I.1.2.4.2. Soi, un objet comme un autre

J. P. Codol (1980) fut celui qui posa explicitement ce postulat. Il propose l’hypothèse selon laquelle ce soi est appréhendé comme n’importe quel objet : « l’idée première, c’est que la façon dont un individu s’appréhende cognitivement lui-même met en œuvre des processus de même nature que ceux qui régissent toute appréhension cognitive » (p. 154). Il retient trois éléments essentiels dans la perception de l’objet :

Ces deux premiers éléments, bien qu’étroitement liés, sont distincts comme le souligne le Philosophe P. Ricoeur (1990) dans une perspective phénoménologique. Car, à travers le premier, l’identité signifie l’ipseité, c’est-à-dire l’unicité, la singularité et la spécificité de chaque individu et, à travers le second, c’est l’identité à soi-même (idem) qui est affirmée et donc, essentiellement, la permanence dans le temps. Il a été fait de l’ipseité une identité « numérique » et de l’idem, une identité « qualitative ».

Ces deux affirmations ne sont pas réductibles l’une à l’autre, même si elles interfèrent dans la subjectivité du sujet. La manifestation de cette interférence se reflète dans le caractère qui est un ensemble des marques psychologiques distinctives propres à un individu et dotées d’une certaine stabilité situationnelle et temporelle. Le caractère est constitué, selon E. Marc (2005) de dispositions durables à partir desquelles une personne est reconnue ; ces dispositions naissent d’habitudes acquises, de modes de réaction répétitifs qui viennent se sédimenter sous la forme de traits de caractère : « […] c’est cette sédimentation qui confère au caractère la sorte de permanence dans le temps que j’interprète ici comme recouvrement de l’ipse par l’idem » P. Ricoeur (p. 146). Ce recouvrement est le fait du sujet mais aussi de sa perception propre d’autrui qui peut s’exprimer, toujours selon P. Ricoeur, dans des énoncés du type : « c’est bien lui… toujours le même, il n’a pas changé », montrant que le sujet est identifié à partir de certaines attitudes et certaines formes de comportement.

Il semble donc, comme l’écrit E. Marc (2005), que le soi, s’il est abordé en extériorité et dans ses caractéristiques les plus simples, puisse être appréhendé comme n’importe quel objet et en revêtir les attributs essentiels, même si notre position serait plus nuancée (cf. supra, § I.1.2.4.1).

.Pour résumer ce qui précède, voici quelques propositions essentielles, fortement reliées entre-elle et sous-jacentes des postulats évoqués :

Face à ces postulats, E. Marc (2005) propose trois hypothèses qui en sont le contre-pied :

Pour étayer ces trois affirmations, E. Marc se place dans une perspective phénoménologique qui, selon lui, peut apporter la réflexion la plus approfondie sur les phénomènes de conscience, sur la subjectivité et l’expérience de soi.

Au terme de ce développement, la notion d’Image de soi peut donc être définie comme une évaluation ou réflexion sur soi. En d’autres termes, elle peut être considérée comme un jugement sur soi à l’issu duquel un affect est ressenti. L’affect ressenti peut être traduit par un sentiment de satisfaction plus ou moins grand. C’est dans cette perspective qu’un lien peut être évoqué entre ce concept et celui de la satisfaction. En effet, selon Porac (1987), la satisfaction est un jugement basé sur l’affect lié à la satisfaction au travail des employés, dans le cadre d’étude où nous nous situons. Cet auteur considère deux types d’évaluation de la satisfaction : des évaluations primaires, axées sur l’affect immédiat et des évaluations secondaires, conatives/cognitives, consécutives à une réflexion sur soi. Nous allons approfondir la définition de cette notion dans le chapitre qui suit.