C. 24 octobre 1927 : l’APCA, invention ou « re-création » 644 institutionnelle ?

Alors que la loi du 3 janvier 1924 ne prévoyait pas d’échelon national aux chambres d’agriculture – celles-ci sont incitées à « se constituer en unions, sous le titre de chambres régionales », mais seulement autorisées à « correspondre, par leur président, sur les questions qui sont de leur compétence […] avec les autres chambres d’agriculture » 645, ce qui a pu faire dire que leur « union sur le plan national [était] implicitement interdite » 646 – Joseph Faure aurait vite ressenti « la nécessité de mettre un trait d’union entre toutes les chambres d’agriculture en organisant une assemblée des présidents ou délégués des diverses chambres départementales » 647. Il l’exprime dans ses mémoires : « Leur première session s’ouvrit immédiatement après les élections, en mars 1927. Après avoir constitué leur bureau, elles abordèrent l’étude des questions intéressant la culture et l’élevage et émirent des vœux pour favoriser les populations rurales ainsi que pour développer et améliorer la production agricole. Leur travail accompli très sérieusement fut fort apprécié, mais les résolutions présentées aux pouvoirs publics manquaient un peu d’harmonie pour l’ensemble des compagnies qui n’avaient eu aucun rapport entre elles » 648.

À la préfecture d’Albi, salle du conseil général, les membres de la chambre d’agriculture du Tarn sont rassemblés pour une session extraordinaire le 24 septembre 1927 : le président, Germain Thermes, « communique à la chambre l’invitation de M. le sénateur Faure, président de la chambre d’agriculture de la Corrèze, pour la réunion générale des Présidents des Chambres d’Agriculture de France qui aura lieu à Paris, le 24 octobre » ; dans la foulée, la chambre désigne son président comme délégué pour la représenter à Paris, vote le remboursement des frais de déplacement, se prononce pour l’organisation de telles réunions deux fois par an, tandis qu’un membre « demande que, dès la séance du 24 octobre, la question du budget soit soumise aux Pouvoirs publics » 649. L’absence de la correspondance antérieure à 1949 dans les archives de l’APCA a rendu impossible l’analyse des réactions de l’ensemble des membres des chambres ou tout au moins de leurs présidents, au-delà de la consignation dans les procès-verbaux d’un acquiescement convenu. Aussi doit-on s’en tenir au récit de Joseph Faure qui mentionne « l’enthousiasme de la presque totalité des intéressés » 650, et relatera ensuite une seule réaction dubitative, de la part d’un président qui lui aurait adressé cette question : « allons-nous nous réunir à Paris pour prononcer des laïus, ou pour travailler ? » 651.

Notes
644.

Alain CHATRIOT et Claire LEMERCIER, « Une histoire des pratiques consultatives de l’État », article cité, p. 194.

645.

Journal officiel, 4 janvier 1924, Loi du 3 avril 1924, articles 39 et 26.

646.

Luce PRAULT, Paysans, votre combat ! Essai d’Économie …, ouvrage cité, p. 98.

647.

Joseph Faure, 1875-1944 … ouvrage cité.

648.

Joseph Faure, 1875-1944… ouvrage cité, p. 30.

649.

Arch. CA Tarn, Procès-verbal de la séance du 24 octobre 1927. (Document aimablement communiqué par Mme Elisabeth Cadars, du centre de documentation de la chambre d’agriculture du Tarn).

650.

Joseph Faure, 1875-1944… ouvrage cité.

651.

APCA, Séance du 24 octobre 1927. Compte rendu, p. 2.