Méthodologie

Pour éclairer les dynamiques de gentrification et approfondir la connaissance des franges les plus diplômées des classes moyennes, nous avons choisi de faire porter notre attention sur les ménages gentrifieurs. Nous nous sommes ainsi placée dans la filiation moins des enquêtes de Sabine Chalvon-Demersay ou de Bernard Bensoussan qui privilégiaient une approche monographique, que dans la lignée de travaux de sociologie urbaine « faisant place à une analyse des pratiques sociales et des modes de vie où la diversité individuelle, l’histoire singulière du ménage et la mobilité sociale ne sont plus délaissées » (Magri, 1993, p. 151). Nous avons organisé notre recherche autour de quelques questions simples, qui s’articulent autour de deux axes principaux :

Notre principal matériau empirique est constitué d’un corpus d’une cinquantaine d’entretiens approfondis menés auprès de gentrifieurs des deux quartiers108, arrivés à des dates différentes au cours des processus de gentrification. Nous exposerons les logiques de la construction de ces populations et leurs principales caractéristiques à la fin du prochain chapitre. Celui-ci, qui vise à présenter les deux quartiers d’étude, le rythme et les formes de leur gentrification ainsi que les caractéristiques de leur renouvellement socio-démographique, repose en effet sur un second type de matériau : nous y exploitons des données issues des recensements de 1968 à 2006, les fichiers concernant les nouveaux habitants recensés en 1990 et en 1999 et enfin des bases de données notariales concernant les transactions immobilières réalisées en 1998 et en 2007 dans nos deux quartiers. Enfin, nous mobiliserons dans la deuxième partie de la thèse un troisième ensemble de matériaux, plus hétérogène, afin de cerner les caractéristiques de l’« appropriabilité » du Bas Montreuil par les gentrifieurs – suivant la définition de ce terme proposée ci-dessus (cf. 3.3) : documents d’urbanisme, entretiens avec des employés des services de la mairie, exploitation secondaire de travaux universitaires d’urbanisme et de sociologie, revue de presse. Ces matériaux, ainsi que le corpus d’entretiens et les bases de données statistiques, seront présentés de façon plus détaillée au fur et à mesure que nous les mobiliserons.

Notes
108.

Précisément, nous avons rencontré 48 ménages (24 dans chaque quartier) ; nous avons parfois pu interroger les deux membres du couple, ce qui fait que nous avons interrogé au total 56 personnes (27 à la Croix-Rousse, 29 dans le Bas Montreuil) dont certaines plusieurs fois. De ce fait, de légères variations pourront apparaître lorsque nous dénombrerons les entretiens, selon que nous parlons des ménages, des individus ou des entretiens réalisés.