257 Dans l’approche contemporaine du droit des contrats, le professeur C.Thibierge- Guelfucci observe que la liberté reflue de la conclusion pour réapparaître après, cependant que la sécurité contractuelle opère exactement le mouvement inverse660.Un tel mouvement est-il perceptible en droit du travail ?
Après la conclusion du contrat de travail, le double objectif de protection de la partie la plus faible et de sécurité du lien contractuel ne disparaît pas. Plus précisément, il semble qu’une place plus grande soit accordée à la volonté du salarié dans la gestion des effets du contrat. Grâce à la réactivation du principe de la force obligatoire du contrat par le juge social, la volonté du salarié prend une épaisseur juridique nouvelle. Obligatoirement sollicité lors d’une proposition de modification du contrat de travail par l’employeur, le salarié dispose alors d’une faculté de choix lui offrant une capacité de refus ou d’opposition, en tant que cocontractant (Chapitre 1). L’analyse ne pourra pas s’abstenir de répondre au moins à deux questions majeures. Est-on en présence d’une véritable faculté de choix reconnue au salarié ou s’agit-il d’une subordination « revisitée »? Existe-t-il un risque, sinon d’abandon, du moins de recul progressif des normes protectrices générales et collectives dans le rapport contractuel de travail?
258 Au surplus, on observe que dans certaines situations, le salarié a la capacité de résister aux effets de nouvelles normes collectives, en s’appuyant sur son contrat de travail ou grâce à des mécanismes de double contractualisation. La volonté individuelle du salarié n’est donc pas ramenée exclusivement à celle du groupe et peut s’affirmer dans sa capacité à défendre ses intérêts propres.On s’attachera donc à mesurer et analyser la capacité de résistance contractuelle du salarié face aux normes collectives (Chapitre 2). Inévitablement, se posera alors la question de l’avenir même du « statut » collectif.
C. Thibierge-Guellucci, art.préc. « Libre propos sur la transformation du droit des contrats », p 375-376.