Annexe IV. Quelques autres documents

Document IV.1. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Rapport d’activité 2008

Extrait du chapitre 1 « Bilan d’activité du Contrôleur général des lieux de privation de liberté en 2008 », p 24

3.4. Les relations avec la famille

Malgré ses efforts, le système pénitentiaire a de mauvaises relations avec les familles de détenus, auxquels pourtant le droit au respect de la vie familiale est, autant que possible, garanti. Il y a là évidemment un effet structurel : les familles n’ont pas de motifs particuliers d’avoir dans leur estime ceux qui, pensent-elles, retiennent en prison un proche, pas davantage que le juge qui l’y a condamné. On conçoit bien que les relations soient souvent a priori tendues. Mais l’administration pénitentiaire, sans même évoquer ici les difficiles problèmes d’affectation dans les établissements et le rapprochement du détenu et des siens, ne se donne pas suffisamment les moyens de briser cette méfiance.

L’organisation des entretiens entre les familles et les détenus (bornes automatiques de prises de rendez-vous compliquées et d’ailleurs souvent en panne, accueil téléphonique quasi-inaccessible et, lorsqu’on y accède enfin, très rude de contact) tout comme l’organisation matérielle des parloirs (salle commune ou boxes minuscules souvent peu entretenus, peu propices à l’intimité – alors que les détenus sont fouillés après chaque parloir –, durées courtes), l’absence sauf exception de points de contact plus chaleureux (rares « unités de vie familiale », salles pour contacts avec de jeunes enfants peu nombreuses), la relation quelquefois sèche entre visiteurs et personnels (pourquoi les premiers sont-ils encore fréquemment appelés par les seconds par leur seul patronyme, à l’exclusion des formules de politesse « Monsieur » ou « Madame » ?) fait de ces rencontres déjà tendues par leur caractère d’exception, leur brièveté et les propos qui s’y échangent des moments qui peuvent être vécus comme agressifs par les détenus, les familles et les surveillants. Il s’agit de promouvoir exactement l’inverse.

Surtout, les échanges par un tiers des événements qui affectent ou bien le détenu, ou bien sa famille, ne se font pas ou mal. Le départ vers un autre établissement de la personne sous main de justice, son transfert à l’hôpital, quand ce n’est pas son décès, ne sont pas toujours portés à la connaissance des familles, dès lors qu’il y a encore controverse pour savoir à qui revient ce rôle. On sait que bien des proches se présentent à un parloir pour y apprendre que le détenu est parti, sans davantage d’indications. Inversement, les événements familiaux (naissance, maladie, décès, ou tout simplement absence au dernier moment à un parloir prévu) ne sont pas connus du détenu autrement que par le courrier (ouvert bien sûr). Pas de message possible, de boîtes vocales, de billets à porter au dernier moment. Parfois des radios locales prennent l’initiative de diffuser des messages des familles à destination des détenus. Évidemment pas l’inverse. Mais ces initiatives louables, associatives ou privées, sont loin de couvrir l’étendue des problèmes. Ces silences, auxquels il pourrait être porté remède, ne portent pas seulement une atteinte qui apparaît peu justifiée au respect du droit à une vie familiale. Ils sont évidemment générateurs de tensions supplémentaires qui pourraient être facilement évitées et qui sont le résultat de questions comme celles-ci : « Mon épouse n’est pas venue au parloir aujourd’hui. Pourquoi ? », ou encore : « J’apprends au parloir que mon fils détenu est parti à l’hôpital et je ne sais pas ce dont il souffre ».

Gagner, si difficile que ce soit, l’estime des familles facilite sans aucun doute la vie en détention, dans le respect des droits de la personne. Les surveillants y sont très généralement sensibles. Il faut leur en donner la mission et les moyens, de même qu’aux conseillers d’insertion et de probation.