Au début du 20e siècle, Lord Rayleigh7 a été le premier à expliquer comment l'être humain localise les sons. Le paramètre le plus important pour déterminer la position d’une source sonore est la différence entre les signaux sonores parvenant aux oreilles (Garcia, 2010). Les mécanismes de localisation directionnelle d’une source sonore permettent à l’audition de jouer un rôle important dans la perception de l’espace. Malgré une « résolution angulaire moins bonne que celle de la vision » (De Cheveigné, 2005, p. 83), elle offre un temps de réaction très court, reste fonctionnelle dans l’obscurité et renseigne sur des sources situées en dehors du champ de vision, grâce à la stéréoacousie. Par ailleurs, les sons de basse fréquence contournent les obstacles et se propagent, dans certaines conditions, sur de longues distances. Certains environnements, comme le milieu sous-marin, sont ainsi plus transparents aux sons qu’à la lumière (Bovet, Drake, Bernaschina & Savel, 1998).
L’information visuelle fournie par la rétine permet un traitement multicanal et spatialement riche. À l’inverse, l’audition dispose principalement des « différences d’intensité » et de « temps d’arrivée » des sons perçus par les oreilles. On parle de différences interaurales d’intensité et de temps d’arrivée (Blauert, 1997 ; Thompson, 1882 cités par De Cheveigné, op. cit.). Ainsi, un son provenant d’une source située hors du plan médian parvient à l’oreille opposée avec du retard (à cause d’un chemin acoustique plus long) et atténué (effet d’ombre de la tête). Les différences interaurales de temps d’arrivée et d’intensité déterminent donc conjointement ce que l’on appelle l’azimut 8. La perception des distances, chez l’individu privé de vision, se réalise principalement à partir d’indices sonores tels que :
Ces indices ne sont exploitables qu’à partir d’une certaine familiarisation et apprentissage en situation. Ce fonctionnement est particulièrement vrai dans le cas de sources auditives isolées. Or, la scène acoustique est souvent peuplée de sources nombreuses, variées et concurrentes, comme c’est le cas parfois dans l’environnement urbain : le mécanisme décrit pour une source isolée est alors difficile à transposer. Les scènes auditives complexes posent le problème de la ségrégation des indices de chaque source, qui sont superposés dans le signal acoustique perçu par les oreilles (De Cheveigné, 2005). La notion de « paysage sonore » (Murray Shafer, 1979) est un des éléments qui constitue « l’ambiance urbaine » telle que nous la définissons dans notre protocole expérimental.
Lord Rayleigh (1842-1919) était un physicien anglais, lauréat du prix Nobel de physique de 1904.
L’azimut est l'angle horizontal entre la direction d'un objet et une direction de référence. Cette référence est habituellement le nord géographique, à partir duquel on mesure l’azimut en degrés de 0° à 359° dans le sens rétrograde (sens des aiguilles d'une montre).