Section 1 : Justification libérale de la rémunération des dirigeants : une mise en doute

Dans le chapitre précédent, nous avons montré que c’est en termes de justesse que le modèle économique libéral appréhende la problématique de la justification de la rémunération des dirigeants. Un principe structure ainsi toute la démonstration théorique : le dirigeant doit être rémunéré à hauteur de la valeur marchande de son travail. Dans cette perspective, tout est fait, essentiellement d’un point de vue « disciplinaire », pour que l’ajustement de la rémunération des dirigeants à la performance de l’entreprise – et notamment la performance financière – soit par conséquent garanti, étant entendu que cette dernière joue le rôle d’un « signal » sur la valeur de la pratique managériale. Le problème est que les résultats empiriques ne sont pas à la hauteur de l’apparente cohérence de cette démonstration théorique, ce qui est en soi suffisant pour que l’incertitude rejaillisse au cœur du débat (1.1). Dans la lignée des travaux des théoriciens du « pouvoir managérial » (Bebchuk et Fried, 2003 et 2004), c’est l’efficacité des dispositifs de contrôle, au premier rang desquels le conseil d’administration, qui est alors mise en doute pour tenter d’expliquer cet apparent écart entre la « théorie » et le « terrain » (1.2).