1.3.1. Le premier défi : choisir des critères pertinents d'étude des contrats

Face à la donne initiale, de nature juridique, les Conventions d’exploitation et de financement du service régional de voyageurs, l'économiste se doit de mettre en place un jeu de critères lui permettant de saisir la nature économique du contrat étudié. A cette question, la proposition méthodologique élaborée par ATOM pour l’analyse des contrats de délégation de service public, qui distingue des clauses "techniques, "incitatives", "de contrôle", "adaptatives" et "institutionnelles", nous a été d'un grand secours. Elle nous a permis, de choisir un premier jeu de critères, qui n'ont pas tous été retenus, faute de répondre à deux conditions indispensables, leur disponibilité dans toutes les conventions TER et leur faculté à se prêter à une traduction en une variable de mesure opérationnelle. Ainsi, sur la quarantaine de critères sollicités au départ, seulement une trentaine sont devenus des variables opérationnelles, exploitées définitivement par notre étude. Néanmoins, le choix initial d’un vaste panel de critères n’a pas été vain : l’éclairage porté sur les arrangements institutionnels en a été enrichi facilitant l'analyse de l'arrangement contractuel propre à chaque Région564. En continuité avec la proposition méthodologique d'ATOM, nous avons ensuite regroupé ces critères en six catégories565.

  • Les "clauses techniques" définissent l’objet du contrat et concernent le volume du service commandé et les critères et standards de qualité prescrits. Nous avons fait le choix de valoriser deux dimensions, la qualité du service produit et la continuité du service public. Pour aborder le premier domaine, nous avons retenu trois critères : le degré de précision des directives, le degré d’exigence tendancielle et le rôle de la SNCF dans la définition des niveaux de qualité à atteindre. Pour ce qui est de la continuité, notre intérêt a porté tant sur les pénalités financières (montant, franchise, plafonnement) que sur l’éventuelle mise en place d’un service minimum.
  • Les "clauses incitatives" (financières) concernent les primes et pénalités en matière de qualité du service et de production de documents d’information à l’AO. Le premier domaine est abordé par quatre critères : "Existence" ; "Plafonnement" ; "Destinataire des montants" ; "Compensation des critères". Le second est approché par deux critères "Existence d’incitation à la communication des informations" et "Dureté des pénalités pour retard d’information".
  • Les "clauses de contrôle" regroupent toutes les formes de contrôle interne (qualité, gestion) et de contrôle externe (audit, assurance qualité). En matière de contrôle interne, notre attention a porté sur le nombre, le type d’information et les délais de transmission à l’autorité organisatrice. Pour le contrôle externe, nous avons relevé le délai de prévenance avant audit et la mise en œuvre possible d'une démarche de certification de la qualité.
  • Les "clauses adaptatives" précisent les conditions de renégociation et de rupture du contrat. Il importe d’être attentif aux dispositions des éventuels avenants, qui traduisent toujours une modification de l’équilibre contractuel initial.
  • Les "clauses institutionnelles" retracent divers paramètres de la relation entre l’AO et l’exploitant. Nous avons exploré la durée du contrat, son degré de précision, les procédures d’arbitrage et de résolution des conflits, la fréquence des rencontres AO/exploitant et l’affichage de valeurs et d’une culture commune.
  • Les "clauses comptables et financières" visent à apprécier l'équilibre économique à proprement parler du contrat. Elles retiennent la nature du partage du risque sur recettes (modalités de définition de l'objectif, tolérance de l'AO par rapport à l'objectif, importance du risque à la charge de l'exploitant) ainsi que celle du risque industriel (importance de la compensation apportée par la rémunération de l'exploitant et de l'effort de productivité demandé à l'opérateur ferroviaire).

Nous résumerons la typologie des clauses contractuelles par le tableau présenté ci-dessous (tableau 4.2).

Tableau 4.2 - Typologie des clauses contractuelles.
Techniques Incitatives Contrôle Adaptatives Institutionnelles Financières
Qualité produite
Continuité du service
Incitation financière à la qualité
Pénalités financières pour transmission tardive (ou erronée) d’informations à l’AO
Transferts de l’information à l’AO
Supervision directe par l’AO
Contrôle externe (audit)
Conditions de renégociation et de résiliation du contrat Durée et précision contractuelle
Fréquence des rencontres
Procédures de résolution des conflits
Culture commune
Partage du risque commercial
Partage du risque industriel

Source : A partir de Desmaris C., (2004), p. 105.

Notes
564.

La deuxième partie de ce chapitre qui présente nos résultats le mettra en valeur.

565.

En première approche, suivant en cela la proposition d'ATOM, nous n'avions retenu que cinq catégories. A l'expérience, nous avons jugé nécessaire d'introduire une sixième rubrique, "Clauses comptables et financières", afin de mieux rendre compte de l'équilibre économique, à proprement parler, du contrat. Cette rubrique, postérieure à notre article (Desmaris, 2004), vient en enrichir l'analyse et peut modifier parfois la qualification du profil de certaines conventions TER.