1.3.3.2.4 Le modèle « hiérarchique du risque »

Le « modèle hiérarchique du risque » de Van Der Molen et Bötticher (1988) vise à fournir « un cadre structurel qui permette de décrire les processus de perception, de jugement et de décision [concernant l’évaluation du risque à tous le niveau de la tâche de conduite » (p. 537). S’inspirant des travaux de Michon (1985), ce modèle décrit la conduite comme une activité structurée selon 3 niveaux hiérarchiques :

Ces trois niveaux ne sont pas indépendants les uns des autres. En effets, les traitements effectués au niveau stratégique débouchent sur des décisions et un plan stratégique qui est intégré dans les motivations prises en compte au niveau tactique. De même, les décisions tactiques et le plan de manœuvre sont transmis au niveau opérationnel pour y être mis en œuvre. Les trois niveaux stratégique, tactique et opérationnel sont alimentés par la perception de ce qui se passe dans l’environnement, ainsi que, pour les 2 premiers, par les représentations internes élaborées mentalement par le conducteur. Au niveau stratégique et tactique, ce processus d’intégration débouche sur des prévisions (expectations) en terme de risque potentiel d’accident qui feront notamment ensuite l’objet de jugements d’évaluation du risque (stratégique et tactique, respectivement). Au niveau opérationnel, la perception d’un danger va pour sa part activer d’emblée une décision d’urgence.

Figure 22 : Modèle hiérarchique du risque (Van Der Molen et Bötticher, 1988)
Figure 22 : Modèle hiérarchique du risque (Van Der Molen et Bötticher, 1988)

Les motivations jouent aussi un rôle important dans ce modèle. Les auteurs distinguent des motivations de sécurité (pour éviter d'avoir un accident) et d’autres motivations sans rapport avec la sécurité (motif du déplacement, plaisir de rouler). Selon Van Der Molen et Bötticher (1988, p. 540) « les motivations de sécurité interviennent comme des inhibiteurs de certains comportements susceptibles de générer des accidents. Elles sont personnelles et varient dans le temps. Le niveau de ces motivations sécuritaires détermine le degré pour lequel les décisions sont influencées par les estimations subjectives d'accident. Nous considérons qu'il est peu probable que les motivations sécuritaires puissent avoir un effet positif (activateur) excepté pour des cas pathologiques: nous pensons qu'un conducteur normal n'aura pas recours à une alternative risquée dès qu'existeront d'autres alternatives moins risquées et aussi attractives ».

L'intégration des motivations et des expectations (prédictions) permet de réaliser des jugements cherchant à estimer le risque d'accident associé à la situation de conduite, ou à certains comportements. Au niveau stratégique, ce type de jugement portera par exemple sur la nature d'un itinéraire (plus court, mais plus dangereux). Au niveau tactique, il portera sur les risques propres aux différentes actions de conduite possibles (dépasser ou suivre un véhicule, passer ou s’arrêter à l'orange). Un processus de décision intervient à chacun de ces deux niveaux pour permettre l’activation ou l’élaboration d’un plan (stratégique ou de manœuvre) à mettre en œuvre. Ce processus de décision repose sur des règles décisionnelles appliquées aux différents jugements. Les auteurs précisent que ces règles de décision peuvent varier de façon intra-individuelle comme de façon interindividuelle : un même conducteur pourra faire des choix différents, par exemple, s’il est très pressé. Enfin, certains conducteurs pourront accorder un poids relatifs différents aux jugements de risque et aux autres jugements (ne jamais prendre aucun risque versus privilégier le respect de la ponctualité).