3.1. Typologie des mythes

3.1.1. Observations méthodologiques

Avant de nous lancer dans l’analyse du traitement des mythes par Kunert, nous souhaitons proposer une typologie des modes d’intégration des mythes dans le corps du texte poétique. Ce travail s’appuie sur un tableau, présenté en annexe, rassemblant l’ensemble des poèmes qui traitent d’un motif mythologique299. Précisons avant toute chose que notre travail n’est pas uniquement de l’ordre du relevé statistique, il a en même temps une portée interprétative, analytique.

Les catégories définies dans le tableau correspondent aux outils développés par Gérard Genette300 et Thiphaine Samoyault301 pour étudier les phénomènes d’intertextualité. Naturellement, nous n’avons retenu que ceux qui nous semblaient pertinents dans le cadre d’une étude de textes poétiques et mythologiques. Par exemple, des outils tels que la « transmétrisation » ou la « transtylisation », c’est-à-dire la réécriture d’un poème en changeant de mètre et la réécriture stylistique à la manière des Exercices de style de Queneau ne peuvent convenir à partir du moment où l’intertexte, mythologique, à partir duquel nous travaillons est la plupart du temps pluriel et indéterminé, « dilué » pour reprendre un terme de Tiphaine Samoyault302. Ainsi, quand un poète emploie le nom de « Prométhée », il peut certes vouloir privilégier un seul intertexte, celui du poème de Goethe par exemple, mais c’est un fait que dans ce nom résonne toutes les versions du mythe de Prométhée, le mythe étant défini, comme on sait, comme l’ensemble de ses variantes. Cela dit, il est vrai que dans certains cas un hypotexte est plus prégnant qu’un autre et qu’il est alors possible d’étudier les modifications de contenu ou de style apportées par un auteur à un texte précis.

Par souci de clarté, nous nous voyons contrainte de présenter les outils que nous avons retenus l’un après l’autre, ce qui rend la lecture quelque peu fastidieuse. Mais il nous semble important de les détailler dans la mesure où nous y avons souvent recours, aussi bien pour l’étude de l’œuvre de Günter Kunert que pour celle de Sarah Kirsch, et qu’ils facilitent la détermination des modalités d’intégration des mythes.

Notes
299.

Seuls n’ont pas été pris en compte les textes qui présentaient une seule allusion mythologique, si celle-ci paraissait n’apporter qu’un intérêt très restreint au texte.

300.

Gérard Genette, Palimpsestes : La littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982. Dans Palimpsestes, Genette s’attache en effet principalement à étudier l’intertextualité romanesque et dramatique et développe des instruments d’analyse adaptés à ces deux genres. C’est pourquoi nous n’avons retenu que certains critères et que nous les avons complétés avec d’autres proposés par Tiphaine Samoyault.

301.

Thiphaine Samoyault, L’intertextualité : Mémoire de la littérature, Paris, Nathan, 2001.

302.

Op. cit., p. 88-89.