4.1.4. Préciser l’idée d’interprétation

Pour revenir à notre objet de recherche, qui se centre au sein de l’école élémentaire, nous sommes encore loin de proposer des situations permettant aux élèves de dépasser la simple utilisation mécanique d’opérations mathématiques pour leur faire concevoir l’effet réel de leur usage. Ainsi, pour résoudre des problèmes de nature probabiliste, encore plus que pour des problèmes de nature déterministe, il faut qu’au préalable les élèves aient compris la nature et la nécessité d’un passage par une modélisation. Il est illusoire de vouloir faire entrer les élèves dans le domaine du hasard, en estimant que rapidement, ils s’exonéreront de tout recours à une volonté magique, providentielle etc. si l’on ne s’est pas assuré auparavant de leur aptitude à conceptualiser les modèles utilisés par eux jusque là, en mathématiques, voire même simplement en illustrant régulièrement leurs effets.

Pour cela, nous nous appuierons sur l’étude conduite en Italie par une équipe de chercheurs du groupe de Perugia, les professeurs Lina Brunelli, Gianfranco Galmacci, Maria A. Pannone ainsi que l'auteur du texte Linda Gattuso, avec la collaboration des étudiants, Michela Gnaldi et Luca Scrucca. Linda Gattuso en fait une présentation intitulée Les statistiques, un élément essentiel de la littéracie. Une expérimentation d’enseignement des statistiques dans les écoles italiennes, aux journées de la statistique de Lyon (2003). Voilà ce qu’elle précise (p. 2) pour ne pas confondre interprétation et subjectivité ! :

‘« Il est indispensable que les élèves soient en mesure d’apprécier le rôle du raisonnement statistique, qui permet de lire et interpréter des phénomènes réels sans vouloir apporter des réponses exactes mais en donnant toutefois la possibilité d’avoir une vision de la réalité qui ne soit pas que subjective ».’

Pouvoir s’ancrer avec la réalité, c’est la remarque unanime que tous les enseignants renvoient des séances d’apprentissage de la statistique avec les élèves ; ce fut le cas par exemple lors des expériences que nous avons conduites et déjà présentées ici, (Annexes n°5.2 et 5.3), mais c’est aussi celles relatées par exemple par le collectif rassemblé en 1998 autour de Jean-Claude Régnier (1998), celles de Jacqueline Weber-Bouchant (WEBER-BOUCHANT, 2004) ou de Christelle Castebert et Isabelle Damien dans leur mémoire intitulé : Entre hasard et déterminisme, un jeu de dé pour approcher l’aléatoire en cycle III, sous la responsabilité de Gérard Gerdil-Margueron, à l’IUFM de l’Académie de Grenoble en 2006. Sans oublier celles impulsées par Claudine Schwartz autour du projet Stastistix, mis en place avec l’IREM de Grenoble, qui consiste en un site consacré aux statistiques sous leurs diverses composantes. Il est dédié aux professeurs mais est construit suivant les directives de la CREM. Il devrait impliquer l’INSEE, l’INED, etc. Il est conçu pour proposer des cours, des réflexions sur la pensée statistique, des simulations, des analyses de données réelles etc. C’est une possibilité majeure offerte par la statistique, que de permettre d’aborder avec les élèves, le traitement de situations relevant de la complexité de leur environnement. En miroir, ce passage par cette confrontation, qui permet de les initier à la statistique, semble incontournable comme le souligne Linda Gattuso, par sa communication citée ci-avant. Elle relate un effet secondaire intéressant de l’apprentissage de la statistique, par le fait qu’il met en réussite scolaire, une autre catégorie d’élèves que celle perçue habituellement, de part l’originalité des démarches mises en acte par rapport aux mathématiques mais aussi de part le caractère des objets traités.