4.1. Questionnement de la didactique de la statistique par les chercheurs

4.1.1. Apprécier la statistique en tant que discipline scolaire

C’est à cette question que Dominique Lahanier-Reuter (LAHANIER-REUTER, 2006), par une communication intitulée La statistique : une discipline scolaire ?, s’est attelée en posant deux questions essentielles : quelle peut être « l’autonomie de la statistique vis-à-vis des maths » et quelle en est « l’acceptation par les jeunes comme discipline scolaire ? » Elle rappelle que :

‘« les modifications de la structure des enseignements bouleversent les relations entre les différents contenus d’enseignement, leur importance tout aussi relative et en conséquence les représentations des élèves et des enseignants. La perception de l’autonomie d’un champ de questions, de problèmes, de pratiques (qu’elles soient d’évaluation ou d’autre nature) est à relier avec le niveau de conscience disciplinaire dont témoignent les élèves et participe, selon les thèses de M. Brossard, à la clarté cognitive qu’il tient pour facteur décisif de la réussite de ces mêmes élèves. » ’

En s’appuyant sur les principes avancés par Chervel pour décrire une structure d’enseignement, elle pose trois axes de réflexion :

‘« Tout d’abord le statut que l’école confère à un ensemble d’objets d’étude pèse sur les formes de l’enseignement et peut-être sur celles de l’apprentissage. Ensuite, le statut conféré par le système éducatif peut se trouver plus ou moins congruent à celui que les acteurs de ce système lui accordent. […] Enfin, la dernière des raisons que nous avançons est celle de la définition des didactiques par leur relation à telle ou telle discipline (voir, par exemple, Ropé 1989 et 1990 ou Martinand 1987). Si nous souhaitons parler de la didactique de la statistique, force nous est d’interroger cette relation au travers de la notion de discipline scolaire dont les découpages et les formes varient, de celle de discipline savante (de référence) et enfin des relations entre ces deux ordres disciplinaires (Reuter et Lahanier-Reuter, 2006). » ’

Elle rappelle que cette enquête par questionnaire, adressée à des élèves de première et terminale des lycées, répondait à une attente institutionnelle de formation des élèves à une “éducation à la citoyenneté” pour laquelle la statistique semblait « beaucoup plus marqués par des perspectives de conscientisation citoyenne et de distanciation réfléchie de l’information que ne le sont les autres enseignements mathématiques ». Elle ajoute que cet enseignement permet des connexions avec les injonctions en cours : l’usage des nouvelles technologies, la capacité d’organiser le « recueil des données par les élèves eux-mêmes » et la réponse à une interrogation transdisciplinaire. Elle conclut : « Ainsi, dans toutes les prescriptions et recommandations que nous avons listées, la statistique, à l’école, apparaît comme une discipline scolaire. » Elle constate par contre un net décalage entre la demande institutionnelle et la réalité des classes qui montre que : « les élèves interrogés d’une part conçoivent la statistique bien davantage comme un « chapitre » du cours de mathématique, dont l’autonomie est attribuée uniquement à l’effet de découpage et de programmation du cours de l’enseignant et d’autre part comme un « chapitre » fréquemment oublié, rejeté en fin d’année, dont ils ne perçoivent pas l’importance. » C’est ce que nous avions constaté lors de l’analyse de la structure des manuels scolaires (section 1.3 de la partie 2). La statistique doit donc être appréhendée comme source disciplinaire autonome mais même dans cette logique, son apprentissage ne peut être envisagé sans un retour sur les représentations communes du hasard et de l’idée de variabilité.