2.1.b. De jeunes gays favorisés.

La source mobilisée n’est pas très riche, mais permet de montrer que l’échantillon est composée d’une population homosexuelle globalement jeune, très active et favorisée du point de vue socio-économique. Cette spécificité est certes induite en partie par l’entrée méthodologique choisie, mais produite également par deux facteurs sociologiques qui en sont indépendants : le fait d’habiter Paris et le fait d’être gay.

Tableau 14 : Distribution comparée par classes d’âge dans les différents échantillons.
  Echantillon Têtu 2007 Hommes de plus de 15 ans, Paris
(RGP 1999)
Hommes de plus de 15 ans, France
(RGP 1999)
Echantillon homosexuel
(CSF 2006)
Echantillon hommes gays
(EPG 2004)
 25 ans 2,3% 14, 6% 16,8% 12,7% 12%
25-29 ans 6,6% 13,3% 9,1% 29,4% 14%
30-34 ans 15,3% 11,6% 9,1% 18%
35-39 ans 20,7% 9,9% 9,3% 21,8% 33%
40-44 ans 20,7% 8,3% 9,1% 16,9%
45-49 ans 13,4% 8,1% 9,1% 23%
50-54 ans 8,5% 8,6% 8,6% 10,7%
55-59 ans 6,4% 6,3% 5,9%
 60 ans 6,2% 19,2% 22,9% 4,1%
Effectifs 1055 850 293 23 071 366 108 5 936

La structure de l’échantillon par classes d’âge diffère de celles des populations de référence. Par rapport aux hommes français et aux hommes parisiens, elle se concentre dans la tranche des 30-50 ans alors que les âges extrêmes y sont sous-représentés, qu’il s’agisse des moins de 30 ans ou des plus de 50 ans. Cette concentration renvoie en partie à un effet « gay » : les deux échantillons « homosexuels » disponibles ont une structure relativement proche. Notre échantillon sur-représente cependant les 35-45 ans y compris par rapport aux échantillons gays des enquêtes CSF 2006 et Presse Gay de 2004. Plus de 41% des individus y sont regroupés alors que cette proportion est estimée entre 33% et, au plus, 36% dans les deux autres enquêtes. Les plus de 50 ans sont particulièrement sous-représentés dans les enquêtes CSF et Presse Gay (entre 15 et 23% au plus contre 34% à Paris et plus de 37% en France) : ils le sont également parmi les abonnés à Têtu. Notre population est relativement jeune et très largement composée de trentenaires et de quarantenaires, composant à eux seuls près de 70% des abonnés parisiens à Têtu. Du point de vue des positions sociales, notre population est très spécifique aussi. D’abord, on y compte seulement 9,2% d’inactifs, contre plus de 30% d’inactifs chez les hommes parisiens et plus de 48% chez les hommes français51. Dans les enquêtes Presse Gay et l’enquête CSF, la part des inactifs est par contre relativement proche de nos résultats : elle oscille entre 8 et 11% qu’il s’agisse de chômeurs, d’étudiants ou de retraités. Le fait que les gays soient plus actifs que les autres explique largement le peu d’inactifs présents dans notre échantillon. Ces actifs occupent surtout certaines positions socioprofessionnelles ce qui informe sur la composition sociale de notre échantillon.

Tableau 15 : Distribution comparée par PCS des actifs occupés dans les différents échantillons.
  Echantillon Têtu 2007 Hommes, plus de 15 ans, Paris
(RGP 1999)
Hommes, plus de 15 ans, France
(RGP 1999)
Echantillon homosexuel
(CSF 2006)
Echantillon hommes gays
(EPG 2004)
AGRI 0% 0% 1,9% 1,9% 0,6%
ARTCO 6,5% 8,6% 5,1% 4,9% 5,4%
CSUP 70,3% 39,6% 8,9% 32,0% 40,8%
PROFINT 13,1% 19,8% 13,0% 28,2% 25,1%
EMP 10,2% 15,4% 7,9% 17,5% 21,8%
OUV 1,1% 16,5% 24,4% 15,5% 6,4%
Effectifs 727 566 256 23 071 366 103 5 121

Notre échantillon permet de traiter 727 individus actifs ayant déclaré leur profession sur 1220 abonnés parisiens à Têtu. On y observe une hypertrophie de la catégorie « cadres supérieurs et professions intellectuelles » (CSUP) qui regroupe plus de 70% des individus. Cette spécificité apparaît déjà dans deux populations de référence : celle des hommes parisiens au regard des hommes français dans leur ensemble et celle des gays au regard des hommes dans leur ensemble quelle que soit l’enquête de référence mobilisée. Mais elle est plus forte encore dans notre cas, le canal de recrutement accentuant sans doute encore cet effet. En parallèle, les catégories les plus modestes sont fortement sous-représentés, notamment celle des ouvriers, alors que les employés sont sous-représentés par rapport aux hommes parisiens et aux autres échantillons gays mais sur-représentés par rapport aux actifs français. La situation des professions intermédiaires est quasiment identique alors que les artisans, commerçants et chefs d’entreprise sont représentés de manière relativement correcte vis-à-vis des différents échantillons et que les agriculteurs sont logiquement absents de cet échantillon parisien. Notre population est largement composée de catégories sociales favorisées et sur-représente les classes moyennes et surtout supérieures. Ce résultat est peu surprenant au regard des caractéristiques de la population parisienne (Préteceille, 2007 ; Clerval, 2008a) et des populations homosexuelles (Schiltz, 1997 ; Nardi, Schneider, 1998 ; Bajos, Beltzer, Bozon, 2008). La population enquêtée est donc jeune, active et favorisée. Située dans les tranches d’âge de l’activité professionnelle, elle occupe le plus souvent des postes de cadres et de professions intellectuelles, disposant ainsi de ressources économiques et culturelles importantes. On peut à présent en projeter les lieux de résidence dans l’espace parisien.

Notes
51.

On considère les hommes parisiens et les hommes français de plus de 15 ans. Sont inclus parmi les inactifs les retraités (5,2% pour Paris, 22,6% pour l’ensemble de la population masculine française, en 1999).

52.

AGRI=Agriculteurs ; ARTCO=Artisans, commerçants et chefs d’entreprise ; CSUP=Cadres supérieurs et professions intellectuelles ; PROFINT= Professions intermédiaires ; EMP= Employés ; OUV= Ouvriers.