Par vestiges, nous entendons non seulement l’expression issue de l’architecture et de l’archéologie, qui désigne les restes d’un ancien édifice, donc, au sens figuré, ce qui reste d’une chose qui n’est plus, mais également les acceptions rencontrées en biologie de l’évolution, où une structure vestigiale est un organe qui a perdu sa fonction originelle, voire en thermodynamique, pour laquelle « le vestige est un indice dont le sens ne peut être reconstruit que par et dans la diachronie d’une entropie : il est un objet saisi dans sa singularité dont la compréhension se construit à partir de l’établissement d’une différence entre l’objet d’origine imaginé ou reconstitué dont l’entropie est nulle et l’objet dans son aspect actuel dont l’entropie est forte ; l’entropie est utilisée ici sous son sens figuré, elle désigne une instabilité de la chose visée plutôt qu’une grandeur thermodynamique » 4343. Sans aller jusqu’à adopter les thèses de Michel Forsé, qui lie stabilité, ou équilibre, et désordre, en construisant des modèles statistiques 4344, il semble que se rapprocher de cette conception peut permettre à l’historien de souligner l’intérêt d’analyser une institution dans la diachronie, par-delà les seuls rocs mémoriels qui, seuls, déforment le regard. Ainsi, si les acteurs de l’AP(P)CA se sont toujours montrés insatisfaits de l’efficacité de l’activité consultative des chambres d’agriculture et de leur assemblée permanente, le volume d’activité et l’importance des moyens qui y étaient accordés a beaucoup varié, trahissant une forme de déconsidération. De même, l’image de l’APCA à la fin des années 1960 ne se comprend guère sans avoir abordé les trajectoires de ses acteurs depuis les années 1930.
Le Robert.
Michel FORSÉ, L’ordre improbable : entropie et processus sociaux, Paris, Presses Universitaires de France, 1989, 258 p.