VII. 3. 1. Des personnages politiques et peoples ?

[Tri croisé 7: Genre et qualités des personnages politiques]
[Tri croisé 7: Genre et qualités des personnages politiques]

Nos analyses dévoilent plusieurs qualités du personnage politique typique. La première tient à l’omniprésence des femmes. Malgré un nombre plus réduit des personnages féminins, leur surmédiatisation par rapport aux hommes permet de concevoir un premier critère de typification. Si, dans le monde domestique, la femme est plus petite que l’homme, celle-ci semble avoir une grandeur plus haute, dans la presse people. Le genre du lectorat1174 conforte le genre des personnages ; une tension qu’on retrouvait explicitement dans ‘ Ici-Paris ’lors de la couverture de l’accouchement de Rachida Dati où « ‘ celles qui ont donné la vie ’ » incarnent les destinataires du récit1175, une désignation qui stigmatise, disions-nous, les ‘ non-mères ’ mais aussi l’ensemble des hommes.

[Tableau 16 : Mise en scène des personnages politiques selon leur qualité de membre d'une famille d'un homme politique ou de personnel politique.]
[Tableau 16 : Mise en scène des personnages politiques selon leur qualité de membre d'une famille d'un homme politique ou de personnel politique.]
[Tri croisé 8 : Type de visibilité selon la qualité des personnages politiques]
[Tri croisé 8 : Type de visibilité selon la qualité des personnages politiques]

Le croisement du genre et de la qualité des personnages politiques montre que les femmes sont plus généralement issues de la famille d’un homme politique alors que les hommes sont issus du personnel politique1176. Mais, ce résultat montre parallèlement que, chez les femmes, la répartition est plus équitable (54,3% contre 46,7%), déstabilisant alors la surmédiatisation attendue des membres d’une famille par rapport aux membres du personnel politique. Les personnages politiques sont plus souvent des femmes, les femmes sont plus souvent membres de la famille d’un homme politique, mais les personnages politiques sont presque autant des hommes ou femmes politiques que des membres de leur famille.

Enfin, c’est un croisement avec le type de visibilité qui nous permet de saisir une différence heuristique entre ces deux qualités de personnages : les membres de la famille d’un homme politique accèdent plus fréquemment aux Unes centrales.

Face à ces résultats, il nous semble que les trois personnages principaux influent radicalement sur les résultats. En effet, ces trois personnages détiennent 57,5% de la visibilité des personnages politiques.

[Figure 54 : La visibilité selon le genre (sous population sans Nicolas Sarkozy, Carla Bruni, et Cécilia Sarkozy).]
[Figure 54 : La visibilité selon le genre (sous population sans Nicolas Sarkozy, Carla Bruni, et Cécilia Sarkozy).]

Il nous apparaît alors utile de vérifier si nos résultats se modifient du moment où ne sont plus pris en compte ces personnages omniprésents. La femme comme personnage typique du genre people est vérifiée par une présence plus forte des femmes (70%), une fois les trois personnages principaux ignorés.

Cette surreprésentation des femmes, dans cette sous-population, confirme, par ailleurs, leur plus forte visibilité, puisqu’elles apparaissent plus souvent en Une centrale ou en photo sur la Une. La femme est donc le personnage typique de la presse people, et ce, de façon encore plus franche dans le mode mimétique bas.

Mais la focalisation sur la famille Sarkozy et plus précisément sur le président de la République, sa femme actuelle et sa deuxième ex-femme nous oblige, par ailleurs, à les considérer comme les personnages politiques typiques de cette presse. Ils détiennent 60,6% des Unes centrales politiques et 53,8% des photographies de personnages politiques en Une. Si nous considérons l’ensemble de la famille Sarkozy, celle-ci détient 63,5% de la visibilité des personnages politiques, 65,7% des Unes centrales et 56,3% des photographies en Une. Il y a donc une omniprésence de la famille Sarkozy dans la presse people, influant fortement sur la visibilité des personnages politiques dans cette presse. Il est donc difficile de considérer la médiatisation des politiques dans le genre people sans considérer celle de la famille du président de la République. Cela soulève alors une question sans réponse : est-ce que ce sont ces personnages, par leurs pratiques et un jeu avec les médias, qui influent sur cette médiatisation ou est-ce que si, un autre président avait été élu, la médiatisation de sa famille serait aussi forte (la période et l’actualité du mandat justifiant la médiatisation) ?

Notes
1174.

BARDELOT, E., « Lire la presse people », mémoire de DEA, 2003, p. 52. [en ligne : http://enssibal.enssib.fr/bibliotheque/documents/dea/bardelot.pdf]

1175.

Ici-Paris 3314.

1176.

Il est intéressant de noter que ce croisement n’est plus significatif (selon le χ²) lorsque l’on soustrait Nicolas Sarkozy, Cécilia, Sarkozy et Carla Bruni de la population envisagée.