L’engagement des proches à l’égard du détenu comporte également un coût relationnel dans le sens où il peut s’accompagner de ruptures de leurs liens familiaux et sociaux. En effet, nous avons montré précédemment comment le temps saturé des proches limitait fortement leur possibilité de voir leurs amis ou leur famille. Par ailleurs, le chapitre 5 a également mis au jour comment les proches pouvaient être mis à l’écart en raison du soutien qu’il apporte au détenu. Ainsi, Patricia a rompu les liens avec ces parents qui refusent de l’aider si elle ne divorce pas de son mari incarcéré. De même, les frères et sœurs de Martine ne souhaitent plus la rencontrer si elle continue à soutenir son fils détenu. Eléonore a également pris ses distances avec ses sœurs comme l’atteste son récit présenté dans la partie précédente de ce chapitre.
De rares enquêtés affirment soutenir leur proche détenu sans rien attendre en retour.
‘Je lui apporte peut-être de l’aide mais je ne le fais pas en sacrifiant quelque chose, si je ne peux pas le faire, je ne le fais pas. Si je le fais, je ne demande rien en échange. [Odile, 60 ans, compagne d’un détenu écroué en MC, perpétuité, 22e année, en couple depuis 17 ans.]Cependant, dans bien des entretiens, on observe une attente de réciprocité et une valorisation de soi dans l’engagement réalisé : l’engagement « gratuit »892 est rare.
DOUGLAS M., « Il n’y a pas de don gratuit. Introduction à l’édition anglaise de l’Essai sur le don de Marcel Mauss », La revue du M.A.U.S.S., n°4, 1990, pp. 99-115.