2.3.1 Montreuil ou les « problèmes des banlieues »

Hormis les traditionnels « tours d’horizon » effectués à l’occasion des élections (municipales de 1995 et législatives de 1998), les apparitions de Montreuil dans la presse entre 1995 et 1999 concernent un certain nombre de thèmes récurrents : fief de Jean-Pierre Brard, vibrionnant député de la Seine-Saint-Denis, lieu de rassemblement pour la « gauche de la gauche » (siège de la LCR, siège de la CGT, rassemblements communistes), Montreuil est avant tout une ville typique de la « banlieue rouge », avec des problèmes de pauvreté et surtout d’immigration. Qu’ils soient évoqués sur un ton pessimiste – « problèmes des jeunes » (drogue, violence), difficultés des élèves, pauvreté, exclusion des femmes immigrées – ou sur un ton plus optimiste – initiatives associatives, foisonnement culturel –, les traits caractéristiques du traitement des banlieues à cette période sont la matière d’une bonne partie des articles. La ville semble payer l’héritage de l’urbanisation des Trente Glorieuses.

Montreuil est en bonne place dans les articles traitant des « problèmes » liés à l’immigration ; on peut ainsi lire dans un dossier de L’Express en 1993 consacré à ce thème un article intitulé « Montreuil ou le mur des incompréhensions » : « Dans cette banlieue est de Paris, il y a dix ans, Noirs et Blancs se parlaient. Aujourd'hui, la ville compte huit foyers surpeuplés. Autant de ghettos » résume le magazine (L’ Express, n°2201, 9 septembre 1993, p. 72-73). La question de l’hébergement des immigrés est récurrente, la fermeture en 1995 d’un important foyer et les difficultés posées par le relogement de ses occupants ayant attiré les projecteurs sur la ville. Elle est à nouveau citée en exemple de « la banlieue » à l’occasion du conflit qui oppose Eric Raoult, alors ministre délégué à la ville et à l'intégration,aux signataires de l’ « appel à la désobéissance civique » mobilisés contre les lois Debré ; accusés de snobisme parisien par le ministre, qui les invite à venir passer un mois dans une cité « afin d'apprécier l'ampleur des difficultés économiques et sociales rencontrées par nos compatriotes et leurs élus dans les quartiers en difficulté », des cinéastes (Robert Guédiguian, Pascale Ferran…) mettent en avant leur résidence montreuilloise pour revendiquer leur fréquentation quotidienne de la banlieue, tandis que Bertrand Tavernier répond à l’invitation en réalisant à la cité des Grands Pêchers son film De l’autre côté du périph’.

Par ailleurs, deux institutions culturelles montreuilloises sont couvertes par la presse nationale, le Salon du Livre de Jeunesse et les Instants Chavirés, salle de concert spécialisée dans les musiques expérimentales ; leur implantation à Montreuil ne fait l’objet d’aucun commentaire. Quelques années plus tard elles sont devenues des symboles du « nouveau » Bas Montreuil.