Encadré 2 : Le Partenariat Public-Privé

Origine et nature des contrats de PPP

Le terme de Partenariat Public-Privé recouvre en général l’ensemble des modes de participation du secteur privé au financement et à la mise en œuvre (conception, construction, rénovation ou entretien et gestion) des infrastructures et des services publics. Il comprend donc l’ensemble des formes de contrat par lequel un acteur public, l’État ou une collectivité locale, fait appel à des prestataires privés pour financer et gérer un équipement public et par lequel l’acteur privé reçoit, en contrepartie de sa prestation, un paiement de la part du partenaire public ou des usagers du service qu'il gère.

Ce mode de financement connaît depuis la fin des années 1980 une forte croissance. Sa diffusion est mise en relation avec des approches de plus en plus libérales en politique et avec l’augmentation de la dette publique dans certains États occidentaux, qui les aurait poussés à se tourner de plus en plus vers la formule des partenariats public-privé. Le recours accru aux opérations de partenariat public-privé n’est cependant pas uniquement expliqué au regard des contraintes budgétaires auxquelles doivent faire face les États. Il répond aussi à la volonté de bénéficier davantage du savoir-faire et des méthodes de fonctionnement du secteur privé dans le cadre de la vie publique. Le développement de ces formes de participation s'inscrit par ailleurs dans l'évolution plus générale du rôle de l'État dans la sphère économique en Europe, passant d'un rôle d'opérateur direct à un rôle d'organisateur, de régulateur et de contrôleur. Néanmoins, les événements récents de la crise financière actuellement en cours (octobre 2008) amènent à reconsidérer le rôle de l’État dans la sphère économique et pourront avoir des impacts sur une nouvelle évolution. Cette pratique est, en outre soutenue, depuis plusieurs années par des organisations internationales, telles que la Banque mondiale, l’OECD et la Banque européenne des investissements.

Désormais, le partenariat public-privé est présent dans de nombreux pays européens sous des formes variées. Néanmoins, l'expression de « partenariat public-privé » fait souvent référence à un type spécifique des projets de financement, qui se sont développés en Europe sur le modèle des contrats de Private Finance Initiative (PFI) nés au Royaume-Uni en 1992. Ici, le principe du PPP fut mis en place pour la première fois par le gouvernement conservateur Major et fut ensuite développé par les travaillistes à partir de 1997 dans le domaine hospitalier. En France, où des formes de partenariat public-privé existent depuis l’Ancien Régime sous la forme des concessions qui ont permis au pays de se doter de ses premières infrastructures publiques, ce mode contractuel a été relancé en 2002 par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure53. Cette loi a été envisagée dans le but de répondre à des besoins urgents dans le domaine de la construction et de la maintenance d'immeubles utilisés par la police, la gendarmerie ou la défense nationale. Ensuite, deux autres secteurs ont été intégrés dans le champ d’application des contrats de PPP, la justice et le secteur hospitalier, avant que ce régime fasse l’objet d’une reformulation générale en 2004 avec l’ordonnance sur les contrats de partenariat (voir le paragraphe : « Le PPP en France »).

Le recours de plus en plus fréquent de la part des autorités publiques des États-membres européens à des montages de PPP pour réaliser des projets d'infrastructure, notamment dans le secteur du transport, de la santé publique, de l'éducation et de la sécurité publique pousse l’Europe à étudier ce sujet. Le recours à cet outil et la reconnaissance sur le plan européen de son importance dans le cadre de la contribution à la réalisation des réseaux transeuropéens de transport, permet à l’Europe de montrer son intérêt et engagement dans la mise en place d’une politique européenne des transports et d’argumenter que son retard résiderait dans l’insuffisance des investissements, plutôt qu’être la conséquence d’un choix précis concernant les priorités politiques européennes.

Malgré la diffusion de cet outil, le droit communautaire ne prévoyait pas jusqu’à recemment de régime spécifique englobant le phénomène des PPP, alors que la diffusion croissante de ces contrats dans la réalisation de grands projets d’infrastructures ou dans la fourniture de services d’utilité publique imposait de manière de plus en plus pressante à la Commission d’intervenir dans la défense de la transparence de la procédure de choix des partenaires privés et d’une concurrence loyale entre ceux-ci, dans l’optique, notamment, de prévenir les distorsions de concurrences entre les agents économiques des différents pays membres et de garantir l’utilisation optimale de l’argent des contribuables. En 2004, la Commission publie alors un Livre Vert54, dans le but de lancer un large débat permettant de déterminer si une intervention communautaire est nécessaire pour assurer un meilleur accès des opérateurs économiques des États-membres aux différentes formes de partenariat public-privé, dans des conditions de clarté juridique et de concurrence effective. La consultation publique engagée avec le Livre Vert permet de constater l’existence d’une forte demande pour une initiative communautaire, législative ou non, en matière de concessions, qui ne sont pas encore soumises aux règles détaillées de l’UE en matière de marchés publics. Le Livre Vert de 2004 se conclut donc avec le constat qu’il est nécessaire de clarifier à la fois la notion de « concessions » et les règles qui président à leur octroi. Cette nécessité s’accompagne de la requête du Parlement européen de mieux définir la notion de PPP (2006), en la distinguant de manière plus précise des concessions des marchés publics. Le Conseil des Régions appelle également à la clarification des partenariats publics-privés mais estime qu’il n’y a pas lieu d’introduire de législation communautaire pour le partenariat, la notion même de partenariat restant à définir. Ainsi, cette demande d’une plus grande clarté en la matière s’accompagne également d’avis partagés quant à la forme et au contenu précis des initiatives que l’UE devrait prendre : la Commission doit-elle procéder à une intervention de type législatif ou son intervention doit-elle plutôt se limiter à une interprétation ? Elle s’accompagne aussi d’une demande de clarification concernant les définitions des partenaires publics et privés, notamment en raison de l’existence des « PPP institutionnalisés », c’est-à-dire d’entreprises de service public détenues conjointement par un partenaire public et un partenaire privé.

Ainsi, concernant le cadre général, la Commission conclut qu’une communication interprétative conviendrait mieux qu’une législation, alors que, en ce qui concerne plus spécifiquement les concessions, l’initiative législative est considérée préférable. La Commission renonce donc à une proposition de directive sur les PPP pour se concentrer sur la concession de service. En distinguant entre :

  • les partenariats publics-privés dits « institutionnalisés » (PPPI), qui opèrent au travers de l'établissement d'une entité à capital mixte,
  • et les PPP dits « contractuels » (PPPC), qui se fondent uniquement sur des liens contractuels,

la Commission décide d’élaborer une proposition législative concernant uniquement les concessions en PPPC (cette proposition n’a pas encore été élaboré en 2008)55. Elle décide cependant de se consacrer à clarifier les règles régissant les PPP institutionnalisés. Une communication est ainsi publiée à ce sujet en février 2008 concernant les éléments d’orientation sur la création des partenariats public-privé institutionnalisés (PPPI), entités à capital mixte habituellement créées au niveau local pour la prestation d’un service au public. Les éléments d’orientation de la Commission, qui n’ont pas caractère obligatoire, se basent sur un arrêt de la Cour de Justice Européenne (C-26/03 « Stadt Halle »), qui impose des procédures de passation transparentes et concurrentielles lors de l’attribution des marchés publics ou concessions aux entités mixtes. La Communication explicite le droit communautaire qui s’applique à la création des PPPI. Elle renforce la sécurité juridique non seulement pour le secteur public, mais encore pour les investisseurs privés en matière des partenariats public-privé (PPP).

Notes
53.

Loi n°2002-1094 du 29 août 2002 (Legifrance)

54.

Commission Européenne (2004), Livre vert sur les partenariats public-prive et le droit communautaire des marchés publics et des concessions. Bruxelles.

55.

Il faut remarquer, en effet, que l’objectif d’une proposition législative a été inscrit dans le programme de travail de la Commission, sans qu’aucune date ou délais soit arrêté. Comme le fait remarquer E. Besson dans son Rapport sur le développement des PPP de juin 2008 « alors que fin 2007, la rédaction d’un tel projet était prévue pour le 1 er semestre 2008, qui aurait donné lieu à une négociation sous présidence française, les interlocuteurs de la mission estimaient plus probable que cette négociation se déroule en 2009, après les élections au Parlement européen » (Besson, 2008, p. 35).