L’Archipel appelé République d'Indonésie, est un ensemble de 17 000 îles réparties en vingt- neuf provinces sur 1 919 440km2. Six mille d'entre elles sont habitées par près de 234 693 997 habitants, les plus grandes et les plus peuplées étant Java et Sumatra. Maîtriser la catastrophe dans un si grand nombre de provinces éloignées les unes des autres est, en soi, une véritable gageure.
Source : RAILLON(2007).
La majorité des habitants est de confession musulmane (87%) ; l’Indonésie est d'ailleurs le premier pays musulman au monde. Mais on compte aussi des protestants (5,8%), des chrétiens (3%), des hindouistes (2%) ou des bouddhistes (0,9%). La diversité religieuse, ethnique et culturelle est la caractéristique principale de l'identité du pays, en témoigne par ailleurs la devise nationale « Unité dans la diversité ». La diversité est un atout mais c’est aussi un inconvénient car rien n'est plus difficile à maintenir que l'unité. L'indonésien reste la deuxième langue employée après les langues communautaires.
Sous domination néerlandaise à partir de la fin du XVIème siècle, l'Indonésie est occupée par le Japon dès 1942, et ce pendant trois ans jusqu'à la proclamation d'indépendance du 17 août 1945 par Soekarno et Mohamed Hatta. Toutefois, les Pays-Bas ne reconnaîtront l’Indonésie qu'en 1949. Cette période transitoire caractérisée par les affrontements et les luttes diplomatiques est appelée revolusi par les Indonésiens et fera beaucoup pour la construction d'un sentiment d'unité nationale. L'islam et le communisme présents poussent à cette indépendance. Dès l'indépendance, et pendant treize ans, la situation politique est définie par une instabilité constante : dix-sept gouvernements se succèdent. En 1956 est proclamée la « démocratie dirigée », c’est ainsi que l'armée se voit instituée comme un acteur à part entière du gouvernement. Ahmed Soekarno souhaite conserver l'unité de l'Indonésie et l'on voit se multiplier les rébellions de certaines régions. Des tensions entre le parti communiste (PKI) et l'armée entraînent la chute de Soekarno. Le 30 septembre 1965, un coup d'État est imputé aux communistes. Le général Soeharto tente de ramener l'ordre au sein de l'armée. En 1968, il devient président et impose alors un régime autoritaire -le gouvernement de «l'Ordre Nouveau »- pendant plus de trente ans. Cet « Ordre Nouveau » prétend rétablir la stabilité politique et favoriser le développement économique. Mais dans la réalité, le régime est pétri de corruption, de trafics d'influence et de terreur, ce qui plonge le pays dans une grave crise économique et sociale et provoque l'effondrement du régime. Aujourd'hui le pays reste menacé par les tensions séparatistes ou indépendantistes, menées notamment par le GAM (Gerakan Aceh Merdeka, « Mouvement d'Aceh Libre »). La province d'Aceh, à Sumatra, est ainsi fermée au reste du monde, comme le souligne TF1 : «Les associations internationales sont exceptionnellement autorisées à apporter leur concours sur cette île où elles étaient interdites de séjour pour cause de guerre civile »570. D'autres foyers de tension existent ou existaient (c'est le cas du Timor Oriental indépendant depuis 2002) comme Kalimantan à Bornéo et Ambon dans les Moluques, l'ex Irian Jayah aujourd'hui Papouasie (partie de la Nouvelle-Guinée appartenant à l'Indonésie). Le tsunami engendre une demande d'aide internationale et une «ouverture d'Aceh au monde alors que province était jusque là zone interdite aux ONG et aux journalistes étrangers»571. Cette ouverture provoque la crainte d'une internationalisation du conflit acehnais, comme ce fut le cas avec l'annexion du Timor Oriental572.
La situation politique en Indonésie se caractérise par la forte présence de l’armée, qui se présente comme garante de l’unité de la République :
‘« Facteur aggravant, l'armée maintient ses barrages, nous avons nous-mêmes été bloqués et ce, malgré le cessez-le-feu qui a été signé hier avec les rebelles indépendantistes de...de...de Sumatra»573. ’Le conflit entre l'armée et le mouvement indépendantiste local GAM (Gerakan Aceh Mereka– Mouvement pour l'Indépendance d'Aceh) a poussé les populations du centre vers la côte ouest. Les difficultés sont soulignées avec la répétition de certains termes « compliquer, ralentir », ou l'insistance sur d’autres « loin » et par le recours à un lexique de la difficulté :
‘« Oui. C'est une situation qui est LOIN d'évoluer euh...dans le bon sens euh...et qui nous complique la tâche quotidiennement. Alors bien évidemment, nos conditions de travail n'ont absolument rien à voir avec la vie des survivants de...de Sumatra mais j'peux vous dire qu'on a le sentiment qu'ici est tout est réuni effectivement pour nous compliquer euh...euh...le travail. Alors vous le savez euh...euh la province d'Aceh où j'me trouve ce soir est en proie à une très violente guerre civile, les indépendantistes d'un côté, l'armée, indonésienne de l'autre. Et bien cette armée, ces soldats, nous ne les voyons pas au contact de la population, nous les voyons pas aider les survivants, nous les voyons plutôt le long de la route, assis à des barrages en train de...de contrôler, de demander les papiers de tout le monde et donc de ralentir la circulation et notamment ralentir l'arrivée tous premiers convois humanitaires. Alors évidemment aucun pays n'est préparé à un cataclysme d'une telle ampleur mais on a le sentiment que la désorganisation générale qui règne ici, en Indonésie, ne fait qu'aggraver les choses»574. ’Ici, le journaliste Nicolas Escoulan formule une critique affichée (« nous ne les voyons pas ») envers les autorités locales. Il dénonce leur lenteur et leur inaction. Le média est ici clairement un dénonciateur qui se veut protecteur des faibles victimes. Une seconde intervention du journaliste le lendemain, va dans le même sens. Il répète ainsi une phrase qui aurait été prononcée par des sauveteurs venus de Dubaï, étonnés par l’absence des secours :
‘« Les sauveteurs réclament une ambulance. ''Que fait le gouvernement indonésien?'', ajoutent-ils. Un véhicule de l'armée finira par arriver. Un peu tard, aux yeux des sauveteurs de Dubaï, qui depuis 2 jours, se débattent seuls, face au chaos, de Banda Aceh»575.’La lenteur est ici soulignée (« finira par arriver, se débattent seuls ») pour marquer le rôle du gouvernement indonésien dans la crise provoquée par le tsunami.
Au final, le tsunami a peut-être temporairement mis fin à un long conflit après l'ouverture d'Aceh et la surveillance de la communauté internationale :
‘« Alors vous le savez…euh…euh…la province d'Aceh où j'me trouve ce soir est en proie à une très violente guerre civile, les indépendantistes d'un côté, l'armée, indonésienne de l'autre»576.’Deux ans après la catastrophe, le constat s’oriente vers une légère amélioration de la situation puisque le gouvernement parvient à une entente de paix avec le GAM (Gerakan Aceh Mereka– Mouvement pour l'Indépendance d'Aceh) : « Paradoxalement le tsunami a mis fin à 30 années de guerre civile qui ont fait ici 15 000 morts. Depuis des accords de paix ont été signés avec les combattants indépendantistes du GAM »577. TF1 fait ici le lien entre le tsunami et l’amélioration de la situation puisque le journaliste n’emploie pas le conditionnel et se montre catégorique (« a mis fin »).
Sujet n°3 de Cyril AUFFRET, diffusé le 27 décembre 2004.
RAILLON (2007), op.cit., p. 29
Après l'effondrement du régime de Salazar, les portugais se retirent de la colonie. Le Front révolutionnaire de libération du Timor Oriental proclame alors l'indépendance mais en 1976, l'Indonésie déclare l'île 27ème province du pays. Cette annexion est condamnée par les Nations Unies.
Extrait de l'intervention en duplex de Nicolas ESCOULAN depuis Sumatra le 28 décembre 2004.
Intervention en duplex de Nicolas ESCOULAN depuis Sumatra le 29 décembre 2004. Termes soulignés par nous-mêmes.
Sujet n°3 de Nicolas ESCOULAN, diffusé le 30 décembre 2004.
Duplex de Nicolas ESCOULAN en direct de la province d'Aceh le 29 décembre 2004.
Sujet n°14 de Cyril AUFFRET, diffusé le 24 décembre 2006.