Le modèle Act-In

Le modèle ACT-IN (Activation Intégration) est la formalisation proposée par Vallet et collaborateurs (Vallet, Simard & Versace, en préparation) à l’approche développée par Versace et collaborateurs (Versace et al., 2002 ; 2009). Ce modèle est défini comme un système unique hybride (voir aussi le modèle VISA,1 Whittlesea, 1989) dans le sens où il s’inspire à la fois des modèles de mémoire à traces multiples (e.g. MINERVA 2, Hintzman, 1986, 1988) et des modèles connexionnistes (e.g. PDP, McClelland & Rumelhart, 1985). En cela, il propose une architecture en réponse aux critiques faites aux modèles à traces multiples, à savoir l’indépendance entre les traces et le manque de substrat biologique sous-jacent (pour une discussion voir Versace et al., 2009). Cette approche se caractérise plus particulièrement par une définition de la trace mnésique et des mécanismes spécifiques impliqués lors de la récupération.

Le modèle suppose que les traces sont épisodiques, multisensorielles (ou multimodales) et distribuées. Cela signifie que les traces sont formées lors de l’expérience perceptive (i.e. épisodiques), qu’elles conservent des dimensions sensorielles (i.e. multisensorielles ou multimodales) et qu’elles sont codées sur un ensemble de structures cérébrales (notamment dédiées aux traitements perceptifs sensoriels) distribuées sur l’ensemble du cerveau. Cette définition de la trace est totalement en opposition avec les modèles abstractionnistes de la mémoire. En effet, au sein de ces modèles, les connaissances diffèrent qualitativement en termes de leurs « sensorialités » et de leur niveau d’abstraction (e.g. sémantique vs. épisodique, Tulving, 1972).

De plus, le modèle suppose que les connaissances émergent suivant une dynamique d’activation et d’intégration (voir figure 1). En cela, il propose que la récupération en mémoire suit le même principe que les modèles d’appariement globaux (SAM, Gillund & Shiffrin, 1984 ; MINERVA 2, Hintzman, 1986 ; 1988 ; SIMPLE, Nairne, 1990 ; 2006 ; GCM, Nosofsky, 1986 ; 1991), c’est à dire un appariement entre une situation perceptive (i.e. un indice à traiter) et des traces en mémoire. La particularité de ce modèle est alors d’ajouter une dynamique à ce processus d’appariement global en ayant recours à deux mécanismes : un mécanisme d’activation et un mécanisme d’intégration.

Figure 1 : Ebauche d’architecture du modèle de Versace, Nevers et Padovan (2002)
Figure 1 : Ebauche d’architecture du modèle de Versace, Nevers et Padovan (2002)

L’activation est décrite comme un mécanisme interactif et multimodal et s’apparente à un processus d’appariement (i.e. calcul de similarité). En d’autres termes, lors du traitement d’un indice, le système non seulement active de manière précoce les composants des traces (i.e. dimension sensorielle) partageant les mêmes caractéristiques que l’indice, mais est aussi capable d’activer les autres composants des traces initialement activées (voir Versace et al., 2009). L’intégration est décrite comme un mécanisme intervenant à proprement parler dans l’émergence des connaissances, dans le sens où il permet l’accès à des connaissances de plus en plus élaborées (voir Labeye, Oker, Badard & Versace, 2008, Versace et al., 2009). Plus particulièrement, le modèle suppose que le traitement d’un indice entraîne des activations en parallèle dans de nombreuses structures codant les dimensions sensorielles. Ensuite ces activations se propagent en cascade vers les structures codant les autres composants des traces (i.e. moteurs, émotionnels, etc.). Ces premières activations des propriétés élémentaires seraient suivies d’intégrations progressives qui permettraient l’accès à des connaissances de plus en plus unifiées. Sur ce point, le modèle s’inspire directement des mécanismes décrits au sein des modèles connexionnistes ou le traitement mnésique implique l’intégration des activations de propriétés (McClelland & Rumelhart, 1985 ; Rumelhart & Zipper, 1985 ; pour une revue voir Hintzman, 1990). Mais ce mécanisme est aussi très similaire à la sommation des activations, évoquée dans les modèles d’appariement global, Hintzman, 1986 ; Nairne, 1990 ; Nosofsky, 1986).

Le modèle suppose que la relation entre ces deux mécanismes est dynamique (voir Badard, 2007 ; Labeye et al., 2008) et que l’on peut dissocier ces mécanismes lors de la récupération (principalement au niveau temporel, pour une revue voir Versace et al., 2009). De plus, il propose que le processus de récupération soit efficace, c’est-à-dire que les connaissances émergent en rapport (et pour correspondre) à une situation donnée (i.e. une activité). Les connaissances peuvent alors être décrites comme de nature flexible, fonctionnelle et évolutive.

Notes
1.

Variable Integration and Selective Attention