Chapitre 4. 1948-1952, la « résurrection »  1766 des chambres d’agriculture

Le 26 juin 1948, une circulaire est adressée à chaque président de chambre d’agriculture : elle est signée des président, vice-président et secrétaire général de la chambre d’agriculture de la Dordogne, Eugène Monjoin, Abel Maumont et Étienne Mineur. « Étant donné la situation actuelle de l’Agriculture, [ils disent croire] que le moment est favorable pour attirer l’attention des Pouvoirs Publics et du Parlement sur les Chambres d’Agriculture ». Les auteurs de ce texte exposent que « ces Organismes, supprimés par le régime de Vichy le 2 novembre 1940 […] n’ont pas été remises [sic] en activité à la Libération bien qu’une ordonnance d’Alger de 1944 les eut rétablies ». Ils considèrent les chambres d’agriculture comme les « organes représentatifs et consultatifs des intérêts agricoles auprès des Pouvoirs Publics, élus au suffrage vraiment universel par 4 millions d’électrices et d’électeurs agricoles, constituant par leur Assemblée des Présidents un véritable parlement de l’Agriculture, supprimées par Vichy à cause de leur mode de recrutement jugé trop démocratique, et aussi à cause de leur indépendance et de leur ténacité dans la défense des intérêts agricoles ».

Ils s’affirment ainsi clairement pour leur reprise d’activité, estimant « que l’existence des Chambres d’Agriculture à côté de la CGA est aussi normale que l’existence des Chambres de Commerce et des Métiers à côté des divers Syndicats patronaux et ouvriers des diverses professions industrielles commerciales et artisanales et des grandes centrales syndicales, CGT, FO, CGTC, et CGPT ». La circulaire se clôt en forme de questionnaire. Il est demandé aux présidents des chambres d’agriculture : « Êtes-vous d’avis que les Chambres d’Agriculture doivent reprendre leur activité comme par le passé ? Désirez-vous que notre réponse soit transmise par l’intermédiaire de la Chambre d’Agriculture de la Dordogne aux Pouvoirs Publics et aux Parlementaires ? Ou préférez-vous une action individuelle de chaque Groupement ? ». Les présidents qui jugeraient « qu’il est utile et opportun de saisir les Pouvoirs Publics d’une pétition collective pour obtenir que les Chambres reprennent la place qu’elles n’auraient jamais dû perdre ou qu’elles auraient dû reprendre dès que notre Pays fut redevenu libre » sont appelés à remplir le questionnaire et à l’adresser à Abel Maumont, vice-président de la chambre d’agriculture de la Dordogne « chargé de centraliser les réponses » 1767. Autorisons-nous une digression afin de présenter le vice-président de la chambre d’agriculture de la Dordogne, ainsi propulsé à la tête du mouvement de réveil des chambres d’agriculture.

Notes
1766.

Selon l’expression de Luce PRAULT, Mort et résurrection des Chambres d’Agriculture… ouvrage cité. Selon le Robert, ce terme désigne l’action de ressusciter, le retour de la mort à la vie, mais également, par analogie, une guérison inattendue, ainsi que le retour à l’existence, à l’activité, un nouvel essor, parfois avec l’idée de progrès. La dimension religieuse de ce mot n’est pas anodine, non plus que l’acception passive qui peut en être donnée. Nous verrons qu’au contraire, dans l’histoire des chambres d’agriculture, cette « résurrection » n’a rien de magique et procède d’un lent, laborieux et patient travail d’activation et de réactivation de réseaux, de difficiles négociations et de stratégies organisationnelles et politiques complexes.

1767.

Arch. APCA, CA Creuse à Dordogne, 1949-1965, copie de la circulaire adressée par la chambre d’agriculture de la Dordogne, aux présidents des chambres d’agriculture, le 26 juin 1948. Voir Annexes. Dossier n° 6. Document 1.