conservatoires et lesfacultés. Il n’en reste pas moins que son travail a jeté lesbases sur lesquelles s’est fondée au XXe siècle la renaissance de la musique ancienne. »5 2

Les initiatives de Dolmetsch, s’inscrivent autant dans le domaine artistique et le domaine artisanal que dans le domaine pédagogique. Jusqu’à la fin de sa vie, l’engagement de Dolmetsch et sa démarche fondatrice ont guidé beaucoup de musiciens et ont participé foncièrement à une large connaissance du répertoire ancien et aussi aux instruments originaux de l’époque.

Notes
5.

2 PLANCHART, Alejandro, « L’interprétation des musiques anciennes », op. cit., p. 1075.