2. Un véritable racisme anti-Français

Le racisme anti-Français (et dans une large mesure anti-occidental) dans le roman s’exprime en trois temps : par la mise en exergue des querelles européennes, l’accentuation du côté négatif des ressortissants français (tous les coopérants français ne sont tout de même pas – et exclusivement – racistes !), et la prononciation d’un discours de rejet à leur encontre.

D’abord par une opération extrêmement subtile : dévoilement par le narrateur des rivalités entre Européens pas seulement en terre européenne mais également dans l’Océan Indien lesquelles ne les empêchent pas de se liguer contre les Comoriens. Conclusion péremptoire : les Européens ne sont capables que de haine pour eux-mêmes et – a fortiori– pour les autres ! Deuxième temps moins fin mais non moins violent : la chanson entonnée par les sœurs de Kassabou contre Aubéri :

‘« Un Mzungu [un Blanc] lucide nous dit un jour :
Les meilleurs nous les gardons chez nous
Dans les lointaines mers envoyons les sidéens
Les bagnards, les démunis, la raclure et les infidèles
Les vieux garçons, les vicieux et les vieilles filles⁶⁶⁷ »’

Passons sur le fait que peu de lycéens comoriens sont capables d’écrire des vers si claires et si élégants. C’est clairement ici, à n’en pas douter une seconde, un règlement de compte formulé par un intellectuel comorien – le romancier lui-même ? – qui a été victime du racisme français.

Le véritable humanisme, celui qui met l’homme au centre de tout, ne peut en aucun cas être partisan : ni corporatiste, ni régionaliste, ni nationaliste ni ethnique. Il condamne les dérives humaines d’où et à quelque moment qu’elles viennent. Il ne peut y avoir un racisme occidental intolérable et un autre doux et gentil parce que provenant des autres, fussent-ils les dominés même si « Le meilleur moyen de combattre [tous les racismes] est que les Blancs renoncent au leur⁶⁶⁸. »