Joseph Desnoyés, vice-président

[Joseph Desnoyés, vice-président 2264]

Joseph Desnoyés est né en 1876 à Thuir (Pyrénées-Orientales) dans une « vieille famille roussillonnaise » 2265. Ce premier prix de français au concours général prépare dès 1896 à la Faculté de médecine de Montpellier, une thèse sur les courants de haute-fréquence d’Arsonval. Lauréat de l’Académie des sciences et du Prix Pourrat en 1903, il exécute le premier cliché radiographique de Montpellier, « un des premiers du monde » 2266. En 1904, il épouse Léonie de Lamer, fille de Paul de Lamer, médecin et membre de la Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales dans les années 1880-1890 2267, petite-fille du préfet Jules de Lamer, liée à la famille Pujade qui fonda les thermes du même nom à Amélie-les-Bains 2268, enfin arrière-petite-fille du député et sénateur de la gauche républicaine Paul Massot, chirurgien à l’hôpital civil de Perpignan 2269.

En 1907, il aurait « particip[é] sans réserve aux émeutes de Narbonne, de Béziers et de Montpellier » 2270, mais c’est à sa carrière de médecin radiologue qu’il se consacre jusqu’en 1914, notamment en fondant un Syndicat de radiologues à Béziers 2271. « Toute la guerre 1914-1918 le vit au service des blessés et la croix de la Légion d’honneur récompensa les mérites militaires du Docteur Denoyés, médecin commandant honoraire » 2272. En 1919, il devient président du Syndicat médical de Perpignan, mais il interrompt ses travaux d’électro-radiologie quand il doit être opéré, « la radiodermite dont il était atteint, ayant fortement altéré sa santé » 2273 comme celle de nombreux « pionniers de cette branche nouvelle de l’art médical » 2274 : durant les années suivantes, il continue d’exercer la médecine dans son cabinet du 12 rue Castillet, à Perpignan.

Ce serait en 1935, pendant la crise de surproduction du Midi viticole, alors qu’il est en « demi-retraite », qu’une délégation de vignerons serait venue le « supplier de prendre leur tête pour secouer les pouvoirs publics » : son bureau médical devient le lieu où s’organise le Syndicat des vignerons des Pyrénées-Orientales 2275 dont Joseph Denoyés préside la commission d’études 2276. Il participe à l’élaboration du questionnaire présenté au congrès de Paris de la Fédération des associations viticoles, en juillet 1935, qui préfigure le Statut viticole de cette même année, notamment la question du financement des récoltes 2277. Élu en février 1939 à la chambre d’agriculture sur une liste proposée au suffrage des agriculteurs de la circonscription de Perpignan 2278, il en est aussitôt désigné vice-président 2279. Le 27 janvier 1941, suite au décès d’Augustin David-Gastu, président de la Fédération des syndicats agricoles du Midi 2280 et de la Société coopérative de distillation La Catalane 2281, Joseph Denoyés est élu président de la chambre d’agriculture, à l’unanimité 2282 : il a alors 65 ans.

Le Syndicat des vignerons des Pyrénées-Orientales est considéré comme « organisation prépondérante » par la Commission d’organisation corporative paysanne (COCP), et c’est Henry Vidal, son président, également conseiller national de Vichy et membre de la COCP, qui est désigné comme « délégué responsable » pour le département : dès le mois de juin, sur sa proposition, le comité régional d’organisation corporative (CROC) est constitué, et Joseph Denoyés en fait partie 2283. Le 2 décembre 1941, lors de l’assemblée générale constitutive de l’URCA, il en est choisi comme membre, « pour le crédit agricole et la viticulture » : en clôture de la réunion, dans une adresse au maréchal Pétain, les membres de l’Union régionale « se réjouissent que leur première assemblée soit marquée par une date où se rencontrent l’anniversaire de la Loi Caziot et l’impérissable souvenir d’une victoire que le soleil lui-même salua d’un éclat singulier et que l’Histoire de nos armes place au rang de ces prodiges militaires dont Verdun demeurera le plus émouvant » 2284. En janvier 1944, il est renouvelé dans ses fonctions 2285 et nommé membre de la future chambre régionale d’agriculture de Montpellier 2286.

En 1945, il préside la FDSEA des Pyrénées-Orientales 2287 et est réélu un an plus tard, sous le regard bienveillant du préfet, qui estime que bien qu’ayant été « l’un des dirigeants de la Corporation paysanne dans le département », il « ne s’est pas compromis sur le plan politique » 2288. Celui qui est désigné comme un « grand propriétaire », qui aurait « toujours été une des personnalités du mouvement agricole dans le département », occupe alors le fauteuil de président de la Confédération générale des vignerons 2289. Présent à la séance du 24 novembre 1948, il y déclare « son attachement au syndicalisme » et dit ne pas croire « que les chambres d’agriculture auraient intérêt à revendiquer les tâches de répartition exécutées par les conseils agricoles départementaux  2290 , mais elles doivent, au contraire, promouvoir le progrès agricole, et demander, en conséquence, à être chargées de cette mission » 2291 : lors de cette séance, il est désigné pour siéger parmi les 17 membres titulaires du CPG et élu vice-président de l’APPCA 2292. Joseph Denoyés tarde à réunir la chambre d’agriculture au printemps 1949, ce que ne manque pas d’inquiéter Luce Prault et ses soutiens : le 30 mai, il est absent de la réunion du comité permanent général, on évoque ses « inquiétudes en ce qui concerne des élections éventuelles » 2293. En 1951, il est l’un des cinq vice-présidents de la FNSEA, secrétaire général de la Fédération des associations viticoles de France, président de l’Union nationale intercoopérative du Tartre et président de la Caisse régionale de crédit agricole 2294. Impliqué dans la rédaction du projet de la « commission paritaire Chambres-CGA », prévue par l’Accord national agricole de février 1951 et qui doit statuer sur les modifications de principe à apporter à la loi du 3 janvier 1924 2295, il est réélu à la chambre d’agriculture en mars 1952, sur les listes des délégués des associations et syndicats agricoles 2296. Péniblement réélu au CPG, au 3e tour de scrutin, sans obtenir la majorité absolue, en rivalité avec Maurice de Solages, il est également confirmé dans ses fonctions de vice-président 2297 : le communiqué de la Confédération générale des vignerons du Centre et de l’Ouest (CGVCO), où leurs membres « expriment leur vive satisfaction de voir que la viticulture française est dignement représentée au bureau de l’Assemblée des présidents de chambre d’agriculture [sic] par un de ses deux vice-présidents, M. Desnoyés » 2298, et sa mise en exergue par Luce Prault suggère le caractère tactique du maintien au sein du bureau d’un représentant des organisations viticoles, âgé de 76 ans, qui plus est d’un méridional dont la sensibilité est héritée du « boulevard Saint-Germain ».

Notes
2264.

Voir Annexes. Dossier n° 7. 2. Dossier documentaire 3.

2265.

Les informations généalogiques sont issues de l’arbre constitué par ses descendants et mis en ligne sur : http://www.denoyes.com/

2266.

À la mémoire du docteur Joseph Denoyés, 1876-1957, Perpignan, Imprimeur du Midi, 1960, 77 p. (Discours du docteur Baillat, p. 28).

2267.

Bulletin de la société agricole scientifique et littéraire des Pyrénées-orientales, Perpignan, Imprimerie de Charles Latrobe, 1890, 218.

2268.

http://www.assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche.asp?num_dept=6538

2269.

Adolphe ROBERT, Gaston COUGNY et Edgar BOURLOTON, Dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889, Paris, Bourloton, 1889-1891, tome IV, notice de Paul Massot, p. 304.

2270.

À la mémoire du docteur Joseph Denoyés, 1876-1957, ouvrage cité, Discours de Joseph Sauvy, p. 20.

2271.

Ibidem. (Discours du docteur Baillat, p. 28).

2272.

Ibidem, p. 30.

2273.

« Le docteur Joseph Denoyés n’est plus », dans L’Agri... des Pyrénées-Orientales. Hebdomadaire de la coopération et du syndicalisme professionnel agricoles, n° 476, 7 mars 1957.

2274.

À la mémoire du docteur Joseph Denoyés, 1876-1957, ouvrage cité. (Discours du docteur Baillat, p. 28).

2275.

Ibidem. Discours d’Henry Vidal, pp. 59-61.

2276.

Arch. nat., AD XIX C 115 Pyrénées-Orientales, Chambres départementales d’agriculture. Travaux des chambres. Délibérations. Procès-verbaux des séances. Département des Pyrénées-Orientales, 1928-1943, Session de mai 1939.

2277.

À la mémoire du docteur Joseph Denoyés, 1876-1957, ouvrage cité. (Discours d’Henry Vidal, pp. 59-61).

2278.

Arch. APCA, CA Basses-Pyrénées à Pyrénées-Orientales, 1949-1965, Liste des membres à la suite de l’élection de février 1939, commentaires de 1949.

2279.

Arch. nat., AD XIX C 115 Pyrénées-Orientales, Chambres départementales d’agriculture. Travaux des chambres. Délibérations. Procès-verbaux des séances. Département des Pyrénées-Orientales, 1928-1943.

2280.

Arch. APCA, CA Basses-Pyrénées à Pyrénées-Orientales, 1949-1965, Liste des membres à la suite de l’élection de février 1939, commentaires de 1949.

2281.

Annuaire national agricole 1939, p. 648.

2282.

Arch. nat., AD XIX C 115 Pyrénées-Orientales, Chambres départementales d’agriculture. Travaux des chambres. Délibérations. Procès-verbaux des séances. Département des Pyrénées-Orientales, 1928-1943, Session extraordinaire du 27 janvier 1941.

2283.

Arch. nat, F10 4972, archives de la Corporation paysanne : organisation des Comités régionaux d’organisation corporative (classeur de fiches cartonnées)

2284.

Arch. nat., F10 5030, archives de la corporation paysanne, URCA Pyrénées-Orientales, procès-verbal de l’assemblée générale constitutive du 2 décembre 1941.

2285.

Arch. nat, F10 4972, archives de la Corporation paysanne, nouvelles listes des membres des URCA et du Conseil régional corporatif, 1944.

2286.

Journal officiel de l’État français, dimanche 13 février 1944, Arrêté du 29 janvier 1944 relatif à la constitution des chambres régionales d’agriculture, pp. 477-480.

2287.

Annuaire national agricole 1945, p. 240.

2288.

Arch. nat., F1a 4034 : Réponse des préfets à la circulaire n° 287 du Ministère de l’Intérieur sur la composition des fédérations départementales du syndicat des exploitants agricoles, février-mars 1946. Lettre du Préfet des Pyrénées-Orientales, 3 mars 1946.

2289.

Ibidem.

2290.

Une proposition de loi du groupe socialiste, déposée le 14 mai 1948, tendait à donner aux offices ou conseils agricoles départementaux, créés en 1919 et rétablis à la Libération, le statut et les attributions des anciennes chambres d’agriculture, ressuscitant un débat ancien. Voir Christiane MORA, « Les Chambres d’agriculture et l’unité paysanne », article cité.

2291.

Chambres d’agriculture, janvier-mars 1950, p. 6.

2292.

Ibidem, p. 8.

2293.

Arch. APCA, CA Gard, 1949-1965, double d’une lettre de L. Prault, directeur de l’APPCA, à A. Pallier, président de la chambre d’agriculture du Gard, le 20 juin 1949.

2294.

Guide national agriculture 1951-1952, p. 345.

2295.

Ibidem, CA Gironde à Hérault, 1949-1965, lettre de Maurice Chassant, président de la chambre d’agriculture de l’Hérault, à Luce Prault, le 19 mai 1951.

2296.

Ibidem, Procès-verbaux de sessions de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales, 1950-1957, liste de présence de la session du 23 mars 1952.

2297.

Chambres d’agriculture, avril-juin 1952, p. 38 et p. 40.

2298.

Arch. APCA, CA Basses-Pyrénées à Pyrénées-Orientales, 1949-1965, double d’une lettre de L. Prault, directeur des services de l’APPCA, à Joseph Denoyes, le 23 mai 1952.