1.1.2.2.1 Définition de la notion d’identité individuelle (ou personnelle)

D’une façon synthétique, l’identité individuelle (ou personnelle) s’articule autour de la notion de « soi », et renvoie d’une part à la façon dont chaque individu se représente lui-même et d’autre part à la façon dont il se définira vis-à-vis d’autrui. Cela peut donc intégrer à la fois des traits physiques (se considérer comme grand ou petit, gros ou maigre, laid ou beau, etc.) et des traits de personnalités (se considérer comme gentil ou méchant, plus ou moins intelligent, ou d’un caractère impulsif versus calme, par exemple), mais cette identité individuelle intègre également l’image de soi à l’intérieur de groupes sociaux, le sentiment d’appartenance (ou au contraire de non appartenance) à ces groupes, ou à une culture particulière, ainsi que la représentation que l’on a de sa propre position ou de sa valeur à l’intérieur de ces groupes, ou de la société en général.

Moliner et al. (2008 ; p. 247) définissent l’identité individuelle à partir de trois dimension du « soi » : (1) la représentation de soi, (2) l’estime de soi, et (3) la représentation du contrôle.

La représentation de soi peut être assimilée à l’image de soi. En référence à Markus (1977), ces auteurs définissent (p. 247) la représentation du soi comme une structure stable, c’est-à-dire durable dans le temps, qui pousse l’individu à sélectionner les informations compatibles avec la représentation qu’il a de lui-même et à délaisser les autres.

L’estime de soi est intimement liée à la représentation de soi, mais elle traduit, selon Moliner et al. (2008, p. 247) «  la valeur qu’une personne s’accorde à elle-même par rapport à ses capacités personnelles et à l’opinion que les autres lui renvoient sur elle ». L’estime de soi sera donc directement influencée par les interactions avec autrui, qu’il s’agisse des autres membres des groupes sociaux auxquels l’individu appartient, ou qu’il s’agisse de l’image que ces groupe sociaux ont dans la société (par exemple, dans le cadre de cette recherche de Moliner, l’image sociale qu’ont les personnes âgées dans une société donnée, selon qu’elle est valorisante ou non, va affecter l’image que ces personnes auront d’elles-mêmes). Une bonne estime de soi est souvent un facteur favorisant une bonne intégration sociale. A l’inverse, une mauvaise estime de soi peut inciter certains individus à devenir membre de groupes sociaux ayant une mauvaise image dans la société, mais leur permettant ainsi de se valoriser à l’intérieur de ce groupe, contre ou en défiance de la société extérieure. Cela pourra alors conduire ces individus à adopter une attitude rebelle vis-à-vis de la société ou de groupes sociaux dominants, voire de s’engager dans une démarche de transgression délibérée, ou de délinquance, comme un moyen d’affirmation valorisante de soi, en réaction au rejet initial de la société.

La représentation du contrôle, enfin, renvoie ici à la notion de locus of control de Rotter (1966), c’est-à-dire aux croyances qu’a l’individu concernant le fait que les événements qui se produisent, ou qui sont susceptibles de se produire, dépendent soit de facteurs internes propres à lui-même (ses actions, ses efforts, ses capacités personnelles, etc.), soit au contraire de facteurs externes (le destin, le hasard, la chance, les décisions divines, ou les intentions malveillantes d’autrui ou de la société). Ainsi, « on qualifie de contrôle interne l’attitude de la personne qui s’attribue la responsabilité de ses comportements et de leurs conséquences, et de contrôle externe, l’attitude de celle qui attribue les conséquences à des facteurs externes à elle-même, les autres étant alors désignés comme sources de pouvoir [sur soi]. Le degré d’internalité ou d’externalité varie selon les situations ou la personnalité propre des individus » (Moliner et al., 2008; p. 247). Dans le cadre de notre recherche, cet aspect sera plus particulièrement considéré sous l’angle d’hypothèses de différences potentielles entre différents profils motocyclistes (en termes de profil personnel ou en termes de membre d’une communauté motarde particulière) concernant le rapport au risque routier, en situation de conduite. On s’interrogera notamment sur l’existence de différences interindividuelles ou intergroupes potentielles quant à la façon dont différentes populations de motocyclistes se sentent ou non responsable (sentiment d’implication) dans l’arrivé d’un danger ou d’un événement critique sur la route, ou, au contraire, adoptent une attitude plus fataliste, attribuant ce risque au hasard, à la malchance, ou à autrui (aux autres conducteurs, par exemple).