4.4.3.2 Corrélations entre criticité et antonymes

En nous intéressant aux corrélations entre le valeur de criticité et les antonymes, nous visons à découvrir ce qui caractérise, pour chacun de nos groupes de motocycliste, un situation « critique ». Nous faisons ici l’hypothèse que cela nous éclairera sur la ou les dimensions sous-jacentes de la criticité - appréhendées à travers nos 16 antonymes - qui pèse(nt) le plus de poids, dans le jugement de criticité propre à chacune de nos communautés.

Pour les Gendarmes , la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée à l’antonyme « contrainte ». Ainsi, pour ces dernier, plus les situations leur paraissent contraintes et plus ils les jugent critiques. On a typiquement ici l’expression d’un jugement d’expert rompu à la gestion du risque. En effet, ce qui est perçu comme le plus risqué pour un professionnel du risque, ce n’est pas tant la criticité en elle-même que le sentiment de ne pas avoir de marge de manœuvre pour s’en sortir. Ainsi, les Gendarmes sont surentraînés (par leurs formations comme par leur pratique professionnel) à des forme d’usage extrême de la moto dans des conditions difficile. Confrontés à des situations d’accident, ils ont donc plus de ressources et de maîtrise que nos autres participants pour gérer le risque. Toutefois, certaines situations CRITIC étaient tellement contraintes quelle, ne permettaient pas à cette compétence « d’entrer en action », c’est pour cette raison qu’elles ont été plus fréquemment jugées critiques par cette population.

Pour les Bikers  , la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée aux antonymes « stressantes » et « dangereuses ». Ces motocyclistes ont plutôt une attitude « défensive » vis-à-vis de risque, c’est-à-dire qu’ils cherchent avant tout à s’en prémunir (en se méfiant beaucoup des autres), d’autant plus qu’ils sont très conscient des limites de maniabilité de leur propre moto. Face au risque soudain qui surgit brutalement devant eux, ils ne peuvent guère que mesurer la dangerosité des événements et affronter la menace dans le stress.

Pour les Utilitaristes , la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée à l’antonyme «sollicitante ». Pour des motifs différents, sans doute plus lié ici à une moindre anticipation du danger et à une mauvaise évaluation des risque, les Utilitaristes en sont souvent réduit à gérer « en permanence » le risque sur la route, au fur et à mesure qu’il se présente, et en y accordant alors toute leur attention. Pour ces motocyclistes, plus une situation sera critique, plus ils devront y accorder de l’attention, et plus ils la jugeront par conséquent sollicitante.

Pour les Sportifs expérimentés , la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée aux antonymes « pas responsable », « dynamique », « pénible » et « pas maîtrisable ». Nous avons vu que les Sportifs avaient une conduite très offensive et prenait bien souvent délibérément des risques au guidon. Toutefois, les risques pris délibérément le sont toujours avec le sentiment (justifié ou non, c’est un autre problème ») de parvenir à le maîtriser. En revanche, ils tolèrent beaucoup moins bien « l’aléa » (et n’invoquent pas plus la chance), surtout lorsque que cet aléa résulte du comportement d’autrui, c’est-à-dire d’un obstacle « dynamique » dont ils ne sont « pas responsables » du mouvement. Les situations sont jugées d’autant plus critiques par les Sportifs qu’ils se sentent « non responsable de l’évènement », qu’elles sont plus « dynamiques », plus « pénibles » et sur lesquelles ils ont le sentiment de ne plus avoir le contrôle du risque et de la prise de risque.

Pour les Sportifs Novices , la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée aux antonymes « incontrôlable », « dynamique », « dangereuse ». interprétation que nous venons de fournir ci-dessus pour les Sportifs expérimentés semble bien s’appliquer aussi au novices. Plus les situations sont jugées incontrôlables, dangereuses et dynamiques, et plus elles sont vécues comme critiques.

Pour les Sportifs Débutants, la valeur de criticité attribuée à l’ensemble des situations est corrélée aux antonymes « stressante », « inquiétante » et « pénible ». Les Débutants estiment les situations plus stressantes, inquiétantes et pénibles lorsqu’ils jugent que les situations sont critiques. Bien que de profil sportif, et donc aimant potentiellement le risque lorsqu’il est maîtriser, ces motard n’en sont pas moins des débutants qui en sont le plus souvent réduis à subir le risque plus qu’à le contrôler. C’est donc exclusivement ici sous l’angle des ressentis négatifs vivent la criticité situationnelle.