2. La statistique comme discipline scientifique

2.1. Vers un art d'observer et de décider

La définition de la statistique transcrite au travers des manuels scolaires pourrait se résumer ainsi : son rôle serait (BOURSIN et DURU, 1995, p. 8) de « décrire, par rapport à une famille de critères pertinents, un ensemble d'objets parfaitement déterminé. La méthode consiste [alors] à construire des groupes d'objets homogènes vis-à-vis des valeurs observées, des critères, puis à dénombrer chacun de ces groupes ». Mais utiliser la statistique ne se résume pas à réaliser une simple compilation synthétique voire “mécanique” de l'information première. Il faut savoir conserver la pertinence des faits et porter un regard exigeant sur soi-même ; ce qu'explique Cournot par ces termes (COURNOT 1843, p. 122) : « pénétrer autant que possible dans la connaissance des choses en soi, et pour cela dégager autant que cela peut se faire, par une discussion rationnelle, les données immédiates de l'observation, des modifications qui les affectent, en raison seulement du point de vue où se trouve placé l'observateur, et des moyens d'observation mis à sa disposition. »

La recherche en statistique met un point d'honneur à cumuler l'art d'observer, d'analyser, de communiquer et pour cela l'art de construire des outils adaptés à la recherche engagée. De par l'ambition de « la construction d'une population infinie hypothétique » (REGNIER, 1996, p. 1), la statistique pousse son art jusqu'à anticiper le devenir des situations non totalement quantifiables. « Son objectif est de rassembler des matériaux pour une meilleure compréhension globale de nos sociétés, de leurs structures et de leurs évolutions à long terme » (BEDARIDA, 1987, p. 11). C’est par son apport au quotidien dans « l'étude des modes d'utilisation de l'information aux fins de la réflexion et de la décision dans une situation où intervient l'incertitude » (RADE L., 1986, p. 126), qu'elle prend toute sa valeur d'aide aux sciences humaines et à la conduite responsable des sociétés.