3.2.4 Dimension institutionnelle et rituels

La particularité du lexique ici est qu’il évoque les commémorations, le recueillement, notamment dans une opposition avec la référence aux fêtes. Le samedi 1er janvier 2005, Laurence Ferrari commence son journal en mettant en opposition deux temporalités, celle des fêtes de fin d'année et celle de la catastrophe : la fête évoque le bonheur, l’amusement, la convivialité, et la catastrophe véhicule une image négative de malheur, de souffrance. Le tsunami a surgi au lendemain de Noël et ses conséquences après le Nouvel An sont toujours aussi dramatiques. L'événement a donc complètement supplanté les festivités, qui ont plutôt été synonymes de « recueillement et de solidarité ». Elles ont pris un sens différent. L'opposition est également marquée par l'utilisation de la préposition « malgré» : «malgré les feux d'artifice et la fête personne n'a oublié ceux qui ont tout perdu dimanche dernier ». Ici, le propos de la journaliste permet de justifier indirectement la poursuite d'une couverture importante de l'événement par la chaîne puisque le pronom indéfini « personne » semble se situer à la fois dans le champ des spectateurs et celui des journalistes de TF1. Elle poursuit en annonçant l'aide organisée par les Nations Unies et par la France. Le premier sujet est un reportage de la journaliste Anne-Claire Coudray, d'une durée de 1 minute 30 secondes, sur les cérémonies d'hommage en Asie ainsi qu'en Suède, en Autriche, en France et à Chypre. La solidarité est présentée comme mondiale et elle s'illustre par des éléments propres à chaque pays, « signe d'une souffrance planétaire». Il s'agit de fleurs blanches, de bougies et de prières en Thaïlande. À Stockholm en Suède, les gens se sont rassemblés dans un parc. En France, des foulards noirs ont été accrochés aux arbres des Champs-Elysées. Au lendemain du passage au Nouvel An, la journaliste montre que les fêtes étaient teintées d'une pensée forte pour les victimes et que la solidarité n'est pas seulement financière. Elle utilise tout un lexique du deuil et de la douleur (« silence, souffrance, recueillement ») pour souligner l'émotion engendrée par la catastrophe. Sa première phrase, nominale, traduit une suppression de la référence au temps (« S'en remettre à Dieu »).Ici, la Une commence à s'articuler autour d'un nouveau temps fort qui est celui de la résolution de la crise. Finalement, le tsunami met en avant une triple mondialisation : du climat, de la solidarité et de l’information. La mondialisation du climat implique qu’un phénomène local a des conséquences mondiales. Dans le cas du tsunami, l’ampleur est telle que la solidarité s’organise aux quatre coins du globe, notamment parce que les médias du monde entier proposent une représentation de l’événement.

À partir du jeudi 19 mai 2005, le Tsunami quitte les Unes du journal, laissant la place à d'autres événements, comme l'ouragan Katrina en août 2005 par exemple. Un retour au tsunami s'opère les lundi 26 décembre 2005 et mardi 26 décembre 2006, pour le premier et second anniversaires de la tragédie, avec d'une part un reportage de 2 minutes 04 secondes de Sylvie Pinatel et d'autre part un sujet d'1 minute 56 secondes de Christophe Pallée. Ces deux Unes portent évidemment sur les commémorations de la tragédie. Ce seront les dernières Unes consacrées au thème du tsunami. Elles sont particulières puisqu’elles participent à une forme de ritualisation de l’événement et de la mémoire.