7.4.1.Les caractéristiques techniques de CAFT

La base de données CAFT est le résultat d’un double travail. Les données routières sont issues des enquêtes routières réalisées par les ministères des transports de la France, de la Suisse et de l’Autriche tous les cinq ans (en 1994, 1999 et 2004) à travers l’ensemble de l’arc alpin. Ces données sont complétées par la collecte des informations relatives aux flux ferroviaires transmises par les chemins de fer des trois pays (OBB, SBB, SNCF). Ces dernières sont fournies sous une forme permettant la comparaison avec les données routières. Elles portent sur le trajet (zones NUTS2101 d’appartenance des gares d’expédition et de réception, points-frontière empruntés), sur la technique ferroviaire (conventionnel ou combiné) et sur la marchandise (tonnage, ainsi que la catégorie NST dans le cas du transport ferroviaire conventionnel). En outre, concernant les trafics sur route roulante, les sociétés Ôkombi et Kombiverkehr & CO. KG fournissent les données relatives au trafic de l’autoroute ferroviaire qui franchit l'Autriche ; pour la Suisse la société Hupac SA, exploitant de l’autoroute ferroviaire suisse, fournit les données relatives au trafic combiné accompagné102. Ces enquêtes offrent des éléments complémentaires aux bases de données de transport existantes (Alpinfo et nationales), en précisant des éléments indispensables pour l’analyse des flux et la réalisation de prévisions de la demande de transport. Néanmoins, elles demeurent ponctuelles et nécessitent d’être couplées avec les données Alpinfo pour permettre de reconstituer des séries annuelles et d’étudier l’évolution de la demande de transport à travers les Alpes.

Les données portant sur les flux routiers proviennent d’une enquête réalisée auprès des conducteurs de poids lourds à chacun des points de franchissement majeurs de l’arc alpin, auxquels s’ajoute un poste d’enquête à Bâle. Les sondages sont effectués sur la base d’un plan qui prévoit 36 périodes d’observation pendant l’année enquêtée, c’est-à-dire que trois sondages par mois sont réalisés en moyenne. Ces périodes sont réparties en fonction des jours de la semaine, avec une distinction notamment entre les jours ouvrables et les week-ends, et par périodes au cours de la journée (6h-14h ; 14h-22h ; 22h-6h), de manière à ce que tous les types de trafic éventuels soient représentés dans l’enquête. Le nombre total de questionnaires dans les trois pays est compris entre 20 et 24 milles, ce qui représente à peu près 0,9% du trafic total aux passages français, 1,6% aux passages suisses et 0,4% aux passages autrichiens (Schmidt et Spiegel, 2005). La plupart des interviews a été réalisée au tunnel du Fréjus, en France, au Gothard, en Suisse, et au Brenner, en Autriche, aux points de franchissement les plus fréquentés.

Fig. 56 – Postes de sondage, trafic annuel et taux d’échantillonnage
Fig. 56 – Postes de sondage, trafic annuel et taux d’échantillonnage des enquêtes CAFT 1999

Source : Schmidt et Spiegel (2005)

Aux 14 passages routiers enquêtés s’ajoutent 9 passages ferroviaires pris en compte :

  • en France : Vintimille, Mont-Cenis (Modane) ;
  • en Suisse : Simplon, Gothard ;
  • en Autriche : Brenner, Tauern, Schoberpass, Semmering, Wechsel.

Les questionnaires soumis aux conducteurs de poids lourds portent sur trois catégories de données, qui concernent : le véhicule, le trajet du véhicule et la catégorie de marchandises transportées. Pour chaque catégorie, le questionnaire vise à rassembler une information exhaustive, en prenant en compte un nombre variable de critères.

Pour les véhicules, l’enquête prend en compte les données relatives :

  • aux caractéristiques physiques : nombre d’essieux, configuration de l’attache (camion simple, semi-remorque ou camion plus remorque). Le croisement de ces deux caractéristiques (n° d’essieux et type de PL) produit 14 catégories différentes de poids lourds recensés dans l’enquête ;
  • à la nationalité d’immatriculation : depuis 2004, l’enquête relève la nationalité du véhicule tracteur (la semi-remorque) et celle du véhicule porteur (la remorque ou la semi-remorque). Jusqu’en 1999, elle relevait uniquement la nationalité du véhicule porteur, solution simple qui est néanmoins la plus pertinent s’il s’agit de rendre compte de la direction de la marchandise. Néanmoins, puisque les enquêtes TRM (Transport routier de marchandises) en France relèvent, sur la base de la Directive européenne103, la nationalité du véhicule tracteur, il y avait un problème de comparabilité entre les deux enquêtes françaises qui a motivé l’introduction de la nationalité de la semi-remorque dans CAFT ;
  • à l’année d’immatriculation du véhicule : l’enquête 1999 relevait le kilométrage au compteur au lieu de l’année, mais il s’agit dans les deux cas de mesurer l’ancienneté du véhicule, dans un souci de prise en compte des préoccupations environnementales.

Pour les trajets des véhicules, l’enquête relève les données relatives à :

  • l’origine et la destination du trajet : les camionneurs doivent indiquer le point de chargement et de déchargement de la marchandise (lorsque les lieux de chargement/déchargement sont multiples, c’est le lieu de la marchandise principale transportée qui est pris en compte). Pour rendre compte des pratiques d’intermodalité, dans le questionnaire il est demandé aux conducteurs d’indiquer si sur le trajet il y a un lieu de changement de mode et, le cas échéant, de préciser lequel (centre routier, de transport combiné avec un port ou un aéroport etc.). Cependant, ce type d’enquête réalisé auprès des chauffeurs montre des limites importantes en ce qui concerne la prise en compte de la multimodalité et la reconstruction des parcours complets des marchandises. En effet, la tentative a été faite en 1999 de demander aux conducteurs l’origine initiale et la destination finale de la marchandise transportée, au-delà du simple trajet routier enquêté. Cela a produit des estimations des trajets multimodaux trop faibles et de nombreuses erreurs (des O/D, par exemple, allant dans le sens inverse par rapport au sens du trajet…). Ainsi, concernant les trajets, l’enquête CAFT se limite à fournir les informations relatives aux parcours routiers enquêtés aux points de franchissement alpins, en indiquant le point de chargement et de déchargement des marchandises qui traversent les Alpes. Compte tenu de l’évolution des pratiques d’organisation des acheminements, avec le développement des trajets « par étapes », sur lesquels une semi-remorques est prise en charge successivement par plusieurs chauffeurs sur des distances de 3-400 km (Klein et Sutto, 2007), les limites de ce modes opératoires risquent de nuire de plus en plus à la qualité des informations recueillies, sans qu’une solution à la fois simple de mise en œuvre et fiable se dégage.
  • l’itinéraire parcouru entre l’origine et la destination : il s’agit d’une spécificité de l’enquête française, que les enquêtes suisses et autrichiennes ne prennent pas en compte. Un camionneur sur deux doit indiquer sur une carte d’Europe la description de l’itinéraire parcouru par la marchandise.

Pour les marchandises, elle relève :

  • le tonnage ;
  • la catégorie de la marchandise transportée, décomposée en 33 catégories, plus l’identification des matières dangereuses.

En outre, d’autres questions sont posées aux chauffeurs concernant le pays d’achat du carburant, la détention d’un abonnement pour le passage au tunnel (depuis 2004) et la conduite en double équipage (depuis 2004).

Les données issues de ces enquêtes permettent d’obtenir deux types d’informations. En premier lieu, pour chaque passage alpin on peut connaître la composition des flux qui le traversent et, surtout, les origines et les destinations de ces flux à un niveau de détail NUTS 2 (correspondant aux régions) et NUTS 3 (correspondant aux départements français et aux province italiennes) 104. La carte suivante illustre les origines et destinations des flux en transit par le Mont Blanc en 2004 à un niveau de détail NUTS 2.

Fig. 57 – Les origines et destinations par passage alpin : le cas du Mont Blanc en 2004
Fig. 57 – Les origines et destinations par passage alpin : le cas du Mont Blanc en 2004

Source : Osservatorio Tecnico Virano (2007)

Ensuite, l’ensemble des données issues de l’enquête est saisi sur un système d’information géographique (ArcInfo), qui permet de visualiser sur n’importe quel point de la carte la quantité de poids lourds qui passent et les tonnages en transit, ainsi que les caractéristiques physiques des véhicules, leur nationalité et le type de marchandises transportées.

Fig. 58 – Les trafics routiers aux passages alpins relevés par les enquêtes CAFT
Fig. 58 – Les trafics routiers aux passages alpins relevés par les enquêtes CAFT

Source : BMVIT (Ministère des Transports, de l’Innovation et de la Technologie autrichien)

Notes
101.

Voir note de bas de page n. 104.

102.

Pour l’instant, contrairement à la Suisse et à l’Autriche, il n’y a pas d’enquêtes sur l’AFA, le service d’autoroute ferroviaire expérimental en fonction entre la France et l’Italie depuis 2003. Les données actuellement disponibles sont uniquement celles provenant des comptages de la SNCF. Le choix de ne pas réaliser une enquête spécifique sur l’AFA dépend du fait que le trafic sur cet axe était jusqu’à présent modeste et très spécifique (uniquement des camions citerne). Pour la vague d’enquête de 2009, une enquête spécifique sera probablement mise en œuvre pour tenir compte de la montée en charge du service de l’AFA.

103.

L’enquête TRM a été mise en conformité avec le règlement européen relatif au relevé statistique des transports de marchandises par route (CE n° 1172/98 du Conseil du 25 mai 1998).

104.

La nomenclature des unités territoriales statistiques (NUTS) a été établie par Eurostat (Office statistique de l'Union européenne) en 1981. Elle a été créée dans le but de disposer d'un schéma unique et cohérent de répartition territoriale pour l'établissement des statistiques régionales et l'application des politiques régionales de l'Union européenne. La nomenclature des unités territoriales statistiques (NUTS) n'est définie que pour les Etats membres de l'Union européenne. Une codification des régions statistiques a été réalisée pour les pays qui composent l'Espace Economique Européen (EEE) ainsi que pour la Suisse.

Cette nomenclature se structure selon trois niveaux: NUTS 1, NUTS 2 et NUTS 3. Chaque Etat (NUTS 0) est ainsi divisé en une ou plusieurs régions NUTS 1 (macro-régions ne correspondant pas forcement à un découpage administratif national), lesquelles sont divisées en une ou plusieurs régions NUTS 2, et de même avec les régions NUTS 3 (correspondant au niveau départemental en France).