4.1.2.2.La représentation de la relation entre infrastructures de transport et développement économique ou comment le Lyon-Turin devient européen

Si le projet a pu avancer à l’étape suivante de son parcours, c’est parce qu’il y avait dans les chiffres avec lesquels les acteurs accompagnaient leurs discours des éléments propres à doter le projet d’un intérêt plus vaste que le simple caractère interrégional qui l’a fortement caractérisé pendant les premières années 1990. Le travail de construction mené par les décideurs de Rhône-Alpes et les deux comités de promotion en collaboration avec la SNCF et les FS a permis au projet de devenir européen avant même de voir son intérêt national reconnu par les deux pays concernés. En effet, le combat pour inscrire définitivement le Lyon-Turin parmi les projets prioritaires du continent n’était pas « évident pour tout le monde : pour l’État [français] il y avait une seule priorité établie, c’était Strasbourg, dans l’espoir que cela renforcerait la position de la ville comme capitale européenne » (Pierre Dumas, Vice-président du Conseil régional, chargé Transports)33. En s’appuyant sur les trafics induits par le projet (+4,7 Mt/an en 2002, entre la situation de référence et la situation de projet, comme représenté en figure 24), les acteurs qui le portaient allaient à la rencontre des idées contenues dans le Livre Blanc de 1993, qui faisait des grandes infrastructures une variable fondamentale de la reprise économique européenne et des maillons manquants un point central de la politique européenne des transports. Le projet a pu ainsi être inscrit parmi les projets prioritaires d’Essen en 1994, grâce à la démonstration de son apport – les trafics induits estimés – à la dynamique économique européenne. En même temps, l’Europe a pu se légitimer en tant qu’acteur de référence dans l’histoire du projet et dans la question alpine des transports.

Notes
33.

Cité dans : GIP Transalpes (2001), L’Odyssée Transalpes. Petite histoire d’un grand projet de liaison à travers les Alpes.