Parce que la couverture du tsunami est immédiatement axée sur les pays les plus touchés et sur la France, l'action politique et diplomatique française est rapidement mise en scène. Le président de la République, Jacques Chirac, et le gouvernement sont ainsi représentés par quelques figures récurrentes qui sont chargées de gérer la situation des ressortissants : le premier ministre Jean-Pierre Raffarin, le ministre de l'intérieur Dominique De Villepin, Patrick Devedjian ministre délégué à l'industrie, le ministre de la santé Philippe Douste-Blazy, le ministre des affaires étrangères Michel Barnier et le secrétaire d'état aux affaires étrangères Renaud Muselier. Dans l'un des sujets du 1er janvier 2005, c'est le ministre de la santé, Philippe Douste-Blazy qui accueille les rapatriés blessés : « D'autre part, cet après midi vingt-neuf blessés français rapatriés de Thaïlande sont arrivés à l'aéroport du Bourget à bord d'un Airbus médicalisé. Ils ont été accueillis sur le tarmac par le ministre de la santé Philippe Douste-Blazy »600. Quant au ministre des affaires étrangères, chef de la diplomatie française, Michel Barnier, c'est lui qui est chargé de se rendre dans les zones affectées afin d’exprimer l'engagement immédiat de la France : «Arrivé à Colombo, Michel Barnier a rencontré la présidente du Sri Lanka qui lui a expliqué ce dont son pays a besoin» 601 ou de soutenir les Français «Michel Barnier a tenu à rencontrer les rescapés pour les soutenir »602. Le gouvernement dans son ensemble est mobilisé, certains expriment même la volonté de faciliter une situation complexe et éprouvante :«Concernant justement ce problème de disparus, deux députés UDF, Hervé Morin et Michel Hunault ont déposé, aujourd'hui, une proposition de loi pour permettre...euh...la déclaration de décès, avant le fameux délai de dix ans prévu par la loi actuelle »603, «Certains politiques veulent modifier la loi actuelle pour simplifier les procédures de déclaration liées, à cette catastrophe […] »604. Cet exemple montre combien dans une situation de crise, les identités politiques se démarquent dans l’action. Laurence Ferrari énonce leurs noms (« Morin et Hunault »), leur appartenance politique (« UDF »), leur statut (« députés ») et leur démarche (« proposition de loi pour »). En effet, ces deux députés, membres d’un même parti, prennent une décision révélatrice de leur volonté de se montrer comme étant réceptifs aux problèmes de la société.
Plus rarement donc, ce sont d'autres personnalités politiques qui interviennent pour confirmer l'engagement de la France : Renaud Donnedieu de Vabres (ministre délégué aux affaires européennes), Nicole Guedj (secrétaire d'état aux droits des victimes), Hervé Ladsous (porte-parole du ministère des affaires étrangères), Bertrand Cochery (sécurité des affaires de l'étranger).
Au-delà de son implication liée à la présence de touristes français dans les zones touchées, TF1 montre que la France entend jouer un rôle prépondérant sur la scène internationale et sa place sur l'échiquier européen et mondial est soulignée : «La France qui s'est vue confier la coordination des moyens européens....», « De son côté, la France a été chargée par l'Union Européenne de coordonner l'ensemble des moyens de secours, à destination de l'Asie»605. Une catastrophe est donc un phénomène violent, aux conséquences lourdes et souvent multiples. En particulier lorsque plusieurs pays sont touchés, ce qui est le cas du tsunami. La catastrophe est prompte à bouleverser l’équilibre politique d’un état en mettant en avant les identités des instances de représentation mises à l’épreuve et engagées dans la communication par et pour les enjeux606. La catastrophe en ce qu’elle représente la survenue de l’inattendu ne peut faire l’objet que d’une communication spécifique : c’est une épreuve pour le politique. L’intérêt de la chaîne pour le phénomène a une double origine: il tient d’abord au fait que la France est directement touchée à travers les ressortissants atteints, qu’ils soient vacanciers ou résidents en Asie. Il s’appuie ensuite sur une sorte d’« effet miroir » qui pousse à s’identifier aux nations touchées. La crise suscitée est une source de tensions parce qu’elle touche à de nombreuses questions cruciales concernant l’économie ou les relations internationales.
Toute une part du discours de la chaîne est centrée sur la coopération et le dialogue entre homologues français et locaux. La solidarité française est ainsi au centre des actions d'aide présentées par la chaîne : « Il s'agit du premier vol d'un pont aérien qu'il souhaite installer entre la France et les pays dévastés »607. Deux reportages diffusés le 31 décembre 2004, soulignent la solidarité entre la France et le Sri Lanka. Il faut dire que la France compte une importante communauté d'origine tamoule : «C'est une commune (Matara) qui se trouve être jumelée avec la ville française de Lorient »608. Ainsi que le précise TF1, Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, a fait le déplacement au Sri Lanka le 28 décembre 2004 afin de rencontrer la Présidente Chandrika Banbaranaike Kumaratunga, l'objectif de la rencontre étant de signifier l'aide économique pour la réhabilitation du pays. Le 29 décembre 2004, une partie du discours de Michel Barnier est retransmise par TF1.
Lancement du sujet n°13 du 1er janvier 2005 par Laurence Ferrari.
Sujet n°21 de Nahida NAKAD, diffusé le 28 décembre 2004.
Ibid
Lancement du sujet n°14 d'Isabelle MARIE diffusé le 5 janvier 2005.
Sujet n°14, op.cit. A l’époque du tsunami, lorsqu’une personne était portée disparue, la loi prévoyait un délai de dix ans avant de pouvoir faire déclarer son décès.
Brève n°5 de Laurence FERRARI, diffusée le 2 janvier 2005.
Prenons l'exemple de la canicule survenue au cours de l’été 2003 en France. L'absence de mise en œuvre d'une politique a rapidement suscité de vives critiques dont l’attention se portait sur les manquements du gouvernement à anticiper les milliers de morts engendrés par un cataclysme pourtant prévisible.
Brève n°12 diffusée le 3 janvier 2005.
Duplex de Michel SCOTT au Sri Lanka, diffusé le 31 décembre 2004.