5.2.2.L’espace alpin dans le Lyon-Turin : le rôle du projet dans le renforcement des politiques alpines de transport

L’engagement de la France et de l’Italie sur l’objectif du report modal dans la région alpine représente l’apport du Lyon-Turin à l’évolution du processus d’élaboration des politiques de transport alpines. L’objectif du report modal s’est, en effet, affirmé dans l’espace alpin à l’issue des négociations entre l’UE et la Suisse sur l’accord Transports de 1999, en tant que solution de compromis entre la défense européenne du principe de libre circulation et la défense suisse du respect environnemental à travers la fixation d’objectifs de limitation du trafic de poids-lourds en transit sur son territoire. Dès lors, cet objectif s’est étendu à l’ensemble de l’espace alpin. Cependant, les mécanismes et les motifs par lesquels il arrive à s’imposer à l’arc alpin ne sont pas toujours évidents ; au contraire, ils paraissent parfois contradictoires avec les intérêts propres à chaque pays. Notamment, pour ce qui concerne la France et l’Italie, l’adhésion à cet objectif dans cette région est soit contradictoire (pour l’Italie, par rapport à son exigence de défense de ses échanges internationaux) soit peu évidente (pour la France, en raison de la marginalité de la région alpine sur son territoire). L’inclusion de cet objectif dans la politique française et italienne repose aussi, pour ce qui concerne leurs territoires alpins, sur les opportunités qu’il est en mesure d’offrir pour la défense et la justification du projet. Le Lyon-Turin représente ainsi l’élément qui détermine l’engagement des deux pays alpins dans les travaux de réflexion menés dans le cadre de la concertation alpine sur les mesures de régulation du trafic des marchandises transalpins que nous étudierons dans la partie suivante de cette thèse. En effet, nous avons vu que la première adhésion à cet objectif s’est traduite par l’affirmation d’une capacité intrinsèque au projet à produire du report modal, prouvée par l’introduction d’un nouveau modèle de répartition modale dans les études de LTF. Cette première adhésion au report modal semble plutôt relever de l’argumentation et de la justification du projet que d’un réel partage de cet objectif. Cette implication faible se renforce cependant au fil du temps. À partir du moment où la question du financement privé se pose et que l’objectif du report modal commence à représenter un moyen concret de répondre à des obstacles financiers, qui risquent d’empêcher sa réalisation, l’engagement sur cet objectif se renforce et oblige à étudier les autres mesures possibles capables de garantir une intensification de l’usage de la future liaison.