1.1.2.2.2 Définition de la notion d’identité sociale (ou collective)

Le concept d’identité social apparaît chez Tajfel et Turner (1979) qui en proposent la théorie suivante. Selon ces auteurs, l’identité sociale peut être définie comme la partie du soi qui serait le résultat de la conscience qu’à un individu d’appartenir à un groupe social particulier, ainsi que la signification et la valeur émotionnelle que cet individu accorde à cette appartenance. L’identité sociale est donc une dimension propre au sujet, mais qui se construit cependant à travers les interactions entre soi, autrui et la société, c’est-à-dire qu’elle se situe à l’intersection de processus psychologiques propres aux individus, et de relations interindividuelles situées dans un contexte sociétal, de groupes sociaux et de situations sociales particulières, dans lesquels les individus sont insérés (Deschamps, Morales, Paez et Worchel, 1999). Pour toute personne, en effet, l’intégration dans un groupe est un élément essentiel pour se construire une identité sociale et participe à la construction de soi (Doise et Lorenzi-Cioldi, 1991). Identité individuelle et sociale sont par conséquent étroitement imbriquées, et c’est même à travers cette interrelation que l’individu élabore ses propres représentations sociales et s’approprie des normes, des croyances et des valeurs collectives.

Comme le souligne Moliner et al. (2008 ; p. 248), en effet, « l’identité [individuelle] se construit à travers l’influence normative des groupes sociaux, ce qui signifie qu’appartenir à un groupe, c’est se conformer à ses normes et à ses valeurs. Les refuser, c’est prendre le risque d’être rejeté, d’être isolé. Mais si le fonctionnement normatif amène de la conformité intra-groupe, il peut aussi, dans l’éventualité d’une comparaison défavorable, amener de la différentiation à l’intérieur de ce groupe à partir de critères originaux de comparaison ». Cette conception sera développée par Codol (1975), pour qui un individu est sans cesse partagé entre deux pôles motivationnels : être conforme à ses pairs, d’un côté, pour pouvoir mieux se définir socialement, mais s’en différencier suffisamment, d’un autre côté, afin d’avoir aussi une identité propre. Selon cet auteur, il apparaît que, d’une façon un peu paradoxale, plus un individu adhère aux normes et aux valeurs de son groupe d’appartenance, et plus il aura aussi tendance à vouloir se distinguer des autres membres de ce groupe (Codol parle ici d’effet de Primus Inter Parses, signifiant littéralement « le premier entre les égaux »).

Par ailleurs, appartenir à un groupe social soumet plus ou moins fortement les membres du groupe à des pressions normatives qui contraignent parfois les personnes à modifier leurs attitudes, leurs jugements ou leurs comportements pour adopter celles et ceux du groupe d’appartenance (sous peine d’être exclues de ce groupe). Asch (1951) parlera de conformisme pour qualifier cette démarche d’adaptation de l’individu l’incitant à renoncer à une partie de son identité personnelle, voir à certaines de ses valeurs, face à la pression sociale que le groupe exerce sur lui.