I.1.1.3. Image de soi et Identité personnelle et/ou sociale

Dans ces lignes, nous nous efforcerons d’expliquer le concept d’identité et son rapport à « l’Image de soi ». Mais avant cela, nous allons préciser la définition de l’identité.

L’identité est une notion qui exprime la résultante des interactions complexes entre l’individu, les autres et la société. Elle s’échafaude comme une construction représentative de soi dans son rapport à l’autre et à la société. L’identité est ainsi la conscience sociale que l’individu a de lui-même, dans la mesure où sa relation aux autres confère à sa propre existence des qualités particulières. De ce fait :

‘L’identité est, dans une large mesure, une actualisation au niveau individuel d’un certain nombre de composantes sociales ; cela implique une définition de soi par les autres et des autres par soi-même, c’est-à-dire qu’il s’agit de découvrir qui l’on est pour soi-même et pour les autres, et qui sont les autres pour soi. (Laing in G. N. Fisher, 1996, P.75).’

L’identité englobe ainsi certaines dimensions de la réalité sociale telles que la représentation ou l’influence sociale. Elle indique comment ces phénomènes s’incorporent à la personnalité, pour constituer le noyau dur de ce que l’individu pense, de la manière dont il se représente les autres et dont il évalue sa propre position. C’est donc le produit des processus interactifs mis en œuvre entre l’individu et le champ social et non pas seulement un élément des caractéristiques individuelles. L’identité est une dimension de la relation sociale actualisée dans une représentation de soi.

Dans le même ordre d’idée, A. Mucchielli (1994) précise :

‘Les schémas (identité culturelle, groupale, objective, professionnelle, etc.) qui nous permettent d’interpréter la réalité sociale, contribuent, dans le même temps, par un processus de comparaison sociale, à forger la représentation que nous nous faisons de nous-mêmes et à façonner notre propre conduite : […] En effet, en fonction de notre propre représentation identitaire, nous nous conformons inconsciemment à ce que socialement nous pensons devoir être. C’est ainsi que les codes sociaux sont partagés et la vie sociale facilitée. » (p. 37).’

La théorie de l’identité sociale de Tajfel & Turner est plus expérimentale.

‘Cette approche présente l’identité sociale comme étant liée aux aspects individuels du concept de soi, basée sur l’appartenance à des groupes sociaux. Dans ce cadre, l’identité est associée à une certaine ‘positivité’ attachée à soi et aux divers groupes auxquels l’individu appartient. (KOUMBA ibid., pp. 71-72). ’

Les groupes auxquels l’individu appartient vont, en quelque sorte servir de cadre de référence dans la constitution de soi. Aussi, constatons-nous que l’Image de soi réfère bien à deux catégories de données : les attributs pouvant être considérés comme personnels et les attributs collectifs renvoyant à l’identité sociale.

L’Image de soi peut renvoyer à l’identité sociale lorsqu’elle se réfère au soi déclaratif, réflexif, c’est-à-dire au discours du sujet sur lui-même. Dans ce cas, le soi déclaratif, réflexif renvoie aux attributs du « Soi » valables pour un ensemble de groupes sociaux et à l’Image de soi, lorsqu’elle permet de rendre compte de l’identité personnelle et sociale. Par conséquent, l’image que l’individu a de lui-même devrait être en concordance avec l’identité du groupe car, justement, chacun trouve auprès de lui les caractéristiques qui permettent de s’auto définir.

La définition de l’identité que nous adopterons comporte deux pôles :

  1. le pôle individuel, traduit par le concept de « Soi », c’est-à-dire les caractéristiques individuelles que quelqu’un s’attribue et qui lui permettent de se dire et de montrer qui il est ;
  2. le pôle social, défini par le système des normes sociales qui s’exprime, d’une part, à travers l’ensemble des rôles auxquels un individu se conforme pour répondre aux attentes des membres d’un groupe social ou d’une situation donnée et, d’autre part, à travers l’expression d’une appartenance à un groupe social.

Par rapport à ce champ notionnel, la forme des traits que les sujets s’attribueront constituera la notion « d’Image de soi » que nous retiendrons. Elle se forme par références personnelles et elle peut être construite en fonction des modalités d’affirmation de soi et du désir d’accomplissement (intentionnalité). Dynamique, cette image comporte des fluctuations et des reformulations qui s’originent dans un certain nombre d’événements de la vie d’un individu.

Par ailleurs, des références identificatoires, liées aux expériences partagées avec les autres acteurs en fonction des « situations sociales qu’affronte l’individu », entrent dans la construction et les caractéristiques de l’Image de soi relative, interactive, fonctionnelle et structurée.

Dans le domaine des mécanismes d’identification, de formation et de changement de « l’Image de soi », les travaux récents de Th. Koumba (ibid.) suggèrent une attribution et une estimation des images de soi, variables, selon les groupes d’appartenance. Nous devons à ces travaux d’avoir apporté des précisions sur les fonctions possibles de l’identification dans le processus de formation de ladite image. En effet, cet auteur présente l’identification à autrui comme indispensable à la formation de « l’Image de soi ». Ainsi considérée, l’Image de soi est le fruit de l’interaction de l’individu avec le milieu auquel il doit se conformer, au moins en partie : respecter des cadres. Mais, l’individu reste un sujet distinct, unique, ayant ses propres besoins, des capacités personnelles de penser et d’agir en toute indépendance et ce, malgré une mise en conformité aussi poussée soit-elle. 

Par conséquent, « l’Image de soi », dépend fortement du regard et des évaluations que les autres portent sur l’individu, et l’individu sur lui-même, bien sûr. En définitive, l’Image de soi que nous étudions est celle que l’individu se forge par le canal d’identifications successives ; elle renvoie aux caractéristiques qu’il s’attribue, aux informations relatives à la connaissance individuelle. Elle se constitue sur la base de l’évaluation que le sujet se fait de lui-même dans les différentes situations auxquelles il est confronté. Il existe donc de multiples images de soi, influencées par le champ collectif dynamique. « L’Image de soi » est donc susceptible de modifications et de changements.