Chapitre 3 : présentation de la recherche

1. Organisation générale de la recherche

Etudier le fonctionnement cognitif implique de trouver des indices pertinents permettant de comprendre pourquoi et comment se déroule une activité cognitive. Pour comprendre comment les sujets et notamment les sujets les plus difficulté avec l’Ecrit s’y prennent pour mettre en texte leurs idées lors d’une communication écrite, analyser les seules traces écrites apparaît insuffisant au regard des connaissances actuelles (Barré-de-Miniac, 1996, 2002, Bautier, 2001, Besse, 1992, Besse, Luis, Paire, Petiot-Poirson & Petit Charles, 2004). Produire un texte, d’un point de vue cognitif, ne se réduit pas à une activité grapho-motrice. Des instances cognitives – mémoire à long terme et mémoire de travail - sont en action. Elles créent, activent et régulent des informations multiples - les représentations cognitives – en fonction du contexte de production. Un problème méthodologique majeur se pose : sur quels indices le chercheur peut-il prendre appui pour inférer et comprendre une activité qui se construit et s’organise en articulation avec des expériences individuelles socialement situées ?

Afin de saisir les représentations types et transitoires sous-jacentes à l’activité de communication écrite, nous faisons le choix de nous appuyer sur des verbalisations métacognitives. L’analyse des seules traces écrites nous apparaît insuffisante pour saisir comment le scripteur se positionne face à un destinataire absent. Dans cette recherche, nous cherchons à cerner comment la manière de s’être approprié les fonctions de l’écrit et les schémas de tâche peut influencer les processus de planification, mise en texte et révision. Nous nous intéressons à des processus de haut niveau qui participent à déterminer « quoi écrire ? à qui ? comment ? » (Fayol, 1997). Ainsi « les sujets s’engagent dans « des résolutions de problèmes » dont ils peuvent prendre conscience et qu’ils parviennent à verbaliser » (ibid). Cette méthodologie de prise en compte des verbalisations des personnes s’inscrit alors dans la démarche de co-évaluation dynamique du diagnostic des modes d’appropriation de l’écrit (DMA)1. Une série de situations d’entretien métacognitif a été construite.

De plus le discours écrit peut lui aussi être porteur de traces de l’organisation des représentations de l’Ecrit. En effet, Bautier (2001) postule que le choix d’éléments linguistiques repose sur un rapport au langage et des pratiques langagières spécifiques. Il en est de même pour l’équipe du groupe de recherche sur la parole (GRP) pour qui les aspects physiques et sociaux que l’être humain entretient avec son univers lui permettent à la fois d’identifier des entités perçues et de les catégoriser conceptuellement (Ghiglione, Landré, Bromberg & Molette, 1998). Face à une situation de communication donnée, le locuteur va choisir certaines catégorisations verbales afin de réaliser certaines visées de la communication. Dès lors, nous avons choisi de construire une épreuve de production langagière écrite amenant à des productions dans lesquelles nous analyserons la fonction des éléments langagiers utilisés par les sujets.

Notes
1.

Notre protocole vise à recueillir des indices pour mieux comprendre la manière dont les sujets en difficulté produisent des communications écrites. Toutefois, afin que d’une part les sujets s’impliquent dans les situations expérimentales et ne se vivent pas comment des cobayes de laboratoire et afin que les différents acteurs qui suivent ces personnes en difficulté avec l’écrit dans le cadre de l’insertion professionnelle, de la remise à niveau ou dans un cadre scolaire puissent avoir en retour de nos entretiens des éléments pour les accompagner au mieux dans leur parcours, il nous est apparu important de garder cette démarche de diagnostic.