3.1. L'Alsace : le profil d'une région du type "Contribuable serein" ?

La lecture des comptes de surplus des quatre premières années de la régionalisation ferroviaire en Alsace révèle un profil régional particulièrement lisible et comparativement très original (tableau 6.16)

Si les collectivités publiques sont, comme ailleurs, apporteuses de surplus sur la période, elles le sont en Alsace de manière très mesurée au regard du choc prix des péages. Alors que RFF réussit à capturer 13,3 millions d'euros en valeur constante, elles ne cèdent que 6,3 millions d'euros (figure 6.7). Ce cas, unique sur l'échantillon des régions expérimentatrices, témoigne de la très bonne maîtrise du prix réel de la subvention d'équilibre au Tkm par cette AO régionale : il est passé de 8 euros en 2002 à 8,9 euros en 2005, hausse bien inférieure à la moyenne des régions (tableau 6.8, supra). Ce résultat remarquable est confirmé par le dernier compte de surplus disponible, où la Région Alsace se présente comme la première bénéficiaire de surplus, avec 85% du STD à son avantage en 2005 (figure 6.5).

Figure 6.5 - Comptes de surplus 2005 de la région Alsace.
Figure 6.5 - Comptes de surplus 2005 de la région Alsace.

Deuxième résultat, l'opérateur historique est apporteur net d'un montant élevé de surplus au titre des charges d'exploitation (5,8 millions d'euros). Le prix réel des charges d'exploitation diminue sur la période, passant de 11,6 à 10,9 euros le Tkm entre 2002 et 2005. Ce résultat est d'autant plus appréciable que le coût au train-kilomètre était en Alsace comparativement parmi les plus faibles des régions expérimentatrices (figure 6.6, supra). Cette maîtrise des charges d'exploitation TER, principale composante du compte de facturation SNCF-TER, explique très probablement la situation exceptionnellement favorable des collectivités publiques dans cette région.

Figure 6.6 - Charges d'exploitation SNCF-C1 par train-kilomètre réalisé en euros constants 2002.
Figure 6.6 - Charges d'exploitation SNCF-C1 par train-kilomètre réalisé en euros constants 2002.

En outre, l'exploitant ferroviaire a été en mesure de réaliser des gains de productivité comparativement plus élevés que dans les autres régions expérimentatrices, à l'exception de Rhône-Alpes (tableau 6.14). La Région Alsace, qui a fortement augmenté l'offre de service (+22% entre 2001 et 2007), mise probablement sur un accroissement à moyen terme de la fréquentation TER, et donc des gains de productivité. Le taux de réponse de la demande à la hausse de l'offre, déjà élevé sur cette période (le trafic a augmenté de plus de 34% au total) peut le laisser espérer. Ces gains de productivité restent encore cependant limités, ce qui explique que l'essentiel des surplus transférés en Alsace résulte de transferts entre les agents du système TER (tableau 6.16 infra).

Les voyageurs, sur cette période, ne bénéficient que très marginalement de transferts de surplus à leur avantage : le "surplus élargi" des voyageurs reste de ce fait limité (1,4 millions d'euros, soit moins de 5% du STD). A la différence des autres régions, l'Alsace, dont la modernisation du parc de matériel roulant est une politique déjà ancienne, n'a guère connu d'arrivée de matériel neuf ou rénové sur le début de cette Convention et le prix réel des billets par Vok est resté globalement stable en dépit d'une politique tarifaire particulièrement volontariste741. La rigueur des prescriptions en matière de qualité de service produit (Desmaris, 2003) laisse espérer, à terme, une amélioration de la donne.

Tableau 6.16 - Comptes de surplus 2002-2005 de la région Alsace.
Tableau 6.16 - Comptes de surplus 2002-2005 de la région Alsace.
Figure 6.7 - Comptes de surplus cumulés 2002-2005 de la région Alsace.
Figure 6.7 - Comptes de surplus cumulés 2002-2005 de la région Alsace.

Notes
741.

L'Alsace affiche une des compensations tarifaires par Vok parmi les plus élevées (après celle du NPC) et, symétriquement, un prix moyen au Vok parmi les plus faibles. Cette Région menant cette politique tarifaire depuis de nombreuses années, les frontières de prix sur cette période restent stables, n'impliquant aucun avantage nouveau au profit des voyageurs. Il importe de rappeler que la MCS n'enregistre que des modifications différentielles et non pas des niveaux absolus d'utilité pour les agents.