6.2. Représentation mentale du parcours

Plusieurs recherches ont montré que les personnes aveugles éprouvent des difficultés à construire une représentation spatiale précise de leur environnement uniquement à partir d’un déplacement in situ (Golledge, 1991, 1993 ; Spencer, Blades & Morsley, 1989). En effet, là où le système visuel permet de saisir rapidement des informations spatiales, les canaux sensoriels utilisés en l’absence de vision sont beaucoup moins efficaces.

Comme nous l’avons évoqué précédemment, de nombreuses études ont montré l’intérêt que représente l’utilisation d’un plan en relief dans les performances spatiales des sujets aveugles (Espinosa et coll., 1998 ; Jacobson, 1998 ; Luxton, Banai & Kuperman, 1994 ; Passini & Proulx, 1988). En particulier, Espinosa et coll. (op. cit.) ont montré que la prise de connaissance d’un environnement à l’aide un plan tactile couplé à « l’expérience directe » in situ offre, sous certaines conditions, de meilleures performances dans les déplacements. Récemment, Picard et Pry (2009) ont montré que l’utilisation d’une maquette, modèle réduitd’un environnement, permettait également une amélioration significative des performances spatiales des personnes aveugles et malvoyantes.

Dans cette recherche, nous avons retenu une option intermédiaire entre le plan tactile et la maquette pour présenter le trajet aux participants, à la suite de leurs deux premiers passages. Nous souhaitions ainsi faciliter le déroulement du trajet autonome par les marcheurs aveugles. L’entreprise EO-Guidage 34, concevant des aides techniques pour les personnes en situation de handicap, a gracieusement réalisé le plan tactile du quartier pour notre recherche. Cette maquette a été construite en résine acrylique. Des reliefs sont formés par une superposition de couches de matériaux : cela permet une présentation plus réaliste, avec, par exemple, le pont de la Guillotière qui apparaît effectivement surélevé par rapport aux berges du Rhône en contrebas. Des couleurs contrastées35 ainsi que des indications (noms de rues, etc.) figurent en « noir » et en braille sur ce support. Le tracé du parcours est représenté en creux sur ce plan. Plusieurs études rapportées par Picard, Lebaz, Jouffrais et Monnier (2010) rappellent que l’utilisation d’images tactiles de surface large (c.-à-d. 21 x29,7 cm) permet une exploration (et une identification) plus faciles, rapides et précises que sur des surfaces plus petites. Cette maquette possède des dimensions généreuses de 35 cm x 50 cm afin d’en faciliter la lecture. Une reproduction est présentée ci-dessous, figure 36.

Figure 36 : Plan en relief Tactiplan© (350 ×500 mm) utilisé en fin de session 3
Figure 36 : Plan en relief Tactiplan© (350 ×500 mm) utilisé en fin de session 3 (le nord se trouve à droite sur cette vue)

Notes
34.

http://www.eo-edps.fr

35.

L’utilisation de couleur est inutile dans le cadre de notre recherche qui concerne les personnes aveugles. Toutefois, dans le cas de personnes malvoyantes, l’utilisation de forts contrastes est très bénéfique.