Ces reportages sont l’occasion de mettre en scène des scientifiques dans leur cadre de travail, les laboratoires : «Un cataclysme que les chercheurs japonais ont cherché à reconstituer en laboratoire […] Des chercheurs japonais sont actuellement sur le terrain pour prendre des mesures. Leurs données viendront compléter les recherches menées depuis de longues années dans leur pays sur ce phénomène»766. L'emploi du verbe « chercher à » exprime une action régie par un but précis « reconstituer ». Dans cette optique, les experts (« chercheurs ») pratiquent des études concernant l'espace naturel dans un espace dédié à la science (« laboratoire »). Leur travail porte donc sur la réalité, ce qui valide d’une certaine manière le sérieux d’une « longue » démarche, et selon une méthode (« prendre des mesures »), utiliser les « données » pour « compléter les recherches ». Par la suite, l'un de ces chercheurs, le professeur Fumihiko Mimamura intervient devant la caméra de TF1. Il est filmé, debout, avec en arrière plan son laboratoire et ses collègues : « La force d'un tsunami de 50 centimètres de hauteur, nous dit ce professeur, est équivalent au crash d'une voiture lancée à 30km/h ». Il emploi donc une comparaison entre un « tsunami » et un « crash de voiture » «50 centimètres de hauteur, 30km/h », ce qui selon son expérience est analogue (« équivalent») pour que le spectateur puisse se représenter la situation.
Il est intéressant de remarquer que le travail des scientifiques japonais, sur un phénomène dont le nom est d'origine japonaise, est présenté sur la chaîne à plusieurs reprises et semble constituer, pour les scientifiques d’autres pays, un réel intérêt. Le discours scientifique sur le tsunami du 26 décembre 2004 permet donc d’avoir une réflexion sur le travail des scientifiques en général tout en montrant que l’on appartient à une communauté dont on connaît les travaux et les avancées : «Les Japonais vont probablement continuer leur exploration et suivre ces structures au fond de la mer, ils vont peut-être découvrir des choses beaucoup plus significatives, beaucoup plus intéressantes »767. Ici, Robin Lacassin, directeur de recherche au CNRS, garde une certaine distance et reste prudent («probablement, peut-être») quant aux avancées de la sciences suite au tsunami mais il exprime une forme d'attente en usant de termes qui renvoient : 1) à l'idée d'aventure (« exploration, découvrir »), 2) à un jugement de valeur (« plus significatives, plus intéressantes ») et 3) à un futur (« vont») où la puissance de l'homme sur la nature sera plus grande. Il met en scène les scientifiques japonais (« suivre ces structures au fond des mers ») et émet un jugement appréciatif qu’il invite le spectateur à partager.
Dans la mesure où il s'inscrit dans le temps long, ce 26 décembre 2004 va certainement permettre de mieux comprendre le phénomène du tsunami et de protéger les populations exposées. C'est en tout cas dans cette direction que s'est engagé le Japon, selon un responsable de la prévention des catastrophes naturelles à l'UNESCO : «Nous avons connu au Japon des expériences réussies d'alerte au tsunami qui ont engendré une évacuation des populations vers des refuges...euh...qui sont conçus pour ce genre de phénomène pendant un laps de temps les populations ont pu être mises à l'abri le temps que le phénomène se passe »768. L'expérience du Japon est ici représentée à travers une série d'événement réels (utilisation du passé composé), maîtrisés dans leurs modalités («évacuation vers des refuges, mises à l'abri, réussies ») et dans le temps (« laps de temps, le temps que »). L'utilisation du pronom personnel « nous » indique une assimilation entre les experts japonais et le reste de la communauté scientifique mondiale, dont le rôle est ici clairement engagé en faveur de la population qu'il s'agit de protéger.
L'expert se situe comme un témoin objectif dont les propos pourront enrichir ceux du journaliste. Cet extrait diffusé le 27 décembre 2004, lendemain du passage du tsunami, révèle l'identité d'une instance scientifique unie autour de la crise. En effet, si la zone touchée ne bénéficiait pas d'une telle technologie au moment de la catastrophe, il est important de rappeler que d'autres zones en sont pourvues. Il s'agit, en quelque sorte, de montrer que l'on maîtrise, au moins en partie, la crise.
Lancement et sujet n°24 de Carole VENUAT, diffusé le 24 janvier 2005.
Sujet n°15 d’Hervé PIGEANNE, diffusé le 23 février 2005.
Interview de Badaoui ROUHBAN, responsable de la prévention des catastrophes naturelles à l'UNESCO, extrait du sujet n°15 de Carole VENUAT, diffusé le 27 décembre 2004.