4.4 Synthèse

En optant pour la notion de rapport à l’écrit (Bautier, 1995 ; Barré de Miniac, 2000, 2002) ou d’appropriation de l’écrit (Besse et col, 2004), ces études se donnent pour but de mieux comprendre comment les personnes en difficulté avec l’écrit se comportent face à l’objet écrit. Ces auteurs cherchent ainsi à dépasser la caractérisation des difficultés par les performances en traitement de la lecture et de l’écriture en s’intéressant notamment à des représentations sous-jacentes qui pourraient guider certains traitements de l’écrit. Il apparaît que ces représentations se développent et se précisent en fonction du niveau d’expertise.

La spécificité du rapport à l’écrit des sujets en situation d’illettrisme ne se caractérise pas uniquement par un tableau statique - à la manière d’un peintre - tableau qui a pu bien souvent être envisagé comme ayant des blancs - mais ce tableau se caractérise aussi par sa mise en mouvement. Il semble que les liens et interactions entre ces sous-systèmes puissent se faire jour lors d’une utilisation de l’Ecrit. Il s’agirait davantage du tableau théâtral où les personnages évoluent en fonction de l’intrigue. Face à une situation d’Ecrit quels composants du tableau vont s’activer ? Pour Bautier et Lahire c’est dans l’activité métalinguistique et métacognitive que les conduites vont être orientées par les instances socialisatrice.

Les différentes instances de socialisation vont alors participer à la mise en place de ces tableaux mais elles vont aussi organiser leur mise en mouvement. Quand Lahire (1993) explique que l’Ecole organise un rapport à l’Ecrit de type instrumental et que lors de l’apprentissage l’accent est mis sur le niveau métalinguistique et non sur l’aspect communicatif, il vient signifier que face à une tâche d’écriture l’élève va mettre en mouvement principalement ces aspects-là de son rapport à l’Ecrit. Pourtant, comme le montrent Bautier (1995) ou Barré de Miniac (2000, 2002) les élèves dans leur tableau de rapport à l’écrit ont développé d’autres capacités que ces aspects-là. En effet, en dehors de l’école ils utilisent l’écrit au travers des journaux intimes, de mails, de « chat » ou encore des SMS. Ces pratiques déclarées permettent à ces jeunes scolarisés de développer des représentations types des fonctions de l’écrit et des schémas de tâche différents de ce qu’ils ont construit par la fréquentation de l’école. Certes l’école va participer à la construction du tableau mais elle organiserait surtout sa mise en mouvement en son sein. Face à une situation de production écrite, les jeunes fréquentant l’école mettraient en mouvement les différents processus en les organisant autour des aspects micro-textuels et linguistiques, laissant alors de côté les aspects communicationnels.