Section 2. Rémunération des dirigeants et principe d’égalité

Dans leur analyse de la rémunération des dirigeants, les théoriciens du modèle économique libéral œuvrent pour une justice venant signer le triomphe de « main invisible ». Il est important de rappeler que, ce faisant, leur objectif n’est pas de rejeter la morale hors du domaine économique mais de montrer que ce domaine incorpore sa morale propre, spécifique, soit une morale fondée sur l’idée que les actions guidées par l’intérêt privé des individus contribuent spontanément à l’intérêt général.Mais alors, quid des situations, en apparence nombreuses, dans lesquelles les dispositifs censés garantir que le concert des intérêts puisse se jouer d’une façon harmonieuse sont pris en défaut ? Dans ce cadre, les problèmes de justesse repérés dans le chapitre précédent prennent effectivement une toute autre importance, au sens où c’est la « morale économique » elle-même qui se voit mise en cause à travers les dysfonctionnements des systèmes d’incitation et de contrôle du dirigeant (2.1). Dès lors, si les théoriciens libéraux gardent l’espoir de voir les promesses libérales un jour réalisées, c’est qu’ils croient en leur capacité à surmonter ces dysfonctionnements en se montrant encore plus libéral (2.2).