Conclusion titre I

255 Le champ contractuel disponible au salarié demeure encore fortement encadré en raison des résistances qui perdurent à l’œuvre du contrat. Des normes générales, des mécanismes de régulation cloisonnent la volonté et le contrat individuels. Faut-il le regretter au stade de la formation du contrat de travail ? Sans doute pas, pour la majorité des travailleurs qui n’ont guère les moyens d’une négociation contractuelle individuelle et pour lesquels la majoration de l’espace contractuel signifie surtout « procurer au contractant dominant un surcroît de ressources juridiques d’action unilatérale » 659 Le poids d’une relation inégalitaire, fondée essentiellement sur la subordination ainsi que l’influence d’un marché de l’emploi difficile, apparaissent comme des limites à l’expression de la volonté du salarié cocontractant au moment de la formation du contrat de travail.

256 Cependant, certains salariés, ceux qui peuvent faire valoir une capacité professionnelle spécifique, disposent de moyens juridiques et de réelles opportunités d’amélioration ou de singularisation de leur situation contractuelle personnelle. Cet affermissement du pouvoir de la volonté contractuelle de certains salariés paraît toutefois encore trop circonscrit pour signifier qu’une véritable évolution est en cours en vue d’octroyer aux travailleurs subordonnés, plus d’autonomie et de maîtrise dans leurs conditions d’emploi.

Lors de la formation du contrat, le droit du travail minore la volonté du salarié, essentiellement en raison d’un souci évident de sécurité et de protection de la partie la plus faible.

Paradoxalement, c’est durant la vie du contrat que cette volonté va trouver à s’affermir, grâce notamment à la réactivation jurisprudentielle de la force obligatoire du contrat fondée sur l’article 1134 du code civil.

Notes
659.

A.Jeammaud, M. Le Friant et A. Lyon-Caen, chro.préc. « L’ordonnancement des relations de travail »,p 359 et suiv.