22 Le consentement est un objet, conséquence de la volonté, symbole d’extériorisation de la volonté mais distinct de cette dernière37. Il ne peut porter que sur le possible, c’est à dire une volonté tendue vers le droit pour former un contrat. Le consentement fait figure ainsi d’un objet que l’on donne et qui circule, tandis qu’on conserve toujours et par principe sa volonté, ne serait-ce que pour qu’elle produise d’autres consentements. Le contrat résulte de cette dialectique entre le subjectif de la volonté et l’objectif du consentement.
La différenciation entre volonté et consentement, que l’on ne retrouve pas généralement en droit civil, mérite cependant d’être ici retenue. La volonté est assimilée à la liberté de décider et d’agir, même si celle-ci n’est pas absolue, alors que le consentement exprime la soumission à l’autre. Consentir, c’est accepter, c’est dire oui à l’autre38. C’est « faire sien » ce qui par définition, ne dépend pas de soi. C’est être à l’unisson de l’autre, « cum sentire ».
23 Il convient cependant de nuancer ces propos car la volonté, on le sait, n’est pas totalement ce pouvoir libre et infini. Elle est aussi soumise à de nombreuses contraintes juridiques et sociales mais aussi physiologiques, psychologiques, morales, quand elle n’échappe pas complètement à son opérateur. A cet égard, la psychanalyse a largement démontré qu’il n’est pas possible d’envisager la question du sujet pensant, exclusivement sur le mode du « cogito cartésien », et qu’il convient de prendre en compte des processus inconscients. Il y a quelque chose, « çà », qui pense et agit en notre nom. De nombreux travaux et expériences neuropsychologiques39, confirment que des processus non intentionnels ou plutôt non volitionnels, conditionnent l’activité revendiquée comme volontaire. L’homme ne se contient pas. Retenons surtout de ces analyses40 que l’homme n’est pas pleinement libre de vouloir, mais qu’il est surtout libre de refuser, parce que le droit de veto requiert un effort mental spécifique.
Ce détour n’est pas simple digression, car il explique en partie le choix de maintenir le terme de concept de « volonté » dans le cadre de cette recherche.
M-A Frison-Roche, « Remarques sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats », RTD civ., juillet -sept 1995 , p 573 et suiv.
A. Comte-Sponville, « Dictionnaire philosophique » préc.
Travaux et expériences dont nous ne pouvons pas relater le détail dans le cadre de cette recherche. Pour mémoire, citons notamment J-F Lambert, « Qui est ce je qui parle en moi ? De la Physique à la psychanalyse : l’inconscient revisité par les neurosciences », Conférence APM, Lyon juin 2000. G. Lafargue et A.Sirigu, « La volonté d’agir est-elle libre ? »Article Neurobiologie,Cerveau et psychologie n°6
Ces analyses démontrent notamment que la prise de conscience de l’intention d’agir est précédée par un événement cérébral caractéristique de l’intention. A priori, ceci suggère que la décision finale d’accomplir une action est inconsciente. Les neurobiologistes s’interrogent alors : un acte volontaire est-il amorcé sans le consentement de la conscience ? Un tel acte n’est-il donc pas libre ? Dès lors, il est particulièrement difficile de déclarer si une personne est, ou non, responsable de ses actes.