1.1.2.2.3 Identité et processus d’identification au groupe

Dans la continuité des travaux de Tajfel (1972, p. 292) assimilant l’identité sociale d’un individu à « la connaissance de son appartenance à certains groupes et à la signification émotionnelle et évaluative qui résulte de cette appartenance », Turner (1981) a proposé une définition plus cognitive des groupes sociaux, entièrement articulée autour du processus d’identification. Cet auteur souligne tout d’abord « qu’un groupe n’existe que si au moins deux individus se définissent eux-mêmes comme faisant partie de ce groupe, et qu’un troisième individu reconnaît ensuite cette existence ». Ce faisant, Turner (1981) insiste sur la dimension subjective et cognitive du groupe : le groupe est ici considéré comme une « construction mentale » de soi, mais aussi d’un autrui appartenant au groupe, et d’un autrui situé à l’extérieur au groupe. Turner (1987) définit alors la théorie de l’auto-catégorisation, selon laquelle la compréhension des groupes sociaux et de leur formation nécessite de comprendre comment les individus se perçoivent, se définissent et se représentent eux-mêmes comme membre de ces groupes. L’auto-catégorisation est alors définie comme un processus cognitif d’identification à trois niveaux: celui de l’individu, celui du groupe, et celui de l’Espèce humaine :

Bien que centrée avant tout sur le sujet, cette approche « psychologique » du groupe se veut être un compromis entre, d’un côté, les approches dites « individualistes » des groupes sociaux (comme par exemple celle de Allport qui écrit en 1924 : « il n’y a pas de psychologie des groupes qui ne soit essentiellement et entièrement une psychologie des individus. La psychologie sociale ne doit pas être vue en opposition à la psychologie des individus ; c’est une partie de la psychologie des individus. Les actions de l’ensemble ne sont rien de plus que la somme des actes de chacun pris isolément ») et, de l’autre côté, les approches dites « dynamiques » des groupes, telles qu’elles ont été définies par Lewin (selon qui [Lewin, 1940] : « un groupe est plus que, ou plus exactement, est différent de la somme de ses membres. Il a sa propre structure et des relations propres avec d’autres groupes. L’essence du groupe n’est pas la similarité ni la dissimilarité des ses membres, mais leur interdépendance. Chaque groupe peut être caractérisé comme une totalité dynamique ; ceci signifie qu’un changement dans l’état d’une de ses sous-parties change l’état de n’importe quelle autre sous-partie »).