1.1.1.3.2 Le processus d’ancrage

L’ancrage s’inscrit dans la continuité du processus d’objectivation, sans pour autant s’effectuer de manière indépendante. C’est un processus de classification et de dénomination du nouveau ou de l’inconnu, afin de le rendre significatif en l’intégrant à un cadre de référence préexistant, partagé par le groupe social (Gaskell, 2001 cité par Fortin-Pellerin). Moscovici (1961) évoquait à ce niveau l’image de « l’enracinement social » de la représentation dans un système de pensée préexistant (intégrants des croyances, des valeurs, des normes, des attitudes ou des opinions préalablement partagées par le groupe social). Pour Jodelet (1989, p. 73) : « l’ancrage sert à l’instrumentalisation du savoir en lui conférant une valeur fonctionnelle pour l’interprétation et la gestion de l’environnement ». Dans leurs travaux sur les représentations sociales, Palmonari et Doise (1986) résument pour leur part le processus d’ancrage par le fait de « mettre un objet nouveau dans un cadre de référence bien connu, pour pouvoir l’interpréter ». Cela permet à l’individu, entre autre choses, de transposer un élément inconnu dans un système de référence connu, afin d’en assurer sa maîtrise. Mais l’ancrage est aussi un processus double. D’un côté il permet l’assimilation d’un objet nouveau à une (ou des) représentation(s) sociale(s) préexistante, mais de l’autre côté, il repose également sur un principe de différentiation suffisant pour permettre et pour justifier la création d’une nouvelle représentation sociale, intégrée dans un réseau de significations antérieures, constitué par le système des valeurs saillantes pour le groupe social.

Pour Doise (1986), l’ancrage repose sur trois phases ou sous-processus :

Par ailleurs, comme le souligne Doise (1992 ; p. 189), « étudier l’ancrage des représentations sociales, c’est chercher un sens pour la combinaison particulière de notions qui forment leur contenu. Ce sens ne peut pas être défini par la seule analyse interne des contenus sémantiques d’une représentation : il se réfère nécessairement à d’autres significations régissant les relations symboliques entre acteurs sociaux. Autrement dit, la signification d’une représentation sociale est toujours imbriquée ou ancrée dans des significations plus générales intervenant dans les rapports symboliques propres à un champ social donné ». L’auteur identifie alors trois formes d’imbrications ou d’ancrage :