Première partie
Un contrôle renforcé

11. De nombreuses règles du droit français visent la mise en place de systèmes de contrôle. Ces systèmes peuvent prendre différentes formes. Il peut s’agir de la « vérification de la conformité à une norme d’une décision, d’une situation, d’un comportement »55. Ce contrôle est celui qu’exerce, par exemple, la Cour de cassation quand elle vérifie la conformité aux règles de droit d’une décision judiciaire qui lui est soumise par voie de pourvoi56. C’est également celui de l’employeur, qui contrôle les actes de ses subordonnés. De la même façon, les actions menées par l’employeur au sein de l’entreprise font l’objet de contrôles, à l’instar de celui que pratique l’administration du travail sur les normes patronales tel que le règlement intérieur57.

Le contrôle est souvent suivi d’une action. La Cour régulatrice, à l’issue de son contrôle, peut casser un jugement qui viole une règle de fond ou de forme. L’employeur contrôlant les actes de ses subordonnés peut les appréhender comme des fautes, ce qui lui permet de prononcer une sanction en vertu de son pouvoir disciplinaire58. L’inspecteur du travail, après avoir contrôlé le règlement intérieur, peut, s’il relève des inégalités, exiger le retrait de dispositions, ou leur modification.

En 1982, Monsieur Jean Auroux attribuait au comité d’entreprise une « fonction de contrôle »59 sur les décisions économiques de l’employeur. Le choix du terme interpelle ici. On constate que si le législateur, aux fins de ce contrôle, a doté le comité d’entreprise d’attributions - s’articulant principalement autour de l’information et de la consultation menées à l’occasion d’une procédure conduite par l’employeur -, il semble qu’il soit sans conséquence sur la décision contrôlée, celle-ci relevant de la seule responsabilité du dirigeant auquel incombe la gestion de l’entreprise. Peut-on alors parler de contrôle lorsque celui-ci reste neutre sur la décision concernée ?

Il n’en demeure pas moins que cette fonction de contrôle est exercée par un organe représentatif élu, qui cohabite avec des institutions désignées, détentrices d’autres fonctions, ce qui pose immanquablement des problèmes de compétences respectives.

Nous chercherons à découvrir si, par ses attributions économiques, le comité d’entreprise exerce réellement un contrôle sur la décision patronale et à en préciser alors la nature (Titre 1). Puis nous étudierons la coexistence de ce contrôle avec l’autre forme de participation des travailleurs au sein de l’entreprise incarnée par la représentation syndicale (Titre 2).

Notes
55.

Vocabulaire juridique, sous la dir. de G. Cornu, Puf, 8ème édition, 2007, v° Contrôle.

56.

Article 604 du Code de procédure civile.

57.

Article L. 1322-1 et s. du Code du travail.

58.

Sur le droit disciplinaire, v. par exemple J. Pélissier, A. Supiot, A. Jeammaud, préc., Dalloz, 24ème édition, 2008, n° 631 et s., p. 796.

59.

J. Auroux, préc., La Documentation française, 1982, p. 62.