1.5.2 Un bilan humain et matériel lourd

Au nombre important de pays touchés, correspond un nombre de victimes lourd. On peut compter pour cette catastrophe de nombreux blessés, morts ou disparus pour chacun des pays, soit un total de 223 492 personnes selon les Nations Unies. Mais le nombre d'États réellement touchés (55) est beaucoup plus important puisque des touristes étrangers étaient présents un peu partout dans la zone au moment du tsunami. Le bilan est évidemment incertain. Il évolue en permanence dans la couverture de la chaîne, pour se stabiliser au moment du premier anniversaire de l’événement. « Partout sur son passage, le raz de marée va tuer et il faudra des mois pour en établir l'effroyable bilan humain. En Indonésie, près de 169 000 morts et disparus. L'Inde et le Sri Lanka sont très durement frappés, 18 000 et 35 000 victimes. La Thaïlande, enfin avec 3000 disparus et 5200 morts, dont la moitié sont des occidentaux. 95 français périssent »77. Ici, le journaliste donne une série de chiffres en partant du général pour aller au plus particulier, c'est à dire par ordre décroissant puis en se focalisant sur les touristes étrangers et enfin sur les français. Le premier tableau seconcentre sur les pays touchés par les vagues. Un second tableau (annexe 1) donne un bilan élargi aux pays indirectement touchés.

Tableau 2 Nombre de victimes (morts, disparus, déplacés) par pays physiquement frappés
Tableau 2 Nombre de victimes (morts, disparus, déplacés) par pays physiquement frappés

Source : USAID, 2005 ; AFP, 2005. Décompte arrêté au 6 mai 2005. OZER (Pierre), DE LONGUEVILLE (Florence), « Tsunami en Asie du Sud-Est : retour sur la gestion d’un cataclysme naturel apocalyptique », Cybergeo, European Journal of Geography [en ligne], N°321, 14 octobre 2005, p.2 : http://www.cybergeo.eu/index3081.html

Au total 55 pays ont déploré des victimes et l'on compte deux millions de sans abri. Les quatre pays les plus touchés sont asiatiques, puis arrive un pays européen, l'Allemagne, qui compte d'ailleurs plus de victimes que certains pays physiquement frappés. L'Allemagne, nation européenne la plus lourdement touchée fait également l'objet d'un reportage plus d'une semaine après le tsunami, le 5 janvier 2005 : « Avec la Suède, l'Allemagne est sans doute le pays européen le plus touché ». Les informations demeurent des hypothèses dans les premiers temps. La France arrive en douzième position avec 196 morts ou disparus. Il faut noter que dans sa couverture, la chaîne donne une place considérable à la question du bilan côté français ainsi qu'à la retenue du gouvernement et les difficultés à établir des listes précises. «Ce soir, le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères annonce un bilan encore plus lourd. "Il est clair que on ne peut pas exclure le fait que le nombre final...euh...définitif de nos compatriotes français décédés ou disparus sera bien supérieur à cent cinquante"»78. La Suède, qui est le deuxième pays européen le plus touché, est particulièrement mise en avant par la chaîne. Trois reportages ainsi qu'une brève abordent ce cas le 31 décembre 2004 et le 4 janvier 2005.

‘« La Suède on vous l'a dit pourrait être le pays occidental le plus touché. Le nombre des victimes devrait dépasser le millier. Le gouvernement a décrété demain un jour de deuil. Et ce soir, des membres du gouvernement ainsi que les souverains ont assisté à un service religieux, en la cathédrale de Stockholm»79.’

Au soir du 30 décembre 2004, la position de la Suède est encore incertaine, d'où l'emploi du conditionnel par le journaliste (« pourrait, devrait »). Le monde politique (« membres du gouvernement ») et les « souverains » se réunissent lors d’un service religieux en raison de cette situation exceptionnelle. Deux jours plus tard, le bilan suédois est encore en suspens :

‘«La Suède est l'un des pays d'Europe les plus touchés avec 59 morts et plus de 3500 personnes disparues. La plupart des touristes qui se trouvaient en Thaïlande ont pu regagner Stockholm et raconter leur calvaire»80.’

On peut remarquer que, chaque fois, l'information se précise de plus en plus. Le journaliste commence par parler au conditionnel (« pourrait être »), puis on nous explique que la Suède est « l'un des pays d'Europe » les plus touchés, pour finir par affirmer, le 4 janvier 2005, que c'est « le pays européen » le plus frappé : «La Suède est le pays européen qui paie le plus lourd tribut avec 52 morts et 1900 disparus, un chiffre à nouveau légèrement revu à la baisse»81. La Suède est présentée comme une nation vivant là la plus grande tragédie de son histoire : « Le pays est sous le choc. C'est la catastrophe la plus importante de l'histoire de la Suède »82. D’ailleurs, c’est également le cas de La Suisse : « Ce petit pays n'aurait pourtant jamais imaginé que la plus grosse catastrophe naturelle de son histoire, soit un raz de marée»83. Ces « records » sont d’autant plus inattendus que la Suède et la Suisse n’ont pas été physiquement touchées par la catastrophe. Le nombre important de morts ne peut se rattacher à un événement palpable puisqu’il est éloigné géographiquement. Il y a donc une forme de dramatisation dans ce paradoxe. L’infographie suivante, diffusée le 30 décembre 2004, propose un bilan « européen » autour de quatre pays : la Suède et l’Allemagne, qui sont les plus touchés, la France, ainsi que la Grande-Bretagne. Les chiffres sont présentés avec en arrière-plan, la carte des zones touchées.

Figure 8
Figure 8

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Notes
77.

Sujet n°3 de Nicolas ESCOULAN, diffusé le 26 décembre 2005.

78.

Sujet 12 de Linda HURE, diffusé le 2 janvier 2005. Le secrétaire d’Etat est alors Renaud MUSELIER.

79.

Brève diffusée le 30 décembre 2004.

80.

Lancement du sujet n°15 de Stéphanie LEBRUN et Christelle CHIROUX diffusé le 1er janvier 2005.

81.

Brève n°9 diffusée le 4 janvier 2005.

82.

Sujet n°15 de Stéphanie LEBRUN et Christelle CHIROUX diffusé le 1er janvier 2005.

83.

Sujet n°20 de Jean-Marie DELEAU et Michael CLEMENT, diffusé le 3 janvier 2005.